Intervention de Emmanuel Macron

Réunion du 17 janvier 2015 à 9h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité

Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique :

La rapporteure thématique a parfaitement décrit la situation et montré notamment en quoi l'ouverture du capital des sociétés de gestion aéroportuaires diffère profondément de celle des concessions d'autoroutes : en effet, l'ouverture du capital est limitée et un contrat de régulation économique l'encadre.

L'autorisation qui est demandée ici va dans le sens d'une meilleure utilisation du capital de l'État. Comme ce n'est pas en tant qu'actionnaire, mais en tant que régulateur que nous exerçons le rôle le plus important pour la population française, il nous paraît opportun de nous séparer des titres que nous détenons dans ces sociétés de gestion, tout en conservant une sensibilité plus particulière, renforcée encore par l'amendement des rapporteurs, à la régulation de ce secteur. D'ailleurs, lorsque l'on parle avec les gestionnaires ou les collectivités locales concernés, on se rend compte qu'ils sont bien plus préoccupés par l'ouverture des lignes que par la détention du capital. L'ouverture des lignes reste dans les mains de l'État. C'est la direction générale de l'aviation civile (DGAC) qui en a le contrôle et qui la régule.

Ce que nous proposons ici a un sens sur le plan capitalistique : il s'agit de mieux utiliser le capital. L'affaire de Toulouse a montré la forte rentabilité d'une telle opération, comme les chiffres l'attestent. En moyenne, les dividendes que nous avons perçus au titre de l'aéroport de Toulouse au cours des dernières années s'élevaient à 1,5 million d'euros – l'État détenait 60 % du capital. La cession de 49,9 % du capital représente 308 millions d'euros. Cette opération permet d'ouvrir le capital d'une société de gestion dont on pilote les équilibres économiques. Il n'y a aucun doute sur le fait qu'il s'agit d'une bonne opération sur le plan financier.

Tirons les expériences de la discussion que nous avons eue collectivement sur l'ouverture du capital de l'aéroport de Toulouse. La sensibilité de l'un des investisseurs, perçue par toutes et tous, a créé beaucoup d'émoi, notamment sur place. Cet émoi eût été moindre si une procédure d'autorisation préalable du Parlement avait existé. C'est pourquoi la mécanique proposée par la rapporteure thématique à travers cet amendement et celui que nous avons adopté hier me paraît de bon aloi. Ouvrir le capital ou privatiser une société n'est pas une opération neutre. Aussi est-il normal qu'il y ait un débat. Sans doute les seuils en vigueur étaient-ils un peu trop élevés. En tout cas, en tant que ministre de l'économie, il est de ma responsabilité de considérer que le fait d'avoir un vrai débat parlementaire en amont est une bonne chose à tous égards pour que l'opération se déroule mieux.

L'autre conclusion que je tire de l'opération de Toulouse, c'est que, constitutionnellement l'intérêt patrimonial de l'État est une priorité. La façon dont le décret encadrait l'opération nous a conduits à choisir la candidature d'un consortium chinois. Nous pouvons, pour ces infrastructures, enrichir la nature du cahier des charges en portant explicitement dans la loi les préoccupations industrielles, celles que la rapporteure thématique a mises en évidence, celles de l'aviation civile et donc partager la responsabilité avec le ministre compétent. C'est une bonne chose, une fois encore, que le ministère de l'économie ne soit pas seul à se pencher sur le sujet. Dans les faits, d'ailleurs, il y a des échanges, si cela peut vous rassurer.

Madame la rapporteure thématique, permettez-moi néanmoins d'apporter un léger correctif à vos propos. Aujourd'hui, l'intérêt du dispositif tel qu'il est défini par le texte et défendu par le ministère de l'économie n'est pas uniquement patrimonial : lorsque la Commission des participations et des transferts doit se prononcer sur un texte, elle regarde la bonne défense des intérêts patrimoniaux, mais le ministre de l'économie est en charge de l'intégralité des équilibres tels qu'ils sont définis par le cahier des charges.

Je salue le travail qui a été réalisé par la rapporteure thématique, permettant d'inscrire cette nouvelle philosophie qui rend à la fois plus transparent et plus clair le rôle du Parlement et le rôle intergouvernemental. J'émets un avis défavorable aux deux amendements de suppression de l'article 49 et un avis favorable à l'amendement SPE1794.

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