Intervention de Emmanuel Macron

Réunion du 17 janvier 2015 à 9h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité

Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique :

Nous avons obtenu toutes les garanties s'agissant de la société d'acquisition constituée par ce consortium : elle paiera des impôts en France, et il n'y aura pas d'évasion de flux financiers. Mon collègue Michel Sapin et moi-même avons demandé dans la phase finale toutes les garanties et nous les avons obtenues.

Cette société d'acquisition a pris un exploitant, le groupe Lavalin. Ce groupe dont on s'émeut tant gère une quinzaine d'aéroports en province, dont celui de Toulouse-Francazal. Que l'on vienne m'expliquer que nous avons commis une forfaiture en laissant ce gestionnaire d'aéroports en gérer un nouveau et que le fait d'être condamné par la Banque mondiale est un crime irrémédiable ! Je vous invite à consulter la liste des sociétés françaises qui sont dans un cas comparable.

En ce qui concerne les intérêts français et le risque en termes d'intelligence économique, je vous renvoie au numéro du 13 janvier 2015 de La Dépêche où M. Enders, le président du groupe Airbus, se félicite de l'opération.

Nous avons eu plusieurs interactions dans la phase finale avec le groupe Airbus. D'abord, il souhaitait pouvoir conserver l'usage d'un couloir. Cette demande a été respectée. Ensuite, l'un des deux investisseurs, celui qui a acheté les avions, est présent sur le site aux côtés d'Airbus. Toutes les garanties ont été obtenues en termes d'intelligence économique et d'accès au site. La déclaration faite par M. Brégier le montre.

Les récents événements ont montré que les vrais enjeux d'intelligence économique ne sont pas liés au fait d'habiter le hangar d'à côté. Le problème, c'est celui de la cyberattaque et de la cybercriminalité. C'est un enjeu auquel toutes nos sociétés sont confrontées, et même les pouvoirs publics. Quand les Chinois cherchent à obtenir des informations sur nos grands groupes comme des pouvoirs publics, ils ne cherchent pas à acheter le hangar d'à côté mais ils se livrent à des attaques à travers internet, comme ils savent le faire, et comme d'autres pays le font.

Les collectivités locales et les autres opérateurs publics qui restent au capital ont demandé que nous puissions garder à leur côté certains droits de veto sur les opérations critiques. Il a été obtenu dans la négociation finale de pouvoir bloquer toute décision d'investissement structurante. À cet égard, nous vous ferons parvenir ces documents qui n'ont pas été communiqués par la presse. Dans la négociation finale, nous avons obtenu que soient protégés les intérêts des partenaires minoritaires.

Vous m'avez demandé pourquoi Toulouse n'avait pas fait l'objet d'une autorisation. Cela s'explique par le fait que le chiffre d'affaires de la société Aéroport Toulouse-Blagnac, qui était de 110 millions d'euros, est inférieur au seuil d'autorisation législative, qui était de 150 millions d'euros. Hier, vous avez voté une mesure qui aurait nécessité que l'affaire de Toulouse fasse au préalable l'objet d'une autorisation du Parlement. Nous avons donc procédé à un changement important.

MM. Fromantin et Tourret proposent une politique plus volontariste. Sur un plan intellectuel, je comprends leur raisonnement, ayant moi-même donné la justification de la nature de l'ouverture du capital de ces aéroports. Demander le transfert au secteur privé de la majorité du capital de tous les aéroports régionaux me pose un problème en termes de transparence à l'égard du Parlement parce que cela reviendrait à ce que vous autorisiez aujourd'hui le Gouvernement à privatiser les sociétés qui gèrent les aéroports de Bordeaux, de Montpellier, de Marseille, de Strasbourg et d'outre-mer, avec un débat qui n'aura pas la même nature. Cette année, on veut ouvrir les deux plus gros aéroports régionaux. Quand une autre vague interviendra, il faudra demander une autre autorisation pour mener un débat à la lumière de l'expérience que l'on aura vécue sur les deux aéroports. Ce que nous avons discuté aujourd'hui montre bien que l'expérience toulousaine nous a permis d'enrichir notre approche sur les deux opérations que nous allons conduire.

S'agissant des gares ferroviaires et routières, elles appartiennent à la branche gares et connexions et elles font partie de l'établissement public SNCF Mobilités. L'ouverture du capital que vous proposez supposerait au préalable un aménagement juridique de la forme sociale de ces gares.

Quant aux grands ports maritimes et aux ports décentralisés, ce sont des établissements publics et non des sociétés anonymes dont seul le capital pourrait être ouvert au privé. Il y a donc là aussi une contrainte juridique liée à leur forme. Une fois qu'ils auraient été transformés en société anonyme, si telle était la volonté du Gouvernement, il est évident qu'un projet de loi serait déposé pour demander l'autorisation du Parlement pour en ouvrir le capital.

Je rappelle enfin que la doctrine de l'État actionnaire s'illustre parfaitement pour les autorisations que nous demandons. Nous allons libérer de l'argent qui servira, d'une part, au désendettement de la France – la loi de finances pour 2015 intègre un critère de désendettement de 4 milliards – et à la réduction de la charge que nous faisons peser sur les générations futures, et, d'autre part, à réinvestir ailleurs, parce qu'on ne peut pas avoir de l'ambition pour la puissance publique et considérer qu'elle se financerait de façon spontanée.

Oui, ces cessions d'actifs doivent nous servir pour moitié à réinvestir. Quand on réinvestit dans PSA, quand on peut porter la voix de l'État dans Alstom, quand on investit dans la BPI pour développer des financements et des investissements, c'est parce qu'on a arbitré et cédé d'autres actifs. Quand l'État investit 1 milliard d'euros dans le logement intermédiaire, c'est parce qu'il a procédé à des cessions d'actifs.

La commission rejette les amendements identiques SPE820 et SPE1388.

Puis elle rejette successivement les amendements SPE825, SPE819 et SPE993.

Elle adopte l'amendement SPE1794.

La commission adopte l'article 49 modifié.

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