Intervention de Philippe Doucet

Réunion du 14 janvier 2015 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Doucet, rapporteur :

Nous entamons aujourd'hui l'examen, en deuxième lecture, de la proposition de loi visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat.

Le temps qui nous a été imparti n'a pas été inutile, il nous a permis de soupeser les dispositions du présent texte, en avançant dans la recherche d'un consensus entre les deux assemblées.

En effet, deux points ressortent de l'examen du texte par les sénateurs.

Le premier point est que la proposition de loi fait l'objet d'un assez large consensus entre le Sénat et l'Assemblée nationale. J'en veux pour preuve le nombre important de dispositions déjà adoptées conformes. Or, ces dispositions revêtent un caractère essentiel si nous voulons apporter, à la condition d'élu local, des améliorations concrètes. Il s'agit en premier lieu du régime indemnitaire des élus : ainsi, par le vote conforme des assemblées, le montant de l'indemnité de fonction des maires et des présidents de délégation spéciale sera désormais, par principe, fixé au montant maximal qui résulte de l'application du taux prévu par la loi.

En deuxième lieu, le Sénat et l'Assemblée nationale sont également convenus de la nécessité d'étendre le champ des dispositifs existants relatifs aux garanties accordées dans l'exercice d'une activité professionnelle. Cette orientation commune se traduira demain par l'extension du nombre d'élus susceptibles de bénéficier du congé électif, du crédit d'heures, du droit à suspension du contrat de travail, du droit à la réintégration professionnelle ou encore de l'application du statut de salarié protégé.

Il convient enfin de signaler les dispositions relatives au remboursement des frais exposés dans l'accomplissement des fonctions électives, ainsi que celles portant sur les conditions de réinsertion professionnelle des élus ou de leur formation. Avec l'accord du Sénat sur ce point, nous disposons d'un texte qui permettra aux élus de bénéficier d'une allocation différentielle de fin de mandat rénovée : une allocation plus protectrice grâce au doublement de sa durée de versement, mais une allocation qui incite aussi à la reprise d'une activité professionnelle dans un délai raisonnable, compte tenu de son caractère dégressif. Les élus locaux se verront reconnaître également de nouvelles possibilités de validation des acquis de l'expérience avec, au titre de l'exercice d'une fonction exécutive, l'obtention d'un diplôme ou d'un titre universitaire. Ils pourront exercer le droit individuel à la formation, que le texte leur reconnaît ; ils bénéficieront par ailleurs de l'établissement d'un système de dépenses obligatoires pour la formation des élus ou encore de l'organisation obligatoire d'une formation au cours de la première année de mandat.

Bien entendu, le diable se niche souvent dans les détails et le Sénat ne s'est pas fait faute de revenir ici ou là, – parfois de manière assez substantielle – sur certaines dispositions auxquelles l'Assemblée nationale avait pourtant souscrit ou qu'elle avait étoffées.

Cela dit, je crois qu'au plan des principes, il existe une réelle communauté de vues sur les voies – si ce n'est sur les moyens – d'une véritable amélioration des conditions d'exercice des fonctions électives locales. Bien souvent – nous le verrons –, les modifications apportées par les sénateurs ne reflètent pas une divergence d'objectifs. Elles traduisent plutôt un choix différent dans les moyens employés pour les atteindre. En tout cas, elles n'hypothèquent en rien la possibilité d'un accord. À cet égard, il convient de saluer ici le rôle joué par le rapporteur du texte au Sénat, M. Bernard Saugey, qui a su faire montre d'une certaine bienveillance dans l'analyse et la présentation des apports de l'Assemblée nationale.

Cet esprit de conciliation me porte à tirer ce second enseignement de l'examen du texte au Sénat : par-delà nos sensibilités personnelles, il ne tient qu'à nous d'apporter à ce dispositif les équilibres nécessaires à sa pleine et juste efficacité.

D'une part, il semble nécessaire d'affirmer – ou de réaffirmer – des règles relatives à l'exercice des fonctions électives et qui correspondent aux exigences démocratiques de notre temps. C'est dans cet esprit que je vous proposerai le rétablissement total ou partiel de la rédaction que nous avions retenue en première lecture sur plusieurs points décisifs, dont notamment le contenu de la charte de l'élu local – tout en renonçant à certains éléments qui ont suscité l'incompréhension de nos collègues sénateurs – et la modulation des indemnités des conseillers départementaux et régionaux à raison de leur participation aux travaux de la collectivité à laquelle ils appartiennent.

D'autre part, il importe de donner à la proposition de loi toute sa portée par un certain nombre de précisions ayant pour objet de renouveler les modalités de financement de l'allocation différentielle de fin de mandat, d'assurer l'exercice et les ressources du droit individuel à la formation, de garantir l'application outre-mer des dispositions de la proposition de loi et de préciser les conditions de valorisation des acquis de l'expérience professionnelle.

Dans cet esprit, il semble utile de prévoir que les dispositions financières entreront en vigueur au 1er janvier de l'année prochaine, et non à l'occasion du prochain renouvellement des assemblées concernées, prévu dorénavant en 2020 ou 2021.

Cependant, cette nouvelle lecture doit aussi permettre d'avancer, en écartant certains points sur lesquels il ne semble ni possible politiquement ni utile juridiquement de modifier le droit en vigueur. C'est ainsi que je vous proposerai d'abandonner la modification de la définition de la prise illégale d'intérêts.

Mes chers collègues, cette nouvelle lecture pourra nous permettre d'avancer de manière constructive vers la recherche d'un texte consensuel entre les deux assemblées que j'appelle de mes voeux.

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