Trop d’impôts, beaucoup trop d’impôts ont sapé la confiance des ménages et l’investissement, aucune réforme structurelle n’a été entreprise pour libérer l’activité et l’emploi, et les dépenses publiques sont encore trop lourdes pour que nous puissions espérer nous affranchir des déficits et de la dette. Mais je ne suis pas là pour faire le bilan économique du Président de la République : les faits parlent d’eux-mêmes, et je ne serai jamais aussi cruel que ses alliés d’hier qui évoquent aujourd’hui un « voyage au pays de la désillusion ».
Évitons les excès et accordons-nous au moins sur deux points essentiels.
Le premier, c’est que les circonstances sont graves. Nous venons de perdre notre rang de cinquième puissance économique mondiale, nous flirtons avec la déflation, la production industrielle est tombée à son niveau de 1994, le nombre de faillites d’entreprises atteint des records et, quant à notre richesse par habitant, elle est désormais inférieure de 6 % à la moyenne des pays développés. Atteindrons-nous 1 % de croissance l’année prochaine ? La commission de Bruxelles n’y croit pas, l’OCDE et le FMI non plus, et le Haut conseil des finances publiques a quant à lui fait part de son scepticisme vis-à-vis des scénarios gouvernementaux.
Depuis 2012, plus de 500 000 personnes se sont déjà engouffrées dans le cortège des 5 millions de Français sans emploi ou en activité partielle. Pour l’UNEDIC, aucune inversion de la courbe du chômage n’aura lieu en 2015 ; pis, il faut s’attendre, selon ses prévisions, à 100 000 demandeurs d’emploi de plus.
Certes, toute l’Europe est touchée par le ralentissement économique, mais il y a, pour nos entrepreneurs qui font faillite et tous ceux qui pointent à Pôle emploi, des nuances qui font la différence : en termes de croissance, la France se classe au quinzième rang des 18 pays que compte la zone euro, et en matière d’emploi, au onzième rang. L’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas – et je ne parle pas du Royaume-Uni – sont en situation de quasi-plein emploi. À l’évidence, notre pays va plus mal que beaucoup d’autres, et cela n’est pas sans risque pour toute la zone euro que nous entraînons vers le bas alors que nous devrions être, avec l’Allemagne, sa locomotive.
Si j’insiste sur les circonstances dégradées dans lesquelles se débattent les Français, si j’affirme que la cote d’alerte est dépassée et que le pire peut surgir de cette désespérance qui ronge notre peuple, c’est pour souligner, mes chers collègues, combien notre débat s’inscrit dans un contexte pressant.
À cet égard, et c’est le second point sur lequel nous devrions nous rejoindre, ce projet de loi n’a de sens que s’il permet d’obtenir des résultats tangibles et rapides. C’est en effet maintenant, et non pas demain, qu’il faut un choc salutaire, parce que les Français souffrent et perdent patience, et parce qu’avec la baisse du prix du pétrole, celles de l’euro et des taux d’intérêts s’ouvre une fenêtre opportune dont il faut, dès à présent, profiter.