Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, vous présentiez en octobre dernier, monsieur le ministre, les grandes lignes de votre projet de loi pour la croissance et l’activité, sensé selon vous soigner la France des trois principales maladies qui l’affectent : « la défiance », « la complexité » et « le corporatisme ». Le groupe UDI partage votre terrible constat. Depuis plus de deux ans, la confiance des Français s’est en effet largement détériorée, ce dont résulte un désagréable climat de défiance à l’égard de nos institutions, de notre classe politique tout entière et plus généralement de notre modèle social et économique.
Si la confiance est si difficile à retrouver, c’est certainement parce que notre pays fonctionne au ralenti depuis plusieurs années. En effet, le retour de la compétitivité tant espéré se fait encore et toujours attendre. Le Gouvernement peine à trouver des réponses à une crise qui n’a que trop duré et n’a jamais su prendre de véritables mesures d’envergure ambitieuses et visionnaires.
Or, comme nous n’avons cessé de le répéter au cours de ces trois années, seules des réformes structurelles permettront à la France de se relever et de retrouver son attractivité comme sa compétitivité. Nous n’avons cessé de répéter aussi que le groupe UDI est prêt à soutenir une telle démarche car l’intérêt de la France dépasse pour nous toute logique partisane. Force est de constater que vous n’avez pas su transformer l’essai, monsieur le ministre ! Les annonces du Gouvernement n’ont finalement trouvé ni le moyen ni la voie de se concrétiser. Lorsque vous parlez de complexité, par exemple, le groupe UDI ne peut que soutenir votre engagement pour une simplicité accrue à la fois pour les salariés, les entreprises et plus généralement tous les ménages français. Nous demeurons cependant perplexes face à une telle annonce. En effet, pouvez-vous dire en toute sincérité, monsieur le ministre, où est passé le fameux choc de simplification pourtant invoqué à tout bout de champ ?
Les Français ont besoin de mesures aux conséquences directes sur leur vie quotidienne, visibles et applicables dès maintenant, concrètes et compréhensibles par tous. Prenons par exemple la réforme du permis de conduire. Des millions de personnes attendent chaque année de décrocher le fameux papier rose. Le groupe UDI, par la voix de notre collègue Jean-Christophe Fromantin, proposera des mesures de simplification objectives. Nous vous demandons donc d’opter pour l’esprit qui nous anime consistant à dépasser enfin les clivages politiques en montrant que vous voulez l’adoption de mesures fortes changeant réellement la vie des Français.
Vous parlez de « corporatisme » et les membres du groupe UDI ont conscience que certains verrous empêchent la France de gagner en compétitivité et donc de jouer à armes égales avec ses voisins européens. Mais pensez-vous réellement, là encore, apporter les bonnes réponses dans le texte ? Pensez-vous qu’en pointant du doigt quelques professions la France se libérera réellement de ce que vous appelez son « corporatisme » ?
Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, le groupe UDI approuve le tableau que vous avez esquissé d’une France qui souffre mais cherche à s’en sortir. En revanche, le groupe UDI n’approuve pas les moyens que vous mettez en oeuvre pour remettre notre pays sur la bonne voie. Annoncé comme l’un des textes les plus importants du quinquennat, votre projet de loi peine en effet à convaincre. Un texte pour la croissance, l’activité et maintenant l’égalité des chances économiques aurait dû se montrer bien plus ambitieux face aux enjeux cruciaux auxquels sont confrontés quotidiennement les Français. Nous aurions aimé débattre de mesures concrètes mais surtout durables afin d’assurer l’avenir de notre pays et de nos compatriotes. À défaut, nous devons examiner un texte plutôt timide.
Pour autant, si nous ne pensons pas que le texte résoudra les principaux maux qui gangrènent notre pays, nous lui reconnaissons tout de même le mérite de proposer des pistes qui ne peuvent qu’alimenter notre réflexion. À nous de vous convaincre de le faire évoluer dans la bonne direction !
Par exemple, la partie portant sur la mobilité soulève des questions intéressantes. Le groupe UDI ne peut que se réjouir du renforcement des pouvoirs de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires qui voit son champ de compétences élargi aux secteurs routier et autoroutier. La création d’une grande entité de régulation du transport terrestre est en effet absolument primordiale à nos yeux. Les mesures prévues par le texte, que nous avons d’ailleurs su faire évoluer dans le bon sens, sont un premier pas non négligeable vers une haute autorité de régulation qui jouera assurément un rôle dans le renforcement de la compétitivité de nos transports.
Quant à la libéralisation du secteur des autocars, nous avouons ne pas vraiment comprendre l’engouement que suscite une mesure qui, selon nous, ne changera pas la face de notre pays. Si vous voulez réellement proposer des mesures libérant l’activité, monsieur le ministre, renforcez par exemple la compétitivité de notre rail régional et laissez enfin aux régions le choix des opérateurs, ce qui aura un impact à la fois sur la fréquentation du ferroviaire mais aussi sur les coûts du train au kilomètre ! Le groupe UDI est en effet persuadé que le transport ferroviaire, à la fois plus écologique et plus compétitif, doit être préféré aux autres modes transports.
À propos des professions réglementées, nous déplorons les divers effets d’annonce dont a malheureusement abusé le Gouvernement au cours des derniers mois, laissant de nombreuses professions dans l’inquiétude la plus complète. Que de chemin parcouru entre la sortie du rapport de l’Inspection générale des finances qui avait mis le feu aux poudres, les propos déplacés de votre prédécesseur sur les prétendus « rentiers » et autres « conformistes » et le texte que nous étudions aujourd’hui !
Le groupe UDI n’a pas caché dès le début de l’examen du texte en commission son incompréhension face à cette partie du projet de loi. Tout d’abord, les professions réglementées juridiques étant seules concernées par la réforme, il nous semble utile que le sujet soit traité par Mme la garde des Sceaux, mieux à même de mener une réforme si importante. Malgré ce point de rupture, le groupe UDI n’est absolument pas hostile à une évolution des professions réglementées juridiques, bien au contraire ! Nous faisons preuve là comme ailleurs d’un esprit constructif afin de les aider à avancer dans le bon sens. Il importe de rappeler que tous les professionnels concernés par le texte n’ont à aucun moment rejeté l’idée de faire évoluer leur métier vers un pragmatisme et une modernité accrus.
Le groupe UDI ne peut que se réjouir des maigres avancées obtenues lors des travaux en commission spéciale, en particulier la consultation des ordres professionnels au sujet des tarifs mais aussi de l’élaboration de la carte. Citons aussi le principe de révision quinquennale des tarifs ou encore la suppression du dispositif d’habilitation des clercs assermentés.
Pour autant, il reste de véritables points de fracture sur lesquels nous souhaitons qu’un véritable débat soit mené en séance. Il faudra ainsi clarifier le rôle de l’Autorité de la concurrence comme la mise en oeuvre du « corridor tarifaire » qui, même modifié en commission, n’est pas acceptable pour les professions. Allant à l’encontre même de la notion de service public, il risque d’engendrer une importante hausse des tarifs qui sera directement supportée par le client. Enfin, l’article relatif à la « libre installation encadrée » est particulièrement flou. Si l’idée de limiter les nominations aux zones qui en ont particulièrement besoin est une bonne chose, l’application du dispositif nous laisse songeurs.
En effet, dans les zones dites « en carence », le ministre en charge de la justice ne pourra refuser une demande de création d’office. Mais comment la sélection s’opérera-t-elle si plusieurs demandes sont formulées ? La mise en place d’un concours serait bien plus équitable et respecterait le principe même de mérite qui anime ces professions. Quant au système d’indemnisation, véritable usine à gaz, il nous est difficile de comprendre sa pertinence et son utilité.
Je laisserai à mes collègues Jean-Christophe Fromantin et Francis Vercamer le soin de détailler nos positions sur les titres relatifs à l’investissement et au droit du travail qui font l’objet de deux parties à propos desquelles le groupe UDI s’est une nouvelle fois montré force de propositions. Convaincu en effet que la France a besoin, pour sortir de la crise, d’un véritable choc de compétitivité massif et immédiat, nous défendrons la suppression de la durée minimale de travail de vingt-quatre heures par semaine ou encore l’évolution des seuils sociaux.
Nous pensons également que le dialogue social doit être davantage renforcé en l’absence d’une véritable réforme structurelle du temps et de l’organisation du travail que nous ne pouvons que déplorer.
Pour conclure, le groupe UDI n’est absolument pas hostile à un texte dont l’objectif premier est de libérer la croissance et l’activité de notre pays. Conformément à l’esprit qui nous a animés au cours de l’examen du texte en commission spéciale, nous proposerons de nombreux amendements qui nous semblent indispensables afin de faire évoluer le texte dans une voie à la fois plus ambitieuse et surtout plus applicable à la réalité de notre pays. Nous lions donc notre vote aux avancées qui seront obtenues lors de l’examen du projet de loi en séance publique.