Intervention de Patrick Hetzel

Séance en hémicycle du 26 janvier 2015 à 21h30
Croissance activité et égalité des chances économiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Hetzel :

Joli paradoxe pour une loi censée développer l’activité et la croissance.

Un certain nombre d’articles reviennent par ailleurs sur des textes récents proposés par votre majorité. C’est un bel aveu de vos turpitudes depuis 2012. Le secteur le plus concerné est bien entendu celui du logement : la loi Duflot est un échec et, en demi-teinte, vous le reconnaissez. De ce point de vue, votre texte a au moins un mérite, il le reconnaît. Dommage qu’il ait fallu attendre aussi longtemps car, dès les premiers débats ici même dans l’hémicycle, nous alertions sur le fait que la loi Duflot n’allait pas créer suffisamment de logements, qu’il y avait un écart énorme entre les déclarations et les actes.

Votre projet de loi sonne à cet égard comme un aveu. Votre majorité a fait perdre un temps précieux à la France pour se redresser et, hélas, même si, sur certains sujets, vous semblez aller dans le bon sens, votre texte n’est pas un texte pour la croissance et l’activité ; il est plus velléitaire que volontaire.

Avant d’aller plus loin dans mon analyse, je voudrais faire un petit détour par les questions de méthode. Les délais imposés par le Gouvernement sur ce texte sont irrespectueux vis-à-vis du travail parlementaire. Pour un texte aussi volumineux, il était plus que nécessaire d’avoir au moins deux semaines entre la fin de l’examen en commission et le début de l’examen en séance, d’autant que le Sénat n’examinera pas ce texte avant le mois d’avril. Nous aurions donc pu prendre plus de temps. Le Gouvernement a choisi de passer en force à l’Assemblée nationale, ce que les députés UMP ne peuvent que regretter. D’ailleurs, l’ombre du 49-3 plane encore sur ce texte, et la fin de l’année 2014 était à cet égard assez éclairante.

Concernant les ordonnances, permettez-moi de faire deux remarques. La première, c’est de constater, non sans une certaine gourmandise, que la gauche française semble connaître une conversion tardive, mais réelle, à cette méthode de gestion gouvernementale et législative. Mieux vaut tard que jamais… En revanche, nous ne connaissons absolument pas leur contenu, et cette manière de faire revient donc à un dessaisissement pur et simple du Parlement. Comme nous l’avons déjà dit en commission, nous aurions voulu avoir connaissance des projets d’ordonnances. D’ailleurs, monsieur le ministre, vous nous l’aviez promis et vous ne l’avez pas fait. Ce n’est donc vraiment pas la bonne méthode.

Concernant les professions juridiques, la réforme n’est vue que par le prisme économique et concurrentiel. Elle conduira inévitablement à des déserts juridiques en termes d’emploi et d’accès au droit. Après les déserts médicaux, voici les déserts juridiques que nous prépare la gauche ! Vous considérez le droit comme une simple marchandise. Il suffit d’ailleurs pour s’en convaincre de lire les articles en question. Vous envisagez les tarifs de ces professions sous un seul prisme, celui du code du commerce, et vous pensez que l’autorité légitime pour contrôler, c’est celle de la concurrence. De fait, vous passez sous silence d’autres aspects essentiels, comme la sécurité juridique et la nécessaire indépendance de ces professionnels, ou encore l’accès au droit de l’ensemble de nos concitoyens.

Concernant la position du Gouvernement au sujet des travaux de la commission, je note, là encore avec tristesse, que vous ne les respectez nullement. J’ai ainsi découvert avec beaucoup de surprise des amendements gouvernementaux qui reviennent sur des dispositions adoptées en commission et auxquelles vous-même, monsieur le ministre, aviez pourtant donné votre accord au nom du Gouvernement. D’ailleurs, vous ne manquiez nullement de nous rappeler, lorsque nous souhaitions la présence du garde des sceaux ou du ministre du travail, que vous représentiez bel et bien le Gouvernement. Dont acte. Mais, en ce cas, pourquoi voyons-nous maintenant arriver des amendements gouvernementaux qui remettent en cause la position que vous défendiez vous-même au nom du Gouvernement, voici huit jours à peine ?

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