Cet article offre une bonne illustration de ce projet, fait de miscellanées qui ont différentes vocations. Il s’agit parfois, comme vient d’y faire allusion le ministre, de clore des débats mal engagés. Je ne regrette pas l’extension des compétences de l’autorité de régulation des activités ferroviaires au secteur autoroutier, car j’avais moi-même formulé cette proposition. Mais quel contraste ! Assurément, cette proposition est plus opérationnelle mais infiniment plus modeste que les moulinets fort démagogiques que Mme Royal déploie sur ce sujet. Votre projet permet ainsi, si ce n’est de clore, plutôt de faire mûrir des débats mal engagés. Il est sans doute, comme l’ont souligné des collègues de mon groupe, riche d’arrière-pensées, de volonté de communication, il ne cache pas les insuffisances de votre politique économique mais il présente tout de même quelques mérites.
Il permet par exemple de revenir sur plusieurs erreurs comme la loi Duflot, l’alourdissement considérable de la fiscalité depuis le début de la législature, ou encore les mesures relatives à l’intéressement et à la participation.
Hélas, monsieur le ministre, vous avez également péché par erreur de méthode sur plusieurs des points que vous avez longuement évoqués dans votre réponse. Je pense notamment au délai de communication des travaux de l’inspection générale des finances concernant les professions réglementées.
Pourtant, nous sommes plusieurs à penser que ce texte modeste est l’occasion d’apporter quelques réponses à la question de la réforme, de sa méthode et de son contenu dans notre pays. Pour un très grand nombre de nos concitoyens, la réforme n’arrive jamais au bon moment, ne concerne jamais le bon public et ne possède jamais le bon contenu. L’accord politique est au fond assez large sur le fait que des réformes sont indispensables – mais pas maintenant, pas moi, pas ça.
Le rôle de l’opposition est de s’opposer, comme nous le rappelle notre président de groupe à juste titre, et je m’y accorde bien. S’opposer jusqu’où, cependant ? Pas jusqu’au point de s’empêcher d’agir demain, ni au point de se contredire sur ce que l’on a pu faire, penser ou proposer hier.
À certains égards, ce texte peut être critiqué, ou à tout le moins peut-on constater qu’il est tissé de miscellanées, de petites choses. Les petites choses ne sont pourtant pas méprisables. Pourquoi en effet ne pas apporter à des contraintes économiques et à des erreurs que vous avez commises de petites réponses qui peuvent posséder une certaine dimension opérationnelle ? La réponse ne doit pas être exclusivement macroéconomique ; elle peut aussi être microéconomique, et c’est l’un des postulats de ce texte – qui n’est pas irrecevable.
Ce texte contient d’ailleurs plusieurs propositions formulées par des membres de l’opposition d’aujourd’hui, soit récemment, soit alors que nous étions encore majoritaires. Lorsque j’étais rapporteur du budget des transports, j’avais ainsi proposé de libéraliser le transport par autocars, ce à quoi il m’avait été répondu que cela ne correspondait pas au modèle social français. Curieuse réponse ! Les choses mûrissent, heureusement. J’évoquais les compétences de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires, qui pourraient être étendues dans le domaine des transports, mais aussi d’autres questions en tant que président du groupe d’études sur la sécurité routière, et en matière de droit de l’environnement. De ce point de vue, l’évolution que vous proposez est la bienvenue, monsieur le ministre : voici quelques mois, j’auditionnais en effet des responsables du ministère de l’écologie à qui je posai la question de l’impact du « choc de simplification » dans leur domaine, ce à quoi ils répondirent qu’il était nul, car en matière écologique, ils ne prendraient jamais le risque de parler de simplification – un terme inaudible s’agissant du droit de l’environnement – mais tout au plus de modernisation. Il y a pourtant certaines mesures qui, s’agissant des installations classées ou d’autres dispositions, peuvent permettre de résoudre une partie du mal français des délais. L’accélération de certaines décisions n’est pas une mauvaise chose – même si la disposition adoptée concernant les éoliennes ne va pas dans la bonne direction et doit être corrigée lors de nos débats.
D’autres sujets sont plus difficiles, comme le travail du dimanche. Comme d’autres ici, je suis très hostile à la banalisation du travail du dimanche. Sur cette question, il me semble que le travail accompli en commission a permis d’approcher un équilibre à peu près satisfaisant.
De nombreux collègues de l’opposition critiquent ce texte avec vigueur et s’y opposent avec sincérité. Pour ma part, madame la présidente, je profite de cette intervention sur l’article premier pour critiquer avec vigueur – tant il y a matière – la politique économique du Gouvernement, que ce soit celle que vous conduisez aujourd’hui, monsieur le ministre, ou celle que vous avez soutenue dans vos précédentes responsabilités, vu la situation où elle a mené notre pays. Pour autant, sous réserve de l’évolution de nos travaux au cours des deux prochaines semaines, je prends plutôt le chemin de l’approbation du texte. C’est une attitude de sincérité et de cohérence au regard de ce que nous, la droite, avons fait, de ce que nous ferons, de ce que nous pensons et de ce que nous proposerons, et au regard – il est parfois bon de se poser cette question en politique – de « l’état de la matière ». Même le Président de la République l’a dit dans un moment de lucidité : votre texte n’est pas un texte fondateur, ni une stratégie économique. Je l’ai souvent dit lors des débats budgétaires : la stratégie économique du Gouvernement est assez difficile à lire. On en distingue souvent deux, allant en sens contraire et destinées à répondre à des contraintes ou à des convictions politiques contradictoires au sein de votre majorité.
Il n’y a là aucune fondation nouvelle, et pas davantage de stratégie économique – dont notre pays a tant besoin, pourtant. Il y a néanmoins quelques réformes utiles. Nous sommes quelques-uns à ne vouloir en rien renoncer à la critique vigoureuse du Gouvernement lorsqu’elle est justifiée, mais à envisager avec pragmatisme l’approbation d’un texte, qu’il s’agisse d’une privatisation ou, à tout le moins, de l’ouverture du capital d’entreprises publiques comme Nexter ou certains aéroports de province. L’exemple de Toulouse nous montre qu’il serait évidemment préférable que la situation de notre économie, la disponibilité de capitaux et la crédibilité de la signature de l’État encouragent davantage des acteurs français ou européens à participer, et l’on peut espérer que ce soit le cas un jour, car l’opération concernant l’aéroport de Toulouse ne s’est pas terminée dans les meilleures conditions.