Il faut se féliciter que certains parlementaires prennent des sujets à bras-le-corps et y travaillent de tout coeur. Cette proposition de loi a été présentée avant l'élection présidentielle au Sénat, où elle a été adoptée à une large majorité. Arrivant en discussion devant l'Assemblée, elle a vocation à être amendée. Si le fait majoritaire peut conduire à son rejet, j'ose croire que le sujet, qui nous mobilise tous, nous permettra de transcender les courants politiques.
Mme de La Raudière m'a posé trois questions.
S'interrogeant sur l'avenir des territoires peu denses, elle s'est demandé comment s'assurer que les opérateurs utiliseraient le réseau de fibre dont le développement résulterait de l'initiative publique. Le texte prévoit que, pour établir les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique, tous les acteurs, y compris les opérateurs, se réuniront, aux côtés des institutions publiques et des représentants des collectivités territoriales. En outre, deux articles apportent des garanties quant à l'appétence d'un réseau de fibre optique déployé en milieu rural. Selon, l'article 3 ter, les opérateurs formulent des recommandations techniques, que la puissance publique sera tenue de suivre. L'article 21 dispose qu'un groupe de travail définira un référentiel fixant les conditions techniques du déploiement.
Sa deuxième question porte sur l'applicabilité des sanctions, notamment au regard du droit européen. L'article 3 prévoit des conventions d'engagements signées par les collectivités – régions, départements ou communautés de communes – et les opérateurs. En Bretagne, une convention relative au zonage est en cours de finalisation. Signée par certains acteurs publics, elle fait l'objet d'une concertation. Son non-respect entraînerait des sanctions, mais le texte met tout en oeuvre pour éviter ce cas de figure. En outre, je soutiendrai un amendement visant à réunir chaque année les représentants des collectivités et des opérateurs pour qu'ils fassent le point sur l'avancement des schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN).
Mme de La Raudière craint enfin que le texte ne vise à exproprier l'opérateur historique pour l'encourager à basculer du réseau cuivre vers la fibre optique. Si la proposition de loi prévoit les conditions techniques du basculement, c'est l'ARCEP qui définira les territoires où celui-ci est possible. Fixant un objectif ambitieux, le texte permettra d'exercer une pression amicale sur les opérateurs pour les encourager à utiliser la fibre optique dans les meilleurs délais, privilégiant de la sorte un partenariat nourri par un dialogue permanent entre les collectivités territoriales et les opérateurs, et non un rapport de forces.
Mme Dubié pose à juste titre la question de la péréquation, du réseau d'initiative publique et de l'implication des collectivités territoriales. Celles-ci doivent jouer un rôle moteur. Historiquement, le Parlement a peut-être été trop prompt à distinguer les zones rentables ou non, c'est-à-dire denses ou peu denses, comme si les opérateurs ne pouvaient se diriger que vers les premières, tandis que la puissance publique viendrait au secours des secondes. L'article 21 consacré aux référentiels techniques et l'article 5 relatif à la couverture en téléphonie mobile visent à redonner la main aux collectivités territoriales en rééquilibrant le rapport de forces qui est actuellement favorable aux opérateurs privés. Le réseau d'initiative publique doit bénéficier d'un statut juridique respectueux des lois. Au même titre que le volet financier, l'article 17 prévoit de moduler les aides aux collectivités en fonction des capacités financières de celles-ci et de leur degré de ruralité. Les réserves formulées par Mme Dubié sont donc levées par le texte.
Madame Bonneton, il n'y a pas lieu de craindre que la PPL laisse la part trop belle aux opérateurs privés, puisqu'elle permet aux collectivités de nouer avec eux un partenariat fondé sur la confiance.
Madame Erhel, au cours de votre longue intervention, vous avez présenté la stratégie du Gouvernement. L'élection du Président de la République est un événement majeur intervenu entre l'approbation de la PPL par le Sénat et son examen par l'Assemblée. Loin de contester le bien-fondé du texte, vous semblez en fait regretter qu'Hervé Maurey vous ait précédé, et vous réclamez plus de temps pour définir avec Mme Pellerin une nouvelle ligne politique. Je vous accorde que le contexte économique a changé : le Président de la République a pris à bras-le-corps le problème de l'emploi, de la compétitivité et du développement économique. Mais, ce faisant, il tient le même discours que son prédécesseur.
La meilleure partie de votre intervention porte sur le financement du dispositif. À cet égard, j'ai déposé un amendement visant à ce que le FANT soit abondé par un prélèvement de 75 centimes par abonnement et par mois, qui rapporterait un total de 750 millions d'euros par an.
Merci, monsieur Favennec, pour vos encouragements. Élu comme moi d'un département rural, vous savez que le déploiement de la fibre optique pour tous et dans les meilleurs délais est une question prégnante. Je vous propose d'y travailler de manière précise en abordant l'examen du texte.