Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 14 novembre 2012 à 16h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

Je remercie M. Lagarde et le groupe UDI pour leurs trois propositions de loi, en particulier celle-ci, même si nous ne porterons pas sur elle le même jugement que sur la précédente.

Rapporteur du projet de loi Lefebvre, j'ai changé d'avis sur le fichier positif, auquel j'étais à l'origine plutôt favorable. En effet, les inconvénients de ce dispositif me semblent l'emporter sur ses avantages. Je ne suis pas seul à le dire : les associations de consommateurs sont nombreuses à nous mettre en garde.

Tout d'abord, on peut douter de l'efficacité du dispositif dans la mesure où le surendettement est le plus souvent la conséquence d'un accident de la vie – perte d'emploi, séparation, décès du conjoint. Le fichier positif ne permettra jamais d'anticiper sur ces situations-là. Les cas dans lesquels il pourrait présenter un réel intérêt sont finalement marginaux. Les exemples étrangers sont à cet égard intéressants. En Belgique, pays qui a mis en place un fichier positif, le surendettement a augmenté de 10% entre 2006 et 2010, contre 16% en France. Il n'y a donc pas de lien évident entre l'existence d'un fichier positif et le phénomène du surendettement.

Par ailleurs, si le fichier n'est mis à jour qu'une fois par mois, par exemple, il sera inefficace pour lutter contre les cas de surendettement liés à l'utilisation du crédit renouvelable. Le dispositif n'est donc pas adapté à toutes les formes de crédit qui se développent aujourd'hui.

Les inconvénients du fichier positif sont en revanche connus. Il s'agit d'abord des atteintes potentielles aux libertés publiques, qui ont conduit La CNIL et les associations de consommateurs à tirer la sonnette d'alarme. Il y a aussi le risque de démarchage par les banques à partir du fichier positif. On nous dit que cet inconvénient peut être limité, mais le nombre de Français fichés passerait tout de même de 220 000 à 25 millions ! Or plus on multiplie les fichiers, plus les risques de circulation de ceux-ci – et donc de dérives – sont importants. Je ne suis pas si sûr, monsieur le rapporteur, que la création d'un fichier légal permette de supprimer les fichiers illégaux. Nous risquons au contraire d'avoir à la fois le fichier officiel et les fichiers illégaux…

J'attire également votre attention sur le coût du dispositif, qui n'est pas neutre à l'heure où nous devons être particulièrement attentifs à nos finances publiques. Il est évalué à 15 à 20 millions pour la seule Banque de France, les coûts de fonctionnement pour les banques s'élevant pour leur part à 30 à 35 millions. Les contribuables et les consommateurs financeraient ainsi un fichier dont l'efficacité reste à démontrer.

Si le diagnostic posé est le bon, il existe d'autres moyens pour lutter contre le surendettement. Les associations de consommateurs ont proposé des pistes : étudions-les. Je rappelle que la loi du 1er juillet 2010, dite loi Lagarde, a instauré un certain nombre de dispositifs, qui n'ont concrètement été mis en place qu'en 2011. Il convient avant tout de tirer le bilan de cette loi et de voir comment elle peut être améliorée. Je le répète, il existe des pistes plus efficaces que le fichier positif pour lutter contre le problème du surendettement.

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