Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, messieurs les présidents de la commission des affaires économiques et de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, madame la rapporteure, chers collègues, l’initiative de Mme Laurence Abeille, avec qui j’ai eu plaisir à travailler, a connu un parcours « atypique » sur lequel je ne reviendrai pas, puisqu’elle vient de vous l’exposer. Le texte adopté en première lecture par notre Assemblée, le 23 janvier 2014, reprenait les conclusions des rapports du COMOP-COPIC, du rapport de suivi et de mise à jour de l’ANSES, publié en octobre 2013, et de la mission sur le principe de sobriété de MM. Girard, Tourtelier et Le Bouler.
La proposition de loi issue du Sénat en juin dernier conserve un double objectif : d’une part, le contrôle des niveaux d’émission et d’exposition aux ondes électromagnétiques, l’organisation d’une concertation au niveau local, associée si nécessaire à une médiation au niveau départemental, et la résorption des points atypiques dans un délai raisonnable ; d’autre part, l’incitation à une utilisation plus responsable des équipements terminaux et des installations permettant un accès sans fil à internet.
Disposition phare de la proposition de loi, l’article 1er a été substantiellement modifié par le Sénat. Partageant pleinement l’objectif du Sénat d’instaurer un dispositif défini le plus clairement possible dans le texte législatif, je ne peux qu’approuver dans son principe la réécriture de cet article en ce qui concerne la procédure de concertation locale et de médiation départementale. Certes, je regrette certains assouplissements, concernant les éléments d’information transmis au public ou l’absence de mesures de contrôle a posteriori de la cohérence des estimations, par exemple, mais je les crois plus formels que réels, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, les attentes fortes exprimées par les administrés conduiront les élus locaux à mettre en place une procédure d’information et de concertation qui sera la plus large possible : c’est le moyen le plus sûr de lever les craintes et les oppositions à toute nouvelle installation. D’autre part, depuis le 1er janvier 2014, toute personne peut faire mesurer gratuitement l’exposition aux ondes électromagnétiques aussi bien dans les locaux d’habitation que dans des lieux accessibles au public. Il suffira de faire usage de cette faculté pour assurer la vérification a posteriori que j’évoquais plus haut. Le choix fait par l’Assemblée nationale de retenir la notion de « modération », issue des conclusions du rapport de MM. Tourtelier, Girard et Le Bouler, me paraissait plus dynamique. Le Sénat lui a préféré celle de « sobriété », qui préserve toutefois l’idée selon laquelle il faut éviter tout excès en matière d’exposition.
Enfin, la question de la résorption des points atypiques a fait l’objet d’une écriture différente à chacune des étapes d’examen de la proposition de loi. La nouvelle rédaction en clarifie la définition en laissant une marge d’appréciation importante à l’Agence nationale des fréquences, qui est la plus à même de définir et réviser les critères de recensement des points atypiques. La réintroduction du délai de six mois pour leur réduction garantit une trajectoire raisonnable, tout en prévoyant des conditions suspensives de faisabilité et de qualité de service.
Le Sénat a fait le choix de retenir des obligations d’information et de sensibilisation du public et des utilisateurs plus pragmatiques, ainsi que celui de la prise en compte de l’impact sanitaire de l’exposition aux champs électromagnétiques. La mission confiée à l’ANSES en matière de veille, de vigilance, d’évaluation des risques et des effets potentiels des radiofréquences, de même que les modalités de la protection des enfants en bas âge dans certains espaces sont maintenues. Le lancement, dans un délai d’un an, d’une campagne d’information et de sensibilisation aux bonnes pratiques d’utilisation des téléphones mobiles et autres équipements radioélectriques est lui aussi préservé.
La remise d’un rapport au Parlement sur l’électro-hypersensibilité doit, à l’image de ce qui se fait dans d’autres pays, explorer toutes les pistes de réponses pouvant être apportées à ces personnes qui, indéniablement, souffrent. La Chambre haute a cependant supprimé les normes techniques de désactivation des équipements radioélectriques eux-mêmes, et je le regrette.
Deux principes ont guidé mon action au fil du long parcours législatif de ce texte. Le premier est celui de l’inscription dans la loi elle-même des conclusions auxquelles est parvenu le COPIC, afin que toutes les communes et tous nos concitoyens disposent des mêmes garanties d’information, de concertation et de transparence. Le texte qui vous est présenté a le mérite de fixer des règles communes qui conjuguent, sur l’ensemble de notre territoire, les avancées des technologies, les nécessités du développement économique qui passe par la révolution numérique et le principe de précaution. L’équilibre atteint aujourd’hui semblera à certains en deçà de ce que permettent déjà certaines chartes, mais rien n’interdit d’être plus ambitieux que la loi.
Le second principe consiste à soutenir les différents dispositifs d’information, de recommandations d’usage et de normes techniques qui permettent une utilisation plus responsable des téléphones mobiles et autres équipements radioélectriques.
Cette proposition de loi est attendue avec impatience par nombre de parties prenantes. Repousser son adoption définitive reviendrait à prendre le risque d’une navette sans retour. D’autres véhicules législatifs sont annoncés, notamment le projet de loi sur le numérique, qui pourront prévoir les éventuelles modifications qui s’avéreraient nécessaires à l’usage. Aussi, je vous recommande de suivre l’avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire en adoptant cette proposition de loi sans modification.