En effet, l'endettement qui aurait vocation à financer des dépenses de fonctionnement courant engendre bien des problèmes. C'est d'ailleurs une question que se pose l'État lui-même dans son propre fonctionnement et dans ses relations avec les institutions européennes.
Une dette bien gérée ou supportable, même si, comme toute dette, elle comporte une part de risque, contribue à l'évolution positive du système hospitalier et permet de développer des technologies innovantes et de nouvelles modalités de prise en charge des problèmes de santé ou des problèmes associés aux thématiques sanitaires, notre activité s'étendant, au-delà des soins en tant que tels, au domaine social.
Puisque vous nous suggérez d'évoquer des pistes de travail, je soulignerai l'importance qu'il y a à distinguer dans le pilotage de l'investissement hospitalier – et donc potentiellement de l'endettement –, l'investissement dans le biomédical et l'investissement immobilier, qui a été l'un des éléments les plus lourds de l'endettement ces dernières années. Si les difficultés financières actuelles persistent, nous pourrions nous retrouver dans dix à quinze ans devant la nécessité de rénover de manière massive l'immobilier des établissements de santé. Pour éviter les écueils du passé, il importe d'établir des modalités spécifiques pour le financement des dépenses consacrées au biomédical, à l'informatique, aux investissements courants, qui sont liées au développement de la mission principale des établissements, et, d'autre part, pour le financement des investissements immobiliers lourds qui ne peut reposer – les années récentes nous en ont apporté la démonstration – exclusivement sur l'endettement et sur les tarifs de prestation de soins. Ces derniers n'ont pas vocation à supporter les charges immobilières. Cette question se pose dans des pays voisins comme l'Allemagne qui connaît une problématique similaire du fait du développement de la tarification à l'activité.
Les plans d'investissement hospitalier sont intervenus à une époque où les hôpitaux avaient besoin de rénover leur patrimoine pour restreindre le nombre de chambres à quatre ou trois lits ou pour permettre une mise aux normes de confort, voire de sécurité. Ce nécessaire investissement, qui s'est traduit par une amélioration significative pour les patients, a eu pour cadre des schémas qui encourageaient assez fortement à l'emprunt. La logique de l'endettement a été portée par l'ensemble du système, sans que l'on puisse identifier de responsabilités particulières, ce qui, du reste, ne servirait pas à grand-chose.
Toutefois, l'ADH tient à souligner l'aspect immoral du contenu de certains contrats de prêts structurés. Les banques, dans leur ensemble, ne sont pas coupables ou condamnables d'avoir prêté, pas plus que les établissements hospitaliers ne le sont d'avoir emprunté. Le fonctionnement du système nécessite des établissements hospitaliers solides et bien armés pour gérer leurs finances comme il nécessite des banques solides et bien armées pour soutenir l'activité.
Des dysfonctionnements ont toutefois conduit certaines banques, à l'époque la plus critique du développement des prêts structurés, à suivre des stratégies commerciales – que la Cour des comptes a pointées bien mieux que nous ne le ferions – visant à placer des produits comportant un niveau de risque excessif par rapport à l'intérêt des établissements de santé. C'est une responsabilité sociale partagée que de considérer qu'il ne faut pas faire courir de risques inutiles à de grandes structures de service public qui servent la population dans un objectif non pas marchand mais d'intérêt général. L'endettement et l'investissement hospitaliers ne sont pas seulement l'affaire des hôpitaux et des autorités de tutelle qui les entourent, c'est aussi l'affaire des institutions financières, qui doivent contribuer à une gestion raisonnable de nature à diminuer les risques pour nos établissements.
Faisons un parallèle sanitaire. Un patient demande à un médecin hospitalier d'être ouvert au dialogue et de le considérer comme un acteur de son parcours de soins mais il lui demande aussi d'être un expert, à même de lui fournir tous les éléments nécessaires à un consentement éclairé, désormais inscrit dans le droit. De même, en matière de gestion financière, l'institut bancaire doit fournir tous les éléments permettant aux établissements de prendre des décisions éclairées.