Intervention de Laurence Parisot

Réunion du 16 janvier 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Laurence Parisot :

Tout ne doit pas être fait en réaction immédiate aux événements. Lorsque j'étais présidente du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), j'avais instauré, sur la suggestion du secrétaire général de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, un temps de délibération précédant chaque négociation sociale. Il permettait de s'accorder sur des diagnostics, des définitions et des idées que l'on souhaitait présenter lors de la négociation. La délibération est importante et il s'avère nécessaire d'accorder plus de temps au débat, même si cela pose la question de la délégation.

L'onction démocratique n'est pas la seule source de légitimité : celle de la compétence compte également. M. Mohamed el-Baradei, président de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), affirmait qu'il n'y avait pas d'armes de destruction massive en Irak, alors que M. George Bush défendait la position inverse : entre les deux, c'est le premier qui possédait la compétence, donc la plus forte légitimité. Les élus démocratiques sont-ils prêts à accepter de déléguer une partie de leur pouvoir à des autorités non élues mais compétentes ? Dans le domaine du dialogue social, j'estime ainsi que des délégations peuvent être transférées aux partenaires sociaux.

J'aime le verbe « subsumer », insuffisamment employé à mes yeux et qui signifie « penser un objet individuel comme compris dans un ensemble », selon le Petit Robert. Le Président de la République devrait subsumer, c'est-à-dire penser les différents éléments individuels dans leur ensemble. Il faut donc penser la subsomption, la délégation, et la reconnaissance des légitimités autres que démocratiques.

Il y a lieu de s'interroger sur les voies par lesquelles le Parlement européen pourrait davantage s'intéresser aux parlements nationaux ; par ailleurs, la chaîne parlementaire (LCP) et Public Sénat devraient retransmettre davantage de débats du Parlement européen en direct, afin de renforcer la visibilité et la lisibilité de ceux-ci. On peut en effet avoir l'impression de subir des décisions par manque d'accès à l'information.

S'agissant du traité transatlantique, n'oublions pas que la Commission européenne a reçu délégation des gouvernements de l'UE pour le négocier avec les États-Unis. Contrairement à ce que l'on lit, cette négociation n'est pas opaque, et il est possible d'avoir accès à l'information ; d'ailleurs, toutes les fédérations professionnelles concernées par ce traité connaissent l'état des négociations et ajustent leur lobbying en fonction de celui-ci. Si les fabricants européens de pare-chocs s'alarment à l'idée que pourraient leur être imposées les normes américaines, c'est bien le signe que l'information est disponible !

Je n'ai pas de conviction arrêtée sur le spoil system, mais il serait utile de l'approfondir car il existe dans les faits et, comme il n'est pas organisé, il s'avère délétère pour tout le monde.

La période des cent jours – qui pourrait être plus courte – n'induirait pas forcément une concentration de la campagne électorale sur la personne plutôt que sur le programme. Les élus et leurs équipes ont besoin d'un temps de travail pour préparer la mise en oeuvre du projet pour lequel ils ont été élus. C'est d'autant plus important que l'on dresse toujours le constat que les difficultés naissent de l'exécution des idées et non de leur contenu. La mise en oeuvre du bouclier fiscal par M. Sarkozy en 2007 et celle de la taxe de 75 % sur les hauts revenus par M. Hollande en 2012 ont été toutes deux désastreuses : remettre un chèque aux personnes détenant un patrimoine élevé dans le premier cas, déployer une mesure fiscale comportant autant d'effets pervers dans le second, ont condamné ces décisions à l'échec.

Enfin, nous devons réfléchir aux liens entre les institutions et le « quatrième pouvoir » : celui des médias et, aujourd'hui, des réseaux sociaux.

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