Intervention de Anne-Yvonne Le Dain

Séance en hémicycle du 29 janvier 2015 à 15h00
Sociétés mères et entreprises donneuses d'ordre — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne-Yvonne Le Dain :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, tout a été dit, par chacun des intervenants, sur l’objectif de la proposition de loi dont nous débattons. Nous partageons, ensemble, à peu près tout.

Nous sommes à peu près tous d’accord sur l’objectif à atteindre, ainsi que sur l’enjeu humain qu’il représente, sur l’importance pour la France de se positionner et d’apporter une réponse à ces objectifs.

Il y a trop d’imprécisions juridiques dans le texte qui a été déposé : je vais donc vous en parler maintenant. Mais le capitalisme débridé et sans conscience doit progressivement trouver ses marques et connaître un arrêt. Ici, en France, nous ne sommes pas favorables aux pratiques de la soft law qui ont été évoquées par un collègue. Elles consistent, au fil de l’eau, à construire des bonnes pratiques, des normes, des chartes et des solutions internes aux entreprises, qui sont certes indispensables et qui s’appliqueraient mais qui ne suffisent pas. En droit français, cela ne s’applique pas.

Nous sommes donc favorables à ajouter une solidité à la rédaction actuelle, à laquelle nous avions souscrit en préparant, avec quatre autres groupes parlementaires ainsi qu’avec la plate-forme placée auprès du Premier ministre, cette proposition de loi. Mais nous ne l’avions pas déposée, car elle était, sur le plan juridique, instable. Or nous voulons et nous allons solidifier cette démarche parce que nous voulons la même chose : moraliser solidement et sans innocence, et donc préciser ce que recouvre la notion de responsabilité sur toute la chaîne.

La chaîne dont nous avons parlé tout à l’heure va du donneur d’ordre à ses filiales directes ou indirectes. Elle va également du groupe mondial à tout cet ensemble. Cela nous amène à parler ici du devoir de vigilance des sociétés mères : si elles n’ont pas été donneuses d’ordre directes au sens du droit actuel, elles doivent permettre de mettre fin à l’opacité pour éviter tant de drames au nom de tant de tant d’irresponsabilité.

Les ONG se sont remarquablement mobilisées pour que la France s’engage dans cette voie et qu’elle aille plus loin que la directive européenne qui prévoit déjà l’obligation de reporting extra-financier. Je les en remercie. Nous venons de parler à l’instant d’une pétition qui circule. Or nous voulons aller au-delà. Nous partageons donc cet objectif, à savoir aller au-delà, et donc élaborer et voter demain, dans quelques semaines, probablement le 30 mars prochain dans cet hémicycle, ce qui a été clairement annoncé par monsieur le secrétaire d’État tout à l’heure, une proposition de loi qui soit juridiquement solide et qui puisse témoigner de notre volonté d’aller vite dans ce sens.

Il nous faut donc travailler solidement, ce qui motive la motion de renvoi en commission que je vous propose aujourd’hui. Il ne s’agit pas de faire ainsi une loi d’apparence, factice, une loi d’illusion, mais une vraie loi, bien solide, qui protège les salariés sur toute la chaîne, dans le monde entier, en mettant en place, au bon niveau, la responsabilité effective.

Nous voulons faire une loi authentique qui permette non seulement de condamner les fautes commises et d’indemniser les dégâts et les victimes, ce qui relève du droit pénal, mais également de les éviter. Si tout n’a pas été fait pour les éviter, il faut condamner.

Ce devoir de prévention est une invention du droit que nous sommes en train de conduire. Il faut donc le faire juridiquement de façon solide, et avec toutes les garanties pour que cette loi puisse aller jusqu’au bout du processus et ne se retrouve pas bloquée, à un moment ou à un autre, par ce qui peut se passer au-dessus de nous, par exemple par le Conseil constitutionnel.

Nous allons le faire, et nous le porterons ensuite ensemble au niveau européen. Je vous propose donc aujourd’hui d’adopter cette motion de renvoi en commission.

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