Monsieur le rapporteur, je tiens à vous remercier de nous permettre d'avoir un débat apaisé sur cette question importante qu'est la maladie de Lyme.
Depuis plusieurs mois, nous sommes en effet nombreux à avoir été saisis de cette question par des concitoyens atteints de cette pathologie, mais aussi par les associations de malades qui effectuent un travail important de soutien envers les personnes atteintes mais aussi en matière de sensibilisation des pouvoirs publics et de la communauté médicale – je pense notamment à « Lyme sans frontières », « Lympact » ou encore « France Lyme ». Ils attendent maintenant du Gouvernement des mesures concrètes qui doivent être mises en oeuvre sans tarder.
Le groupe Socialiste républicain et citoyen partage le principal objectif de cette proposition de loi déposée par plusieurs de nos collègues du groupe UMP et qui vise à mieux diagnostiquer, soigner et prévenir la borréliose de Lyme, maladie causée par les piqûres et les morsures de tiques. Cette zoonose, identifiée en 1975 dans le comté de Lyme, aux États-Unis, est bien connue en milieu rural, les forestiers et les chasseurs étant les principaux groupes à risque. Elle s'est développée en Europe ces dernières années.
L'infection est parfois asymptomatique, mais peut provoquer des complications invalidantes dans les stades tertiaires de la maladie. Il convient de souligner que l'évolution de la maladie est favorable lorsqu'elle est diagnostiquée et traitée précocement. Il demeure donc primordial que les tests de dépistage permettent réellement un diagnostic fiable.
En qualité de parlementaires, il ne nous appartient pas de trancher les controverses médicales et les débats cliniques. Il nous faut être modestes sur ces questions et prescrire des mesures qui relèvent du domaine de la loi et non de celui du règlement ou des circulaires.
Plusieurs expertises ont été conduites en France pour actualiser les connaissances sur cette maladie infectieuse dont le diagnostic, parfois délicat, repose toujours sur un faisceau d'indices à la fois cliniques, biologiques et épidémiologiques. Je pense notamment à la conférence de consensus en 2006 ou à l'avis du Haut Conseil de la santé publique en 2010.
Compte tenu des débats et questionnements en cours, la ministre des affaires sociales et de la santé a saisi une nouvelle fois le Haut Conseil de la santé publique en juillet 2012 et un rapport a été publié en décembre 2014, soit quelques semaines après le dépôt de votre proposition de loi, monsieur le rapporteur.
C'est pourquoi notre groupe estime que votre proposition d'établir un nouveau rapport, dans un délai de deux ans, pourrait s'avérer contre-productive et pourrait même retarder la mise en oeuvre de mesures concrètes pour prévenir cette maladie vectorielle et pour soigner les malades. Nous estimons que le rapport du HCSP constitue une expertise particulièrement poussée qui prend la mesure de cette maladie et formule des préconisations particulièrement importantes.
Le Haut Conseil rappelle les précautions à prendre en compte pour le diagnostic, en particulier pour l'interprétation de la sérologie. Les difficultés diagnostiques rencontrées peuvent en outre être liées aux performances des tests en raison de la variabilité des réactifs, mais aussi de la diversité des espèces de Borrelia en Europe et de la possible interférence d'autres agents infectieux transmis par les tiques.
Le HCSP recommande de revoir les performances des réactifs, notamment en termes de sensibilité et de spécificité analytique, en tenant compte de la composition antigénique. Des travaux sont engagés par la Direction générale de la santé, en lien avec le Centre national de référence des Borrelia (CNR), l'Institut de veille sanitaire (InVS) et l'Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) pour identifier les points de fragilité des tests et les possibilités de renforcer leur fiabilité d'emploi.
Pour tenter de préciser le cadre de certaines formes polymorphes persistantes mal définies, le HCSP recommande par ailleurs des études cliniques, épidémiologiques et diagnostiques, associées à des études sociologiques, ainsi que la mise en place d'essais cliniques randomisés sur les traitements antibiotiques. De telles études s'inscrivent essentiellement dans des projets de recherche multidisciplinaires portés par des organismes de recherche publics.
Nous souhaitons que le Gouvernement saisisse le plus rapidement possible des organismes comme l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et mette en oeuvre rapidement les propositions du Haut Conseil.
Enfin, le Haut Conseil préconise – et c'est pour notre groupe une proposition importante – d'associer davantage les patients et les associations. Il rappelle les dix-neuf propositions du Comité des sages dans le cadre de l'élaboration du projet de loi relatif à la stratégie nationale de santé, notamment celle visant à « accroître le rôle et l'implication des usagers et de leurs représentants dans l'amélioration du système de santé. » Il s'agit en effet de promouvoir leur plus grande participation à la définition des politiques publiques, notamment territoriales, à reconnaître leur rôle, à associer les usagers et leurs proches à la définition des indicateurs de performance du système et à renforcer la prise en compte de leur point de vue.
Ainsi, ce partenariat bien conduit pourrait instaurer avec les associations de patients un dialogue et une communication clairs sur les incertitudes et les imperfections diagnostiques actuelles, les avancées de l'épidémiologie, mais aussi les risques éventuels liés à des traitements, à des molécules ou à des associations de molécules.
Mes chers collègues, nous reviendrons sur l'ensemble des dispositions de cette proposition de loi lors de l'examen des articles, mais je souhaite rappeler que si nous en partageons les objectifs, force est de constater que l'essentiel des propositions portées dans ce texte est en cours de déclinaison. Le temps n'est plus à la rédaction d'un rapport, mais à la mise en oeuvre de mesures attendues par les malades et les associations. L'examen de cette proposition de loi, la semaine prochaine, dans l'hémicycle, va permettre au Gouvernement de nous présenter les mesures qu'il entend mettre en oeuvre rapidement.