L'école n'est pas responsable du drame que nous venons de vivre. Elle ne peut régler tous les problèmes de la société, et l'on ne peut lui demander davantage que si on reconnaît déjà ce qu'elle fait. La semaine dernière, un sondage réalisé sur 30 000 jeunes de différents pays a révélé une exception française : 83 % des jeunes de notre pays ont appris l'existence de la Shoah par l'éducation nationale. Récemment, j'ai rencontré une terminale technologique du lycée Maurice Utrillo de Stains, dont la moitié n'avait pas effectué la minute de silence. Au terme de deux heures et demie d'un débat contradictoire respectueux, nous avons mutuellement avancé. Pour expliquer la laïcité, il faut rappeler ce qu'a été la loi de 1905, pourquoi celle-ci a été suivie d'autres textes et pourquoi, sur ce point, notre histoire diffère par exemple de celle de la Grande-Bretagne. Le débat a surtout porté sur la question des libertés. Ce lycée a connu des périodes très dures, mais, grâce à la qualité de l'équipe pédagogique, notamment du proviseur, il y règne désormais une autorité comprise par les élèves. Il n'y a donc pas lieu de se livrer à la caricature, et de fouler aux pieds, comme l'a fait une brochure de SOS éducation, tout le travail pédagogique des cinquante dernières années.
Ce qui fait qu'un individu est libre, c'est qu'il comprend, qu'il maîtrise les enjeux et qu'il a le sentiment de peser face aux défis auxquels il est confronté. D'où l'importance de la globalité de l'éducation : du français et des mathématiques, mais aussi de l'histoire, de la géographie et de la philosophie. Il faut transmettre tous ces savoirs, ainsi que toutes les valeurs républicaines : la laïcité, bien sûr, mais aussi la liberté, l'égalité et la fraternité.
Cet effort demandera beaucoup de temps, à l'intérieur du temps éducatif. Faut-il prévoir de nouvelles heures d'enseignement ou, de manière transversale, intégrer l'ouverture à ces valeurs à l'enseignement actuel ? Faut-il ouvrir une réflexion sur les effectifs et les moyens ? Quoi qu'il en soit, ces nouvelles exigences devront être prises en compte à la maternelle – qui doit accueillir les enfants dès deux ans et demi – comme au primaire.
Enseigner est un métier. La loi pour la refondation de l'école de la République consacre d'ailleurs le retour d'un parcours de formation pour les enseignants. Si indispensable que soit l'aide à la parentalité, parents et enseignants ne peuvent se substituer les uns aux autres. Il faut donc rester prudent en matière de coéducation. D'autre part, il est essentiel de cerner les missions de la réserve citoyenne et de savoir qui peut en faire partie. Enfin, je souligne la difficulté d'évaluer la capacité des candidats aux concours à faire partager les valeurs de la République.