Intervention de Jean-Camille Uring

Réunion du 22 novembre 2012 à 9h15
Mission d'information sur les coûts de production en france

Jean-Camille Uring, président du Syndicat des machines et technologies de production, SYMOP :

Pour rester compétitive, notre industrie doit offrir des produits de haute qualité, fabriqués dans des délais conformes aux attentes des clients et à des coûts de production adéquats – étant entendu que nous ne devons nous comparer à ce dernier égard qu'à nos égaux, les autres Européens, les Nord-Américains et les Japonais, car chercher à prendre là l'avantage sur les pays émergents serait s'engager dans un combat perdu d'avance. Pour atteindre ces objectifs, il nous faut automatiser et, plus largement, développer le recours aux nouvelles technologies qui ne cessent d'évoluer, de la soudure laser aux fours à cristal désormais automatisés et numérisés. L'exemple allemand prouve que la qualité de l'outil de production est essentielle pour faire évoluer l'offre.

Je le redis : un robot remplacera des emplois non qualifiés, mais permettra d'en créer d'autres, plus qualifiés, et le système de formation – initiale et continue – doit permettre aux salariés de s'adapter à cette évolution. C'est en combinant expérience et formation que nous arriverons à un compromis qui permettra de maîtriser ces nouveaux outils et de tirer profit de notre environnement actuel.

Un effort considérable de sensibilisation et d'incitation est aujourd'hui indispensable et les commissaires au redressement productif comme les centres techniques ont à cet égard un rôle très important à jouer. Toutes les actions que nous entreprenons – « Robot Start PME » ou « Productivez ! » dont nous vous avons distribué la brochure – sont réalisées en étroite collaboration avec les centres techniques qui nous sont alliés : le Centre technique des industries mécaniques (CETIM), doté d'un maillage territorial de premier plan, l'Institut de soudure, etc. Ces centres, financés par des taxes parafiscales acquittées par les employeurs, assurent la diffusion des nouvelles technologies et offrent une assistance pour l'installation et l'utilisation des nouvelles machines. L'on ne peut donc que regretter la réduction de leurs crédits, décidée avant la récente élection présidentielle. Lorsqu'une PME ou une ETI fait un investissement, il est important que celui-ci soit totalement réussi ; pour cela, la nouvelle machine doit arriver dans un environnement préparé, qu'il s'agisse du processus de fabrication ou de la formation des personnels. Il faut donc intervenir au niveau local, et les commissaires au redressement productif constituent eux aussi des relais précieux à cet égard.

S'agissant des possibilités de relocalisation de la production, il ne faut pas se tromper de débat. Les utilisateurs sont aujourd'hui attentifs aux caractéristiques techniques des produits, mais aussi à la flexibilité de la production et aux délais de livraison. Une récente étude américaine montre que la production de certains biens, même s'ils ne sont pas les plus avancés technologiquement, reste indispensable au bon fonctionnement d'une industrie nationale. Il est donc nécessaire de conserver une partie du tissu industriel correspondant en évitant la délocalisation à outrance, et cela exige de disposer d'un outil de production au meilleur état de l'art.

En tant que constructeur de machines, je souhaite que nous ayons un tissu industriel national dynamique. Pour développer la machine de demain, nous avons en effet besoin de coopérer quotidiennement avec nos utilisateurs, et ces échanges – essentiels à toutes les étapes du processus de fabrication – se feront évidemment bien plus facilement si ces clients se trouvent en France plutôt qu'en Amérique du Sud ou en Chine. L'une des grandes forces de nos confrères et concurrents allemands est précisément d'avoir maintenu l'élaboration des processus de fabrication sur le sol national, ce qui permet aux constructeurs de machines de bénéficier de ce travail en commun quotidien, pour mieux exporter ensuite.

L'étude de COE-Rexecode permet de constater qu'entre 1995 et 2011, la France a légèrement amélioré à la fois son « score prix » et son « score qualité » pour les biens d'équipement mécanique. Quant à l'Allemagne, son score prix – très élevé en 1995 – est aujourd'hui inférieur à celui de la France ; les produits allemands sont donc désormais moins chers que leurs homologues français. En même temps, l'Allemagne a maintenu son avance en termes de qualité. En somme, la France est restée immobile durant les quinze dernières années alors que l'Allemagne, tout en conservant la qualité perçue de ses produits à un niveau quasiment constant, a gagné presque quinze points de « score prix ». On constate aussi, dans la même étude, que le « score prix » de l'Italie s'est dégradé alors que son « score qualité » s'est légèrement amélioré, se rapprochant de celui de la France. L'Espagne suit la même tendance puisque son « score qualité », qui s'était d'abord dégradé, s'est ensuite fortement amélioré.

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