Comwatt est une start-up spécialisée dans l'internet de l'énergie, et plus particulièrement, en son origine, sur l'autoproduction, c'est-à-dire la production d'une énergie in situ, aussi appelée « énergie potagère ». Cette énergie, qui reste bien entendu d'appoint, représente ainsi et en moyenne 50 % de l'énergie consommée, et même 70 % dans les cas les plus favorables, l'énergie achetée sur le réseau assurant le complément. C'est un peu comme si l'on avait inventé la voile en remplacement du moteur, chacun prenant le relais de l'autre en fonction des conditions climatiques.
Un tel système, hybride, permet de réduire la facture d'énergie hors taxes, facture dont il faut rappeler qu'elle se compose pour moitié des frais de transport et d'acheminement. Le prix des énergies renouvelables a beaucoup baissé, atteignant en quatre ans un facteur quatre pour les panneaux photovoltaïques. Sur une installation simple, d'une puissance de 100 kilowattheures, il est d'ores et déjà possible de proposer une énergie à 8 centimes le kilowattheure : ce prix, qui permet d'amortir l'installation sur vingt ans, s'entend par définition hors frais de transport. Pour l'EPR – Evolutionary power reactor –, le prix s'établit à 11 centimes le kilowattheure mais, pour le coup, il faut bien entendu y ajouter les frais de transport – il en va de même pour l'éolien, au reste –, pour 7 centimes, soit 18 centimes au total.
Que faire, entend-on souvent dire, lorsque les conditions climatiques ne permettent plus la production des énergies d'appoint ? C'est le réseau qui prend le relais ; il représente une sécurité qui suppose bien entendu une régulation au niveau national, et qui donne tout son sens au système de l'effacement.
Nous avons développé un algorithme qui, selon les conditions observées à l'échelle d'un site, d'une région ou d'un pays, permet d'interrompre la consommation de certains appareils pendant quelques minutes ou parfois quelques heures, et ce sans perte de service pour le client final. Nous réduisons donc la facture de nos cinq cents clients grâce à la production d'une énergie locale moins chère et à la protection des réseaux, l'internet de l'énergie permettant une gestion centralisée des appareils, que nous ne faisons fonctionner que lorsque le réseau produit une énergie bon marché. Par le fait, plus le mix français intègre d'énergies renouvelables, plus les fluctuations entre les pointes de production et de consommation sont importantes. En Allemagne, où la production d'énergies renouvelables est sept fois plus élevée qu'en France – avec 35 gigawatts de capacité installée pour le solaire et 35 gigawatts pour l'éolien –, il arrive que l'offre et la demande se déconnectent l'une de l'autre, si bien que l'énergie atteint des prix négatifs sur le marché de gros. Notre solution coûte quelques centaines d'euros ; elle peut s'installer partout en deux heures, et nous pourrions la produire à 200 000 exemplaires : si l'Allemagne l'utilisait, elle ne rencontrerait jamais le problème que je viens d'évoquer.
L'Allemagne a néanmoins pris de l'avance sur la production d'énergies renouvelables, sans toutefois intégrer le problème de la demande ; la France, elle, a développé un savoir-faire en matière de nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) et de big data. Ce savoir-faire est reconnu jusqu'en Californie, où mon associé s'est d'ailleurs installé il y a deux mois. L'internet de l'énergie est sans doute le secteur grâce auquel notre pays peut compenser le retard pris dans les machines-outils, que les Allemands ont exporté dans le monde entier. Nous pourrions, de la même façon, exporter notre savoir-faire, d'autant que les problèmes qui se posent en France se posent également dans les autres pays. En Australie, où notre entreprise commence à s'implanter, une banque a réalisé une étude selon laquelle l'autoproduction d'énergie photovoltaïque serait, à l'horizon 2018, moins coûteuse qu'un charbon même à zéro euro la tonne, compte tenu des coûts de transport dans ce vaste pays de 23 millions d'habitants ! Cela conduit d'ailleurs ceux qui investissent aujourd'hui dans le charbon en Australie à s'interroger…
Notre entreprise propose en somme des énergies, non pas renouvelables, mais décentralisées, dans le cadre d'un nouveau modèle économique fondé sur une technologie d'ores et déjà disponible. On observe, depuis plusieurs décennies, une baisse continue du prix des énergies renouvelables ; ainsi, selon la loi de Swanson, le doublement de la capacité de production mondiale de photovoltaïque diminue les coûts de production du kilowattheure de 20 % ; et cela se produit tous les vingt mois, depuis quarante ans. Énergie peu coûteuse, le photovoltaïque est aussi facile à installer ; surtout, il n'en est qu'à ses débuts : même si son développement reste assez lent en France, il a progressé de 30 % au niveau mondial. Les États-Unis, l'Inde, la Chine et le Japon investissent massivement dans ce secteur, dont Barack Obama ne cesse de parler car il a compris qu'il était un vivier de créations d'emploi. D'après une étude de Robert Pollin, de l'université du Massachusetts, 1 million de dollars investis dans les énergies renouvelables créent en moyenne quatorze emplois, contre six dans les énergies conventionnelles – et moins encore dans le nucléaire. Ces technologies, que nous possédons déjà, nous offrent donc de réelles capacités pour l'avenir.