Le Maroc a engagé il y a quelques années une politique de coopération Sud-Sud. Notre pays est une porte vers l'Europe et connaît un important phénomène de migration depuis le Sahel. Les flux migratoires au Maroc dépassent les 100 000 personnes. Nous avons régularisé cette année, dans le cadre de nos conventions relatives aux droits humains, la situation de 30 000 migrants, que nous avons intégrés à notre marché du travail. Le changement climatique et la dégradation des terres en Afrique a également un impact sur notre pays. Il était donc nécessaire de réfléchir à une politique migratoire nationale. C'est dans ce cadre que Sa Majesté Mohammed VI a décidé de renforcer la coopération Sud-Sud, en favorisant l'investissement dans les pays africains et en créant des projets de développement en Afrique. Le Maroc, par le biais de nombreuses institutions et entreprises, est aujourd'hui implanté dans beaucoup de pays africains ; c'est le cas, par exemple, de nos institutions financières, telles qu'Attijariwafa Bank, présente dans vingt-quatre pays africains.
Au sein du ministère de l'environnement, nous avons créé un centre de compétence sur les changements climatiques, qui travaille depuis un an avec plusieurs pays africains pour les accompagner dans leurs politiques de gestion des déchets, de traitement des eaux usées, d'économie circulaire… Après Lima, ce centre, grâce au soutien du Fonds vert et du Gouvernement allemand, a étendu ses activités au soutien à la préparation des INDC par les pays africains. Mme Girardin, que j'ai rencontrée ce matin, m'a parlé d'Expertise France, créé il y a deux jours avec le même objectif d'accompagner les pays africains à préparer leurs contributions. Le premier objectif est d'aider ces pays à bénéficier du Fonds vert et à opérationnaliser leurs projets.
Nous avons appris de nos échecs, comme des vôtres, et nous apprenons aussi des succès. Nous avons acquis une expertise, qui permettrait à nos entreprises, soit directement, soit dans le cadre d'une coopération triangulaire, par exemple avec les entreprises françaises présentes sur notre marché national, de se rendre dans les pays africains pour réaliser ces projets.
S'agissant du tri, nous n'avons pas, au Maroc, ni dans les autres pays africains, les moyens de prévoir cinq poubelles. Nous avons développé un modèle de deux poubelles, l'une pour les déchets organiques, l'autre pour les déchets non organiques. À la fin de l'année 2014, j'ai mis en place une écotaxe sur le plastique. Ces recettes sont entrées dans les caisses de l'État et seront redistribuées pour lancer le recyclage en 2015, à partir de Casablanca. Nous ne pratiquons plus la mise en décharge ; nous sommes dans la valorisation, dans toutes ses composantes.
Nous avons créé nos propres modèles. Dans le passé, nous avions tenté de transposer des modèles français, mais cela a été un échec. Je pense par exemple aux stations de compostage implantées au Maroc dans les années soixante, avec des technologies françaises : ces technologies n'étaient pas adaptées aux déchets marocains, en raison d'un taux d'humidité différent, d'un taux de matière organique différent, de l'absence de tri, et nous avons connu des cas de contamination.
Je salue l'AFD, auprès de laquelle j'ai d'ailleurs été consultante sur le projet de dépollution industrielle de la baie d'Agadir. Sa contribution à notre programme d'alimentation en eau potable a été très importante, ainsi que pour le traitement des eaux usées. En revanche, elle est encore très peu présente au ministère de l'environnement, sans doute parce que celui-ci est de création récente ; elle est davantage active auprès de l'office national de l'électricité et de l'eau potable, ainsi que du ministère de l'agriculture.
L'urbanisation est un problème sensible. Avec les sécheresses récurrentes, la dégradation des terres, la salinisation de l'eau dans plusieurs parties du territoire, la population rurale a commencé à migrer vers les villes. Ces dix dernières années, nous avons lutté contre la ceinture de bidonvilles qui se créait ainsi autour des villes marocaines, et ce avec des projets de ceintures vertes et de développement vertical, en lieu et place du développement horizontal qui a coûté très cher à l'État, pendant longtemps.
J'ai l'habitude de dire que le ministre le moins aimé, dans tous les gouvernements du monde, est le ministre de l'environnement, qui doit toujours évaluer et critiquer ses collègues. On ne peut protéger l'environnement sans impliquer les citoyens. Mon ministère n'ayant pas les moyens de toucher ceux-ci directement, nous passons par les universités, les écoles, les associations, dont j'ai fait des alliés d'excellence. Nous avons créé le forum des associations spécialisées dans l'environnement et nous accordons à ces associations un accès direct sur le site Web du ministère. Nous sommes également en train de conduire un programme d'éducation environnementale en milieu scolaire, et nous recevons les écoles. De même, nous préparons une campagne de communication en direction du grand public concernant le recyclage.