Vous imaginez dans quelles affres se trouve un ministre de l'intérieur viscéralement attaché aux principes républicains, désireux d'appliquer le droit et déterminé à faire respecter l'autorité de l'État. Lors de la tragédie de Sivens, on m'a d'abord sommé de justifier la présence des forces de l'ordre. On me demande à présent pourquoi elles étaient si peu nombreuses. Je le répète : j'ai d'abord considéré qu'il ne fallait pas les positionner. Mais, dès l'ordre que notre interlocuteur, Ben Lefetey, était débordé par des casseurs, et qu'on pouvait craindre une contre-manifestation, on ne pouvait laisser s'affronter des casseurs et des représentants du monde agricole exaspérés. S'il y avait eu des morts et des blessés, c'est non devant vous mais devant une autre instance que je devrais répondre aujourd'hui.
Tous les responsables de la police et de la gendarmerie vous confirmeront que, dans les opérations de maintien de l'ordre, le rapport entre forces de l'ordre et manifestants n'est pas d'un pour un. Comment ferait-on dans une manifestation comme celle du 11 janvier, qui a réuni un million et demi de personnes ? On se sert du positionnement, des munitions et de l'évaluation de la situation. Je vous suggère d'auditionner le plus grand nombre possible de mes collaborateurs, pour aller jusqu'au bout de cette réflexion stratégique.