Intervention de Ben Lefetey

Réunion du 29 janvier 2015 à 9h00
Commission d'enquête sur les missions et modalités du maintien de l'ordre républicain dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, ainsi que de protection des personnes et des biens

Ben Lefetey, porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet :

Notre relation avec la première préfète, Josiane Chevalier, a été inexistante, car, après l'envoi de notre contre-rapport, elle a refusé de nous rencontrer. Lorsque nous avons demandé l'organisation d'un débat public afin que l'État explique pourquoi il autorisait le projet, elle n'a pas daigné nous répondre.

Début mars, lorsqu'une cinquantaine de personnes extérieures ont rejoint les occupants et ont commencé à installer des barricades, nous avons, devant les risques de radicalisation du mouvement, sollicité un rendez-vous auprès de la préfète et du président du conseil général pour discuter avec eux de la manière dont nous pouvions contribuer à apaiser les choses sur le terrain. Le président du conseil général nous a répondu que le maintien de l'ordre n'était pas de son ressort ; quant à la préfète, elle n'a pas donné suite, alors que notre courrier faisait clairement état de nos craintes qu'il y ait des affrontements et des blessés de part et d'autre. Fort heureusement, la situation n'a pas dégénéré à l'époque car les occupants s'en sont tenus à la défense de la zone humide, sans jamais aller au contact avec les forces de l'ordre. Lorsque le successeur de Madame Chevalier a pris ses fonctions, le 1er septembre, j'ai contacté son secrétariat pour obtenir un rendez-vous. Cela n'a pas abouti et, compte tenu de mon expérience précédente, j'avoue ne pas avoir insisté.

Si les forces de l'ordre et le commandant de gendarmerie savent le rôle de médiateur qu'a pu jouer notre collectif et la manière dont, à plusieurs reprises, nous avons contribué à apaiser la situation entre les gendarmes et les occupants, l'État, en revanche, n'a pas su utiliser nos ressources. La situation est heureusement différente aujourd'hui : je suis en contact régulier avec le préfet qui, à travers moi, s'efforce de nouer des relations avec les zadistes et d'apaiser les tensions.

Pour en revenir aux hypothèses que j'ai formulées sur les véritables motivations des perturbateurs, on comprend aisément l'intérêt que peuvent avoir les porteurs de projet à voir dégénérer une manifestation : cela focalise l'attention des journalistes sur les affrontements, plutôt que sur le fond du dossier. Y a-t-il eu manipulation ? L'extrême-droite a-t-elle voulu déstabiliser notre mouvement ? Ce que je sais, c'est que je n'avais jamais vu auparavant les trois quarts des individus qui sont arrivés sur le site le 25 et le 26 octobre. Pour notre part, nous nous étions engagés à assurer le service d'ordre sur les lieux où nous manifestions pendant la journée du samedi. Nous avons tenu notre engagement et évité tout débordement. Ce qui se passait à 1,5 kilomètre de là, ce n'était pas à nous de l'assumer.

Quant au saccage du conseil général, je vous renvoie au Tarn libre, qui a relaté avec précision ce qui s'est exactement passé. Soixante-dix personnes ont investi le conseil général et se sont assises sur les escaliers, dans l'attente de réponses que nous attendons depuis plus d'un an et que même une grève de la faim ne nous a pas permis d'obtenir. À la demande du président du conseil général, elles ont été expulsées manu militari par la police, et, avec elles, des journalistes et des élus de la République. Ne parlons donc pas de saccage. Je déplore simplement qu'une personne ai tagué les murs mais, là encore, je m'interroge : filmée et photographiée par les journalistes, vêtue d'une combinaison qui la rend très visible parmi les manifestants, elle opérait sous le regard du personnel, des forces de l'ordre et de policiers en civil mais n'a pas été arrêtée. Les images des murs tagués en revanche ont été massivement utilisées et diffusées par le conseil général.

Le préfet du Tarn ou son directeur de cabinet vous confirmeront que, lors des manifestations qui ont eu lieu à Gaillac ou à Albi après la mort de Rémi Fraisse, nous avons fait en sorte que les nôtres se comportent bien, n'hésitant pas à nous écarter pour laisser les forces de l'ordre intervenir contre les casseurs. Nous ne sommes pas solidaires des gens qui utilisent la violence pour obtenir gain de cause.

Les pouvoirs publics doivent travailler à la prévention des conflits, ne pas rester sourds aux alertes citoyennes, favoriser le dialogue et la concertation, au lieu de passer en force, avec les risques de conflit que cela comporte. Si, toutefois, le conflit sur le terrain n'a pu être évité, les consignes données aux forces de l'ordre doivent être proportionnées : quand on à affaire à des gens non violents, il est inacceptable d'avoir recours à la violence. Une manifestation n'est pas un lieu où l'on doit perdre un oeil ou mourir.

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