Intervention de Sandrine Doucet

Réunion du 11 février 2015 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Doucet :

Monsieur le rapporteur, votre rapport permet, avec beaucoup de précision et de pédagogie, de comprendre la nouvelle organisation de l'université des Antilles et de saisir les enjeux globaux qui accompagnent cette création.

La séparation de l'université guyanaise de l'université des Antilles et de la Guyane à la suite des grèves de l'automne 2013 n'a pas manqué d'attiser les tensions entre les pôles guadeloupéen et martiniquais, exacerbant une rivalité ancrée dans l'histoire. Pour apaiser une situation troublée dans les universités, marquée, notamment, par les grèves qui ont eu lieu en Guadeloupe, le Gouvernement a tiré parti de son habilitation à modifier les dispositions législatives relatives à l'université des Antilles et de la Guyane pour procéder, dans l'ordonnance du 17 juillet 2014, à un profond renforcement de l'autonomie de ses deux pôles.

Au cours de sa réunion du 14 janvier 2015, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat a enrichi le projet de loi initial et a veillé à ce que le président de l'université et les présidents des deux pôles régionaux travaillent à l'avenir en bonne intelligence, grâce à l'instauration d'un ticket de trois candidats pour ces postes décisifs.

Préalablement, une ordonnance prise en 2008, qui s'appuyait sur la loi LRU de 2007, avait proposé une organisation reposant sur trois vice-présidences pour chacun des pôles régionaux qui constituaient alors l'université des Antilles et de la Guyane. Mais leur autorité et leur rôle dans le processus reposait essentiellement sur la faculté pour le président, ouverte par l'ordonnance de 2008, de déléguer sa signature, notamment pour ordonnancer les recettes et les dépenses des composantes situées dans la région. Ces dispositions ont échoué à garantir une articulation efficace. Désormais, avec l'ordonnance de 2014, le président garantira la cohérence de l'université, et les vice-présidents, avec des pouvoirs dévolus, assureront les décisions au plus près des territoires.

On pourrait regretter que ces dispositions n'aient pu, dans leur logique la plus aboutie, englober le pôle guyanais. Mais les événements de novembre 2013 ont marqué davantage le cumul des problèmes non résolus au cours des années précédentes que les limites de la loi ESR qui, elle, permet d'éviter la division complète des sites universitaires. Nos buts demeurent ceux qui ont inspiré la loi ESR de 2013 : la démocratisation de l'enseignement supérieur et la lutte contre l'échec en premier cycle. Ces enjeux sont forts aux Antilles, où comme le relevait le rapporteur, les diplômés du supérieur entre vingt-cinq et trente-quatre ans plafonnent à 27 % en Martinique et à 22 % en Guadeloupe, contre 42 % en métropole. Ces performances décevantes sont liées notamment à des taux d'échec en licence très élevés, atteignant 68 % en première année.

Aux difficultés sociales et étudiantes, s'ajoutent celles de l'insularité, de l'éloignement, et donc de la mobilité. Pour suivre jusqu'au bout l'application de la loi ESR, il faut aussi penser à son autre volet : le rayonnement universitaire. Pour attirer, il faut rayonner scientifiquement. L'université des Antilles bénéficie d'atouts exceptionnels grâce à la présence de nombreux centres de recherche tels que de l'Institut Pasteur, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) et bien d'autres.

Il s'agit, pour l'université des Antilles, d'exister pleinement dans ce nouveau cadre, pour les étudiants, de disposer d'un ensemble de cursus répondant à la démocratisation des savoirs, et pour l'université, aux Antilles comme en métropole, de contribuer au rayonnement de la France. L'enjeu est d'autant plus louable que le concurrent américain est proche.

La France du lointain dit notre capacité à porter nos ambitions et nous donne la mesure du monde qui nous entoure. L'université française, à travers l'université des Antilles, doit aussi relever ce défi. C'est pour cette raison que nous adopterons ce projet de loi. Je vous demanderai, monsieur le rapporteur, de bien vouloir nous en dire plus sur les capacités de rayonnement, au plan mondial, dont peut disposer l'université des Antilles.

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