Monsieur le président, je tiens à vous féliciter pour avoir organisé une table ronde sur ce thème beaucoup trop rarement évoqué, en particulier à quelques mois de la conférence de Paris. Il est très important d'évoquer le lien entre la production de viande et le réchauffement climatique. (Murmures)
Je rappellerai quelques chiffres qui montrent l'impact énorme de notre alimentation carnée sur le dérèglement climatique. Selon la FAO, l'élevage est responsable de 18 % des émissions de gaz à effet de serre, c'est-à-dire davantage que l'ensemble des moyens de transport réunis. D'autres organismes évoquent des chiffres encore plus élevés.
Nous savons que la production d'un kilo de boeuf engendre cinquante à cent fois plus d'émissions de gaz à effet de serre que la production d'un kilo de blé. L'un des problèmes principaux générés par cette surconsommation de viande est le changement d'affectation des sols. La destruction de la forêt amazonienne dont tout le monde s'émeut est liée en majeure partie à la culture du soja qui est utilisé pour nourrir les cheptels occidentaux, sans compter que cet accaparement des terres pour produire de la nourriture pour le bétail concurrence les cultures vivrières locales. Le WWF Suisse a ainsi calculé que la production d'un kilo de boeuf nourri au fourrage nécessitait 323 mètres carrés, contre 17 mètres carrés pour un kilo de riz et 6 mètres carrés pour un kilo de légumes. Nous savons que cette course au « toujours plus » de viande n'est pas viable écologiquement ; elle est surtout aberrante. Alors que plus d'un milliard de personnes souffrent de la faim, nous détruisons des calories végétales pour les transformer en calories animales. Il faut en effet sept à dix kilos de végétaux pour faire un kilo de viande de boeuf, quatre à cinq kilos et demi pour un kilo de viande de porc. Or, cette surconsommation de viande est récente. Un Français consomme plus de 1,5 kg de viande par semaine, ce qui est beaucoup trop, et beaucoup plus qu'il y a encore quelques décennies.
Répondre à cette demande toujours croissante ne peut se faire qu'en développant l'élevage intensif, le plus pollueur et le plus dramatique pour la condition animale. Or nous savons que la France ne gagnera pas cette compétition de la quantité et qu'il faut au contraire réorienter notre filière vers l'élevage extensif et de plein air dans les pâturages. Il faut cesser cette course à la quantité et aller vers une consommation moindre mais de qualité.
Je pourrais encore évoquer l'impact de l'élevage sur la dégradation des sols, la pollution des rivières, la pollution de nos côtes avec les algues vertes, etc. Une prise de conscience de l'impact écologique de l'élevage est nécessaire, et les pouvoirs publics devraient promouvoir une baisse de la consommation en réorientant nos filières vers la qualité.
Rappelons également que la consommation excessive de viande est mauvaise pour la santé et que le régime végétarien est bénéfique. (Sourires) Ce que nous mangeons est avant tout culturel.
Face à ce péril écologique qu'est la croissance à venir de la production et de la consommation de viande, il est nécessaire de modifier nos comportements et d'accompagner la mutation des installations agricoles. Quand on voit que le Programme national nutrition santé recommande de consommer entre 80 et 200 grammes de viande par jour, on peut douter de notre capacité à évoluer et affronter ce problème environnemental !