Mesdames, messieurs les députés, les partenariats régionaux sont importants compte tenu de l'attachement de Bpifrance à la territorialisation de son action.
Quand on parle de partenariats régionaux, on évoque deux éléments, à la fois complémentaires et différents. D'une part, nous sommes en lien étroit avec les régions parce qu'elles sont membres de notre gouvernance. D'autre part, nous avons mis en place avec elles des dispositifs qui nous permettent d'accompagner au mieux les entreprises de leur territoire. C'est une forme de partenariat qui est moins « gouvernementielle », moins stratégique et beaucoup plus concrète.
Les régions sont partie prenante de la gouvernance de Bpifrance à plusieurs niveaux et d'abord au niveau national puisqu'elles sont membres du conseil d'administration et qu'elles président le Comité national d'orientation (CNO).
Il existe vingt-sept comités régionaux d'orientation – ils sont présents également outre-mer. Ils sont présidés par le président du conseil régional et mobilisent vingt-six membres, représentants de la société civile, élus, mais aussi représentants du monde économique via les CESER, les chambres consulaires, les partenaires sociaux, les représentants qualifiés.
On constate que le mode de fonctionnement des CRO varie selon les régions. Nous y sommes systématiquement associés, puisque les directeurs régionaux de Bpifrance en assurent le secrétariat. Mais la fréquence de réunion de ces comités, le contenu de leur ordre du jour, le périmètre des sujets évoqués varient selon les souhaits exprimés par le président de la région.
Depuis la mise en place de Bpifrance, quatre-vingt-trois comités se sont réunis, certains avant les décrets créant ces CRO. L'année dernière, quarante-cinq comités se sont réunis. Il existe quelques régions où les CRO ne se sont pas réunis, parfois pour des raisons très conjoncturelles. Je pense, par exemple, à la région Languedoc-Roussillon. Dans certaines régions, les CRO se sont réunis régulièrement. C'est le cas de la région Champagne-Ardenne qui réunit son comité une fois par trimestre, alors que la loi prévoit deux réunions par an.
Il s'agit bien de comités d'orientation et non d'engagement : ils ne prennent pas de décision sur les dossiers, ils n'ont pas vocation à examiner les dossiers individuels. Ils travaillent sur des aspects plus stratégiques et opérationnels de mise en oeuvre de l'action de Bpifrance sur le territoire. Ils ont vocation à donner un avis sur la façon dont Bpifrance agit, notamment en lien avec la stratégie régionale de développement économique.
Dans certaines régions, il a été fait le choix de ne pas concentrer exclusivement le contenu et les missions de ce comité à la seule action de Bpifrance mais d'en élargir le champ à d'autres sujets, notamment à la stratégie régionale de développement économique, aux priorités du territoire, à la présentation des stratégies en matière d'innovation, ce que l'on appelle les 3S. Par exemple, la région Limousin a fait le choix, dans le périmètre de son comité, de réunir à la fois les membres du CRO et ceux du comité de pilotage qui préexistait de sa stratégie régionale de développement économique afin d'assurer le lien entre Bpifrance et l'écosystème local. Il est important, me semble-t-il, que les CRO ne se focalisent pas uniquement sur l'action de Bpifrance mais qu'ils mettent cette action en perspective avec les réalités territoriales.
Nous faisons systématiquement le point sur l'action de Bpifrance durant les mois précédents et sur les problématiques économiques du territoire. La Banque de France est très souvent représentée et elle apporte une vision de la situation économique et des entreprises.
Des sujets plus particuliers sont mis à l'ordre du jour du CRO en fonction du souhait de son président. Plusieurs comités ont évoqué par exemple l'économie sociale et solidaire, le financement des TPE, parfois des sujets plus sectoriels comme l'économie résidentielle. Certains territoires ont travaillé ces derniers mois sur des stratégies spécifiques. Je pense à la Lorraine avec le Pacte Lorraine, ou à la Bretagne avec le Pacte d'avenir. De même, les conventions de partenariat, qui portent plus sur le deuxième aspect de notre action avec les régions, que l'on a signées ou validées avec dix-sept régions en France, ont souvent été examinées par le comité avant d'être adoptées. Ces conventions mettent en valeur la stratégie régionale, les priorités du territoire et les actions qui peuvent être mises en place avec Bpifrance.
Le CRO, dont le fonctionnement varie selon les régions et l'implication, permet donc l'instauration d'un débat.
Les régions sont partie prenante de notre gouvernance. À l'inverse, ou en complémentarité, nous sommes très souvent associés à un certain nombre de structures régionales. Par exemple, la BPI est souvent membre des agences régionales et acteurs de ces agences. Nous avons été sollicités récemment par la région Provence-Alpes-Côte d'Azur qui a fusionné deux de ses outils pour créer une agence pour l'innovation et l'internationalisation des entreprises. Nous sommes membre fondateur de cette agence. De la même manière, la région Île-de-France, qui a fusionné un certain nombre de ses outils pour créer Paris Region Entreprises (PRE), nous a demandé d'en être membre fondateur. Nous participons à leur gouvernance avec la vision de Bpifrance pour ce qui concerne les conditions d'accompagnement des entreprises. Nous sommes systématiquement partie prenante des plates-formes d'orientation physiques qui ont souvent été mises en place par les régions et qui étaient préalablement portées par la Caisse des dépôts. Ce sont des outils de coordination de l'ensemble des acteurs locaux qui sont plus ou moins dynamiques, très dynamiques en Franche-Comté par exemple où l'ensemble des acteurs de l'écosystème d'accompagnement des entreprises sont mobilisés sous l'impulsion de la région pour mieux accompagner les besoins des entreprises.
Nous sommes extrêmement attachés à un autre aspect de l'action de la BPI qui consiste à répondre, concrètement et au quotidien, aux besoins des entreprises. Nous avons mis en place, principalement avec la collectivité régionale, qui est le chef de file du développement économique, des outils qui couvrent l'ensemble de ces besoins.
Nous avons d'abord mis en place avec les régions les fonds régionaux de garantie (FRG) qui nous permettent de faciliter l'accès au financement des entreprises de leur territoire. Comme vous le disait la semaine dernière le directeur général de Bpifrance, ces fonds de garantie sont l'un des dispositifs les plus utiles et les plus faciles pour accéder aux besoins de financement des TPE. Il y a actuellement vingt-deux fonds de garantie en France. Ces fonds sont abondés par les régions qui fixent les priorités d'utilisation des financements. Ils nous permettent d'accompagner davantage d'entreprises et surtout d'augmenter la quotité de risques pris. Avec des fonds nationaux, nous intervenons en général au maximum à 50 %. Grâce à l'intervention de la région, la part du risque garanti est de 70 %, ce qui permet d'accompagner des projets plus risqués que des banques n'accepteraient pas, même avec 50 % de garantie. Ces fonds nous permettent de couvrir environ 250 millions d'euros de risques par an pour une dotation des régions de 30 à 40 millions d'euros. Il y a donc un effet de levier considérable. Ces 250 millions d'euros de risques permettent de couvrir un peu moins de 800 millions de prêts. Avec les fonds de garantie, nous avons donc une vraie capacité d'intervention et de facilitation de l'accès au crédit pour les entreprises, notamment pour les TPE.
Cet outil a aussi l'avantage de permettre une grande réactivité et une adaptation quasiment en temps réel aux besoins constatés des entreprises. Par exemple, lors de la crise de 2008-2009 les régions se sont demandé comment faire pour soutenir l'économie locale et résoudre l'accès au crédit. La plupart d'entre elles ont utilisé ces fonds de garantie mis en place à l'époque avec Oséo, ce qui a permis de soutenir les trésoreries et de faciliter la structuration financière des entreprises. Ces outils s'adaptent très bien aux stratégies régionales.
La région Rhône-Alpes a souhaité que l'on intervienne principalement en transmission avec les fonds de garantie. En Bretagne, un dispositif spécifique nous permet de garantir les entreprises de la pêche. Les outils s'adaptent donc en fonction des priorités régionales, même s'ils sont construits de façon systématique au niveau national.
Nous avons également développé avec les régions un dispositif de soutien à l'innovation via les fonds régionaux d'innovation (FRI) qui nous permettent d'intervenir en subvention, avance remboursable et prêt. Avec les régions PACA, Centre et Haute-Normandie, nous utilisons ces fonds régionaux d'innovation pour financer les projets de pôle de compétitivité soutenus dans le cadre du Fonds unique interministériel (FUI). Bpifrance apporte l'argent de l'État via le FIU et mobilise l'argent des régions via les fonds régionaux d'innovation quand elles nous le demandent.
En 2014, grâce à ces fonds nous avons soutenu environ 600 entreprises et accordé 40 millions d'euros d'aides. Le montant de la dotation de 2014 est plus important que le montant des aides accordées. Cela s'explique par le fait que ce ne sont pas des financements annuels. Parfois, les régions dotent le fonds de façon pluriannuelle. En réalité, le montant de nos interventions est supérieur au montant de la dotation mobilisée.
Le fonds régional d'innovation et le fonds régional de garantie permettent de mobiliser auprès des régions de l'argent de Bpifrance. C'est un avantage pour les entreprises car, même si on les accompagne avec des financements qui proviennent souvent de différentes sources – de l'État, de la région, parfois de l'Europe –, elles n'ont qu'à constituer un seul dossier. Les délais ne se cumulent pas et la décision est prise plus rapidement que si elle nécessitait un passage en commission permanente. Nous intervenons aux côtés des régions, ce qui veut dire que lorsque la région mobilise un euro, nous en garantissons deux. Et en réalité, grâce à un effet de levier, nous en garantissons cinq et même dix – cinq euros avec un euro de la région et cinq de notre côté.
Ces outils permettent donc de mobiliser l'argent public dans le domaine de l'innovation, là où l'argent est rare alors que les besoins sont très nombreux. Là encore, ce sont les priorités régionales qui sont prises en compte dans la mobilisation de ces financements.
Il existe aussi les prêts de développement territoriaux (PDT) d'une durée de sept ans, avec un différé d'amortissement en capital de deux ans. Quand la région mobilise un euro, nous prêtons cinq euros à l'entreprise et ces prêts s'adaptent, là encore, aux priorités de la région. Par exemple, nous avons un très grand partenariat sous forme de prêt de développement avec la région Bretagne et nous avons mis en place, lorsque le secteur agroalimentaire a connu des difficultés à la fin de l'année 2011 et en 2012, un prêt de développement territorial spécifiquement pour les ETI de l'agroalimentaire. La région nous a dotés de financements pour faciliter le rebond de ces entreprises.
De la même manière, avec la région Nord-Pas-de-Calais, la région Champagne-Ardenne, et la région Île-de-France sous une forme un peu différente, nous avons mis en place un prêt – qui s'appelle prêt rebond en Île-de-France mais dont le nom est différent selon les régions – qui permet d'accompagner des entreprises qui ne sont plus en difficulté – la réglementation européenne ne nous permet pas d'aider les entreprises dites en difficulté – mais dont la situation financière rend difficile l'accès au crédit bancaire classique alors qu'elles ont un vrai projet de développement et des besoins de financement matériels ou immatériels. Grâce aux financements de la région, nous sommes en mesure d'accompagner des entreprises qui ont de réels besoins de financement.
Enfin, même si nous ne sommes pas tout à fait dans la même relation de partenariat avec les régions, nous sommes aussi coactionnaires de quatre-vingt-quinze fonds régionaux ou interrégionaux d'investissement. Les régions ne sont pas toutes parties prenantes à ces fonds. Les régions sont souvent coactionnaires à nos côtés des fonds d'amorçage qui sont les plus récents et montés pour des investissements d'avenir. Ces fonds, qui contribuent à la structuration de l'écosystème local du financement, permettent d'investir dans des domaines plus petits, plus risqués. Là encore, nous sommes aux côtés des régions pour ce faire.
Les fonds mobilisés par les régions et auprès desquels Bpifrance se mobilise interviennent en fonction des priorités stratégiques régionales. C'est essentiel pour nous. Ce sont les régions qui les définissent. Il existe un principe de codécision, mais la région peut faire le choix de nous déléguer entièrement cette décision. C'est ce que font certaines en dessous d'un certain plafond, c'est-à-dire quand le niveau de garantie ou le prêt sont faibles. Quand on est seul à décider, on décide plus vite.
Quand il y a des garanties, la région sait qu'elle doit décider très rapidement parce que la banque a besoin d'une réponse quasiment dans la semaine. Tout se passe très bien : nos chargés d'affaires échangent avec les chargés d'affaires de la région. Dans certaines régions, un vice-président est désigné pour donner un avis politique sur le dossier, dossier qui ne peut pas passer en commission permanente en raison de délais très courts. Mais la possibilité de codécision existe toujours.
De son côté, l'entreprise bénéficiaire est systématiquement informée du fait que l'aide est accordée avec l'argent de la région. Il y a une conotification des aides, parfois même une cosignature du président du conseil régional quand il le souhaite. Dans les contrats de prêts ou d'aide, il est systématiquement mentionné que la région participe, de même que le FEDER est systématiquement mentionné s'il est mobilisé. Nous proposons à la région de mener avec nous, si elle le souhaite, des actions de communication pour faire connaître ces dispositifs et les valoriser.
De façon plus large que la simple valorisation de ces dispositifs, nous avons déployé avec un peu moins de quinze régions des plates-formes d'orientation dématérialisées qui permettent de mettre en valeur, sur des sites extrêmement simples, l'ensemble de l'offre de Bpifrance et des partenaires sur le territoire. Cette valorisation de l'action commune est extrêmement importante parce que notre priorité c'est d'abord que l'entreprise ait une réponse rapide et efficace à son besoin. Nous sommes donc bien dans une logique où un seul dossier est déposé par l'entreprise et où une seule expertise est faite par Bpifrance. La décision peut être prise éventuellement par deux interlocuteurs, mais cela ne nécessite pas que le bénéficiaire soit obligé d'aller frapper à toutes les portes pour chercher des financements.
J'ajoute que ces dispositifs cherchent à être les plus performants possible en termes d'effet de levier et d'optimisation des financements publics. D'une certaine manière, Bpifrance gère l'argent des régions, elle mobilise des financements aux côtés des régions mais surtout elle assume les risques d'épuisement de ces fonds, c'est-à-dire que si le fonds devenait un jour déficitaire, elle ne demanderait pas de l'argent supplémentaire aux régions. C'est donc bien plus qu'un simple opérateur qui gérerait l'argent des régions comme un service financier. À ce titre-là, Bpifrance est un partenaire à part entière et elle est très attachée à ce partenariat.