Monsieur le Défenseur des droits, je salue la densité de votre rapport et la précision de vos suggestions.
J'aborderai pour ma part un tout autre sujet. Dans une décision du 24 novembre 2014 faisant suite à la saisine émanant d'une jeune femme soumise le 14 juillet 2013, sur les Champs-Élysées, à un contrôle d'identité lors duquel elle avait été sommée de donner aux forces de l'ordre son fanion floqué au logo de la « Manif pour tous », vous déclariez que « l'interdiction de portée générale faite au public présent dans les périmètres contrôlés de détenir des “banderoles, affiches et tout autre support portant une revendication” [n'est pas] conforme au droit applicable sur le territoire de la République », et vous recommandiez au ministre de l'Intérieur de faire supprimer cette interdiction générale à l'occasion des cérémonies du 14 juillet.
Interrogé sur le déroulement de ces événements dans le cadre des travaux de la commission d'enquête sur les missions et modalités du maintien de l'ordre républicain dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur, le préfet de police de Paris, M. Bernard Boucault, nous a dit assumer avoir veillé au respect de cette interdiction générale à la date des faits évoqués. Justifiant les instructions alors données, il a notamment rappelé que c'est à la suite du projet déjoué d'assassinat du président Jacques Chirac, le 14 juillet 2002, que ces périmètres contrôlés ont été instaurés sur les trottoirs des Champs-Élysées lors des défilés militaires du 14-Juillet, dans le but de concourir à la sécurité du chef de l'État autant que d'éviter tout risque de trouble à l'ordre public. Il a également précisé qu'il aurait demandé à toutes les personnes qui lui auraient déclaré leur intention de manifester sur les Champs-Élysées le 14 juillet de modifier le lieu, le jour ou l'heure de la manifestation, en raison des cérémonies organisées à l'occasion de la fête nationale. Il a aussi replacé les mesures préventives adoptées dans le contexte tendu du moment : selon des renseignements concordants, des actions de contestation assez dures étaient alors envisagées, incluant l'usage de fumigènes et des tentatives individuelles de se projeter sur les Champs-Élysées au passage du président de la République. Tout cela justifiait selon lui que des consignes très fermes soient données pour que les manifestations non déclarées dont le projet avait été largement relayé sur les réseaux sociaux ne viennent pas troubler l'ordre public. Il réaffirmait pour conclure que personne ne peut manifester sur les Champs-Élysées le 14 juillet.
Dans ce contexte, et compte tenu de ces éléments, pensez-vous que la notion de maintien de l'ordre, toujours dans le respect des libertés publiques, permette de tolérer des manifestations sur les Champs-Élysées le 14 juillet, lors des célébrations de la fête nationale ?