Intervention de Victorin Lurel

Séance en hémicycle du 19 février 2015 à 9h35
Transformation de l'université des antilles et de la guyane en université des antilles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVictorin Lurel :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, j’aimerais pouvoir ignorer mon discours écrit pendant quelques minutes et parler de fraternité – j’allais même dire d’amour – entre la Guadeloupe et la Martinique, mais ce que je viens d’entendre à deux ou trois reprises n’est pas de nature à apaiser le débat. J’aimerais que nous ayons un discours d’apaisement. J’aimerais affirmer, à l’orée de ce propos, que nous sommes tous pour une université des Antilles. Nous nous sommes battus pour qu’elle soit une université rayonnante : j’en sais quelque chose, je ne parle pas hors sol, je suis également président de région et j’ai été brièvement enseignant à l’université. Au cours des dix dernières années, la région Guadeloupe a mis 100 millions – je dis bien : 100 millions – dans l’université. Un campus a été inauguré par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Nous avons mis 35 millions sur ce que nous avons appelé une « université des métiers ». Nous avons financé treize laboratoires. Treize laboratoires ! Chaque année, alors que la Martinique apporte 300 000 euros, nous en apportons 3 millions. Nous croyons au savoir, à l’investissement dans l’intelligence et le savoir. Aujourd’hui, pourquoi vouloir « pénaliser », si j’ose dire, le dynamisme du pôle de Guadeloupe et des campus de Guadeloupe ?

Je passerai sur les péripéties guyanaises : chacun est libre d’avoir son opinion, mais nous avons signé un accord politique. Pourquoi ? Parce que ce n’est pas le Parlement qui a légiféré mais le Gouvernement qui a décidé par habilitation. Il a bien fallu pacifier les rapports sur les campus. Je rappelle qu’il y a eu une grève de trente-neuf jours sur le campus de Guadeloupe, parce qu’à deux reprises, par deux votes successifs, une demande a été émise tendant à la création d’une université de Guadeloupe. La Martinique était partie à peu près sur la même orientation. Les élus ont eu le courage de s’opposer – je dis bien : de s’opposer – aux demandes de leur communauté universitaire, de leurs syndicats et d’une part importante des étudiants.

On a donc gravé dans le marbre, en juillet 2014, un accord concernant tous les points en discussion, à partir de l’idée que ce n’est pas la nature de l’élection à la tête de l’université qui est à l’origine des difficultés de cette dernière, mais, précisément, l’absence de dialogue et, pire encore, le mépris affiché à l’égard de la Guyane. Depuis plus de trente ans, depuis 1982, il prévaut, sur le campus de Guadeloupe, le même sentiment que, depuis toujours – contrairement aux propos tenus par notre collègue Nilor – existe une inégalité de traitement.

Je réponds tout de suite que le texte a été préparé dans un souci d’équilibre – et je tiens d’ailleurs à rendre hommage à la qualité du travail accompli par Mme la secrétaire d’État –, en tenant compte d’un certain contexte. Une bonne législation, une bonne légistique consiste précisément à ne pas ignorer le contexte et la situation. On ne l’a pas ignoré.

Je respecte le droit d’amendement des parlementaires, mais le Sénat a ajouté des dispositions en ignorant le contexte et l’équilibre politique sur lequel est fondé cet accord. Il ne faudrait pas le remettre en cause. Or, dans sa rédaction actuelle, le texte remet en cause l’esprit de l’autonomie. Certains de nos collègues voudraient enfermer, ex ante, l’élection dans un trio, dans un triangle. Quelque part, c’est avoir peur de la liberté. La vérité, c’est que c’est cette proposition qui crée une spécificité qui n’existe nulle part dans l’Hexagone. Il y a là comme un soupçon qui n’ose pas s’avouer : « Si on laisse faire là-bas ce qui se fait depuis toujours – et ce qui continuera de se faire en métropole, même après la loi Fioraso –, si la liberté s’exprime et s’épanouit, ils feront mal les choses, ils démantèleront l’université ».

On a affirmé, on a réaffirmé, on a martelé que l’on veut une université des Antilles. Je me suis opposé à ce que j’ai appelé des demandes « ayatollesques », sans vouloir aucunement dire du mal d’une religion. On s’est opposé à cela. Vouloir enfermer le dialogue ex ante, entre trois personnes, alors que ce dialogue doit être entretenu tout au long du mandat, c’est une erreur politique gravissime. Si la Guyane est partie, demain, la Guadeloupe, ou même la Martinique, pourrait partir.

Permettez-moi de vous dire quelques mots au sujet de ce que j’entends depuis quelque temps au sujet de l’introduction des surfaces dans les critères à retenir. Elle figure dans un accord politique, signé par quatre exécutifs, entériné par les syndicats et les communautés universitaires – comprenant aussi bien les techniques, les administratifs que le corps enseignant. J’ai sous les yeux les textes de l’université elle-même. Mon cher collègue Nilor, quand on demande de l’argent à l’État, c’est sur la base de 91 000 mètres carrés, mais quand on répartit les dotations, c’est sur la base de 81 000 mètres carrés : autrement dit, 10 000 mètres carrés disparaissent.

Pardonnez-moi de corriger ce que je qualifierai, pour rester correct, d’imprécision.

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