Intervention de Pascale Crozon

Réunion du 20 novembre 2012 à 16h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascale Crozon :

J'ai donc pris part à la Conférence internationale sur la participation de la femme à la vie publique, politique et à la prise de décision. La conférence de Tunis portait sur différents thèmes : les expériences arabes après les révolutions et les leçons qu'il convient d'en tirer, le rôle de la société civile et des partis politiques avec une approche comparative, et enfin les mécanismes constitutionnels et parlementaires relatifs à la participation des femmes en politique. J'ai animé cette dernière table ronde à laquelle participaient également Mme Didiza, ancienne membre du parlement et du gouvernement Sud-africain, Mme Freidenvall, chercheur spécialisée dans la participation politique des femmes à l'université de Stockholm, Mme Davis, directrice du genre au PNUD -New York, et Mme Vanderleest, conseillère en genre au bureau des institutions démocratiques et des droits de l'Homme.

Le format d'une table ronde correspondait bien au climat de discussions sur la Constitution qui règne en Tunisie, le vote devant avoir lieu au printemps.

Cette table ronde m'a permis d'avoir un échange avec une centaine de femmes : elles sont dynamiques et veulent aller de l'avant et en même temps, elles ont peur.

La table ronde que je présidais portait sur les mécanismes constitutionnels et parlementaires relatifs à la participation des femmes en politique. J'ai conclu sur les mécanismes constitutionnels français, en rappelant que le Préambule de la Constitution proclame que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme. » J'ai insisté sur la nécessaire vigilance quant aux termes employés dans la Constitution. Le terme « favoriser » un égal accès permet par exemple d'adopter des lois contraignantes.

Mme Sihem Badi, la ministre tunisienne des Droits des femmes, veut inscrire les droits des femmes dans la Constitution tunisienne. Son slogan, que j'apprécie, est : « La démocratie en Tunisie : jamais sans les femmes ». La ministre est franco-tunisienne, pourchassée par Ben Ali, elle a fait des études de médecine en France et s'est établie comme généraliste dans la banlieue parisienne. Lors de la révolution, elle est retournée en Tunisie pour servir son pays et a été nommée ministre des Droits des femmes et de la famille. Elle appartient à un parti laïc.

La ministre a demandé expressément un soutien de la France à travers la Délégation. Elle voudrait également que notre ministre des Droits des femmes d'origine marocaine, Mme Najat Vallaud-Belkacem, se rende en Tunisie. Des représentantes du Maroc et de l'Iran ont fait la même demande.

Sur le plan politique, le parti Ennahda, est comme vous le savez, arrivé en tête avec 30 % des voix aux élections organisées en 2011. Il a constitué le Gouvernement par alliance avec deux autres partis qui sont plutôt laïcs.

La future constitution doit être prête au printemps ; or le parti Ennahda demande qu'y figurent les valeurs islamiques et la référence à la Charia. Au contraire les deux autres partis sont partisans de l'inscription des droits de l'Homme, ce qui a entraîné une scission. De l'issue de cette confrontation dépendra certainement un grande partie l'avenir de la Tunisie.

J'ai pu constater combien le clivage était important entre les femmes représentant le monde rural, très dépendantes de la communauté villageoise, et les urbaines, qui ont fait des études et sont très mobilisées pour le changement politique et social.

La conférence a fait l'objet d'une bonne couverture de presse, abordant le thème de la parité. Le parti Ennahda a respecté l'objectif de parité dans ses nominations, mais un certain nombre de femmes promues seraient, selon de nombreux observateurs, manipulées par le parti.

Ce déplacement a également été pour moi l'occasion de rencontrer des membres de la Fondation Essalem, à Tunis, créée en 1982 et dont l'un des objectifs est la formation des femmes des régions rurales à différentes techniques artisanales afin d'adapter leur production traditionnelle aux marchés extérieurs. J'ai rencontré ces responsables par l'intermédiaire d'une association installée dans le Rhône, que je soutiens, et qui mène des actions en direction des régions les plus pauvres de la Tunisie.

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