Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, oui, les conditions d'accès au crédit pour nos PME, nos PMI et nos ETI s'étaient énormément durcies. Oui, il convenait de répondre à ce vrai problème.
La Banque publique d'investissement, BPI pour les personnes averties, nous a été présentée comme l'alpha et l'oméga du financement des entreprises de croissance. M. le ministre l'a décrite en commission des finances comme l'instrument au service de la croissance, la garantie du crédit d'impôt recherche, l'outil de préfinancement du crédit d'impôt compétitivité, bref une banque nationale publique qui illustre la stratégie industrielle du Gouvernement. Depuis ce matin, c'est même devenu un porte-avions !
Pour vous, monsieur le ministre, ce n'est pas un machin, une usine à gaz. Je considère pour ma part qu'il s'agit d'un fourre-tout regroupant les activités d'OSÉO SA – détenue à 64 % par l'État, à 26 % par la Caisse des dépôts et consignations et à 10 % par les banques –, du FSI – détenu à 51 % par l'État et à 49 % par la Caisse des dépôts et consignations –, de la branche entreprises de la CDC et, à terme, des fonds d'aide à l'exportation d'Ubifrance et de la COFACE.
Si nous pouvons nous retrouver s'agissant de l'objectif de cohérence et de lisibilité des dispositifs existants, le texte n'apporte aucune garantie quant à la rationalisation de l'existant. Bercy estime sa force de frappe à 42 milliards : 20 milliards de prêts, 12 milliards en garanties et 10 milliards d'investissements en fonds propres sur le quinquennat. Or l'épargne réglementée, même en augmentation, ne permet pas d'atteindre ces montants, de sorte que la BPI devra sous doute se tourner vers les marchés financiers. C'est déjà un problème que d'imaginer l'outil d'aide aux entreprises sans financement précis.
Cette entité détenue à 50-50 par l'État et la Caisse des dépôts et consignations, présidée par le directeur de la CDC, sera donc en définitive une holding publique d'investissement au statut de compagnie financière. Le mode de gouvernance, alliant le national et le régional, part d'une bonne intention. Mais là encore, comme l'a souligné le président de la commission des finances Gilles Carrez, dans sa sagesse et son expertise reconnues, il convient que les représentants de régions siégeant dans les commissions d'engagement ne soient pas des élus. C'est une nécessité absolue, à laquelle vous avez répondu favorablement.
Toujours dans le cadre de la gouvernance, on peut penser que la Caisse des dépôts et consignations aura des difficultés à contrôler réellement une filiale dont les fonds propres sont aussi importants que les siens, d'autant plus que celle-ci pourra aussi recourir à ses fonds d'épargne. Ainsi, se pose inévitablement le problème de la maîtrise des risques.
Rationalisation non garantie, financement certainement insuffisant, gouvernance peu assise : la BPI n'est pas ferme sur ses bases. Elle est également partiale en termes de priorités d'intervention. En effet, l'article 1er, modifié en commission des finances, préconise en son alinéa 7 un fléchage du soutien de la BPI aux zones urbaines défavorisées. Une fois encore, les zones rurales sont délaissées et abandonnées. Les entreprises qui font vivre nos territoires ruraux doivent-elles être moins considérées ? À l'heure du « produire en France » et de la nécessaire relance de la compétitivité, vous abandonnez les inestimables savoir-faire locaux des acteurs de notre aménagement du territoire. Ce n'est pas ce que j'appelle un progrès.
Enfin, j'ai une question à vous poser, monsieur le ministre. Mercredi 21 novembre, lors de l'examen de ce texte en commission des finances, la presse se faisait l'écho d'une déclaration de Nicolas Dufourcq, chargé de la mission de préfiguration et futur directeur général de la BPI, annonçant qu'il proposerait une organisation différente de celle aujourd'hui étudiée dans ce projet de loi. Nous avons pu mesurer votre embarras à cette nouvelle. Qu'en est-il aujourd'hui ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)