Intervention de Julien Aubert

Séance en hémicycle du 29 novembre 2012 à 9h30
Création de la banque publique d'investissement nomination des dirigeants de bpi-groupe — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert :

…et réunit un consensus droite-gauche. On le sait, le pilotage actuel pose problème, avec une multitude de structures, lesquelles étaient, de plus, depuis quelques mois dans une position attentiste, ne sachant pas trop à quelle sauce elles allaient être mangées. Nous avons donc ici le premier étage de la construction, sachant que ce n'est qu'une première étape, car il ne suffit pas d'organiser la colocation pour développer un affectio societatis.

La première remarque qu'appelle ce projet, c'est que l'organisation prévue est curieuse. Elle est en tout cas originale ou singulière – sans porter de jugement de valeur sur le dispositif. On dit que c'est une banque, alors que ce n'en est pas vraiment une : elle fait du prêt, mais elle abrite aussi, sous la dénomination plus large de groupe, des activités de fonds propres, le Fonds stratégique d'investissement, particulièrement centré sur de grosses entreprises, OSÉO et CDC Entreprises. On projette même, selon le rapport, d'y intégrer la COFACE, donc l'assurance export, ou encore Ubifrance, qui fait de la promotion d'entreprises à l'étranger. Il s'agit donc bien avec ce texte d'une première étape puisque le projet global pourrait être à terme plus étendu.

Ce problème de périmètre a d'ailleurs fait l'objet d'interrogations en commission en raison de cette ambiguïté. Il est vrai que celle-ci a été levée par l'intervention du ministre ce matin.

Au-delà de l'organisation, il faut, en l'absence de moyens supplémentaires, que cette BPI soit une plus-value. Comment faire pour que cela soit possible ?

Il est tout de même singulier, tout d'abord, qu'il s'agisse d'une banque avec des élus. Aussi convient-il – c'est le message que nous souhaitons porter – élever un mur de Chine pour ne pas transformer l'activité bancaire en activité politique. D'autant que, s'il y a des élus régionaux, on n'y trouve aucun élu national ; or, si les régions jouent un rôle important en matière économique, c'est aussi le cas de l'État.

Ce caractère politique apparaît à l'article 1er, sur lequel j'ai quelques regrets. Cet article, comme l'a souligné Mme Dalloz, ne comporte aucune disposition concernant les zones rurales. Or, pour que l'action de cette banque soit efficace, il faut qu'elle colle aux territoires, qu'elle ait dans ses gênes la notion d'aménagement du territoire.

Cela pose d'ailleurs la question de son articulation non seulement avec un autre acteur du financement, la Banque postale – qui est certes un acteur privé, mais qui dépend de La Poste et qui remplit également une mission financière –, mais aussi avec les réseaux parapublics d'aide à la création d'entreprise, tels que CDC Entreprises ou les structures dépendant des intercommunalités. Il faut que la BPI coordonne ces acteurs.

Je souhaite par ailleurs que la BPI puisse faire du micro-crédit et même, pourquoi pas, du don, voire qu'au-delà de la création d'entreprise, elle apporte son soutien à la deuxième année d'activité, lorsque les entreprises essaient de grossir, et qui représente un cap essentiel.

Il faudra donc penser aux réseaux, prendre en compte le fait que le FSI a un ADN plutôt jacobin tandis qu'OSÉO est généralement dans les villes, et ne pas oublier les campagnes.

Je regrette par ailleurs que s'il est beaucoup question d'écologie, les personnalités qualifiées aient simplement des connaissances en matière de développement écologique. Alors qu'avec ce texte c'est un débat sur le progrès, sur les gisements de productivité et de croissance encore inexploités qui est posé, j'aurais souhaité que les personnalités qualifiées s'y connaissent dans ces secteurs d'avenir que sont par exemple le numérique ou les biotechnologies. Je regrette, au passage, l'absence de représentants du secteur privé : pourquoi ne pas faire appel à des créateurs de PME, à des chefs d'entreprise, qui permettraient d'insuffler dans le conseil d'administration de la BPI une logique de partenariat ?

Je regrette également qu'un avis de l'Assemblée nationale ne soit pas prévu sur la nomination des membres du conseil d'administration. Après tout, la CDC a un lien extrêmement fort avec notre assemblée. Il aurait été intéressant que nous puissions nous prononcer.

Pour l'avenir, au-delà du rapprochement avec la Banque postale que j'ai déjà évoqué, la vraie question, monsieur le ministre, est celle du développement des entreprises à l'international. Vous pensez à Ubifrance, à la COFACE. Je crois qu'il faudra se poser aussi la question des rapports avec PROPARCO, filiale de l'Agence française de développement, et peut-être envisager la création d'équipes à l'international, dans laquelle la BPI pourrait jouer un rôle moteur. Cela a déjà été fait : je vous renvoie, par exemple, à la création du fonds d'amorçage, de réalisation et d'orientation, le FARO, coordination originale de l'AFD, d'OSÉO, du ministère des finances, de la Caisse des dépôts et consignations, pour un travail à l'international en faveur du développement des entreprises.

Autant un mur de Chine est nécessaire par rapport aux élus, autant je pense qu'il faut briser le mur entre le développement des entreprises à l'international et leur développement sur notre territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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