Intervention de Alain Claeys

Réunion du 17 février 2015 à 21h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Claeys, corapporteur :

Ces amendements sont plus que des amendements : il s'agit d'un choix extrêmement important. Je salue l'intervention de Philip Cordery, dont je connais les convictions ; je sais que, député des Français établis en Belgique, aux Pays-Bas et au Luxembourg, il a pu examiner la situation qui prévaut dans ces pays. Cette question divise la société et, je dois le dire, ma famille politique.

Je souhaiterais corriger deux petites erreurs commises par Jean-Louis Touraine. Tout d'abord, on ne peut pas parler pour le Président de la République. Outre le texte qu'il a écrit sur le sujet pendant la campagne pour l'élection présidentielle, il a demandé au Premier ministre de confier une mission aux auteurs de cette proposition de loi. Or, ni l'euthanasie ni le suicide assisté ne figurent dans la lettre de mission que nous avons reçue. Bien entendu, on peut ne pas être d'accord : après tout, c'est au législateur de légiférer. Ensuite, on ne peut pas dire que la décision revient au médecin dans le cadre d'une sédation profonde et continue et au patient dans le cadre d'une euthanasie. L'amendement vise à étendre le choix du patient, je le reconnais, mais l'article 3 de la proposition de loi crée bien un droit nouveau pour celui-ci. Il faut que les choses soient claires sur ce point.

Véronique Massonneau a évoqué les inégalités ; c'est en effet une question centrale. S'il n'existait pas actuellement une inégalité devant la mort, nos concitoyens ne se prononceraient pas à 90 % pour la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté. C'est parce que la société n'est pas capable de leur offrir, à eux et à leurs proches, une fin de vie apaisée et digne qu'ils choisissent la solution la plus radicale. Je pense qu'il existe, dans la société, une fracture importante sur ce sujet. Devons-nous, en tant que parlementaires, assumer cette fracture ? Je ne le crois pas ; cela créerait des tensions extrêmement fortes. Il est vrai que cette proposition de loi ne réglera pas tous les problèmes – je pense en particulier aux maladies neurodégénératives –, mais elle apportera une solution dans plusieurs dizaines de cas. Et si un effort est fait en matière de formation et de soins palliatifs, les inégalités pourront être réduites.

Je crois que la véritable demande des malades est de pouvoir terminer leur vie de façon apaisée et digne, en étant accompagnés par leur famille. La femme de Vincent Humbert, que j'ai reçue longuement, m'a expliqué qu'elle souhaitait que cela puisse s'arrêter pour son mari, mais de façon apaisée. Par ailleurs, il est vrai également que la sédation profonde et continue soulève des problèmes importants, notamment celui de la « clause de conscience ».

Même si nous devions être battus sur ce point, soyez convaincus que je n'ai pas passé un accord politique avec Jean Leonetti. Nous nous sommes opposés, par le passé, lors de l'examen des lois bioéthique, et nous ne savions pas si, sur le sujet qui nous occupe ce soir, une convergence serait possible ; elle l'a été. Nous avons en effet tenté de trouver une voie, en tenant compte de la situation qu'on nous a décrite ainsi que du souhait de l'exécutif et, peut-être, des forces politiques républicaines d'aboutir à un texte qui rassemble.

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