Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais m'efforcer de faire tenir, dans les cinq minutes qui me sont imparties, tout ce que j'ai à dire sur ce sujet passionnant qu'est la création de la Banque publique d'investissement.
Je veux d'abord souligner que nous avons un vrai problème culturel avec notre modèle industriel, modèle centralisé composé de grands groupes et de TPE low cost, et pratiquement dépourvu d'entreprises de taille intermédiaire. Et nous nous étonnons qu'avec un tel système nous ne parvenions pas à réindustrialiser la France ! De ce point de vue, la Banque publique d'investissement, projet dans lequel je me suis fortement impliqué, me paraît constituer l'une des réponses possibles, pour plusieurs raisons.
Premièrement, nous allons enfin donner la priorité aux PME et à leur croissance ; à l'industrie, comme le disait Guillaume Bachelay ce matin ; aux actions d'export ; à la structuration de la sous-traitance, élément essentiel que nous avons un peu négligé jusqu'à présent, alors que 80 % de nos PME sont des entreprises sous-traitantes, trop petites, trop émiettées – de ce point de vue, nous reproduisons sur le plan industriel notre modèle administratif, ce qui constitue l'une des causes de notre retard – ; à l'acceptation du risque ; à l'accompagnement des investissements des entreprises.
Deuxièmement, la BPI n'est pas un outil financier banal. Elle n'est pas simplement constituée du rapprochement d'OSEO et du FSI. Elle représente, en termes d'ouverture et de prise en compte des risques, autre chose, comme l'ancien président de l'ANVAR a pu le dire, que le souhait d'une rentabilité maximale – nous commençons à en avoir des exemples.
Pour ce qui est des conditions de réussite, je ne sais pas si le modèle californien est un bon exemple, mais, sur le plan des fonds propres et de l'accès à la dette, il est évident que le système mis en place suppose la hauteur et la rapidité de décision – soit l'inverse de ce que nous avons eu jusqu'à présent.
Je ne vois pas, monsieur le ministre, en quoi la répartition des entreprises industrielles entre les zones rurales et les zones urbaines peut constituer un problème : 60 % de notre tissu industriel est d'ailleurs situé en zone rurale. La vraie question est plutôt celle du décalage entre responsabilité publique et compétences techniques. Or, de ce point de vue, les régions se trouvent parfois placées dans une situation humiliante. Je rappelle que les régions accompagnent les entreprises à hauteur de 2 milliards d'euros, développent la sécurisation des parcours professionnels, apportent dans le domaine de la recherche une aide équivalente à celle de l'ANR – elles n'ont de compétence en matière d'innovation que depuis 2004 et, à l'heure actuelle, leur action passe surtout par l'innovation, par la création de secteurs, par l'accompagnement de clusters.
Les régions ont mis en place plus de 800 dispositifs de garantie, avec OSEO et la CDC ; aucun ne se trouve en difficulté. Il y a donc là un procès en incompétence – je parle de ce que j'ai entendu ce matin – qui est intolérable. En effet, là où il y a des régions fortes, il y a des entreprises de taille intermédiaire. Ne nous étonnons donc pas que la France n'ait pas d'ETI : les capacités d'intervention de nos régions, en termes d'innovation, sont quatre à six fois plus faibles que celles des Länder allemands.
Il ne s'agit pas pour les régions – en tout cas ce n'est pas ainsi que je conçois leur rôle – d'intervenir dossier par dossier, même si elles sont parfois amenées à le faire dans leurs commissions permanentes. Quoi qu'il en soit, il faudra faire un effort important pour les associer, de manière à ce que l'intégration soit plus forte. La réussite de la BPI passera par la réussite des régions – et inversement.
Le Président de la République a proposé un pacte de confiance que nous devons acter. Je remercie d'ailleurs les rapporteurs du travail qu'ils ont fait, de l'ouverture qu'ils ont apportée à ce texte, même si je considère que l'Assemblée n'a pas à entrer dans le détail de la composition d'un certain nombre de comités régionaux ; il faut laisser place à la diversité des territoires, auxquels revient la décision de faire entrer les entrepreneurs et les acteurs sociaux – entre autres – dans les comités d'orientation.
La force de la BPI, comme l'a dit M. le ministre – ce dont je le remercie –, résidera dans le fait que, dans 90 % des dossiers, la décision sera prise rapidement et sur les territoires.
Nous avons un défi à relever. Certains d'entre nous auraient préféré un système mutualiste. Cela dit, au-delà des critiques qui ont été formulées, je n'ai pas relevé la moindre solution de rechange. Ce n'est jamais par les caisses ou les banques régionales que les établissements bancaires faillissent ; c'est toujours par la tête. Le modèle mutualiste du Crédit agricole connaît le succès, de la même manière, les sociétés de développement régional – je le rappelle car l'exemple a été cité ce matin par l'un de nos collègues de l'UMP – n'étaient pas pilotées par les régions.
Il s'agit donc ici d'un pacte de confiance à l'égard des territoires et des entreprises, à l'égard de leurs forces et en faveur de la compétitivité de la France, auquel je souscrirai avec beaucoup d'enthousiasme.