Intervention de Pierre Moscovici

Séance en hémicycle du 29 novembre 2012 à 15h00
Création de la banque publique d'investissement nomination des dirigeants de bpi-groupe — Discussion générale commune

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

Mme Dalloz a utilisé l'expression « fourre-tout ». C'est typique : lorsqu'un gouvernement de gauche fait une réforme de simplification, la droite parle d'usine à gaz. Dont acte. Mme Dalloz devrait toutefois être satisfaite : pendant des années, l'ex-majorité a réclamé un second porte-avions. Avec la BPI, elle l'obtient ! Mais c'est le porte-avions de la compétitivité. (Sourires.)

Olivier Faure a évoqué la situation précise d'une entreprise qui fait face à des difficultés de trésorerie. Ce sera la fonction de la BPI que d'y répondre. J'ai présenté il y a deux semaines un plan de réduction des délais de paiements, qui permettra de régler ces problèmes de trésorerie. Il a aussi expliqué que l'économie française avait besoin de carburant. Voilà encore une image : la BPI est un peu le carburant de la compétitivité.

Je le remercie aussi d'avoir insisté sur le fait que nous étions parvenus à trouver un équilibre entre la stratégie nationale et l'ancrage local. Nous y reviendrons tout à l'heure.

De manière plus générale, Olivier Faure a évoqué la politique économique du Gouvernement. Cela me fait toujours penser à ce vers de René Char : « Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s'habitueront. » Oui, nous avons fait de bons choix pour le pays, mais cela demandera un peu de temps pour en voir les fruits.

Pour répondre à M. Aubert, je dirai qu'en effet la BPI n'est pas une banque comme les autres. À ce titre, elle abrite toutes les activités citées. Là encore, nous n'érigerons pas des murs, mais des murailles de Chine entre ces activités. Julien Aubert, comme Philip Cordery, a souligné avec justesse l'importance de l'international. Nous avons besoin en France d'un prêteur direct. Nous y travaillons. Peut-être la BPI jouera-t-elle ce rôle demain.

M. Germain n'a pas seulement parlé de son amour pour le général de Gaulle (Sourires) : il a insisté sur un point important du diagnostic. Le développement des entreprises de taille intermédiaire est un enjeu pour le tissu productif français. En comparaison à l'Allemagne, ce sont les ETI, comme l'a rappelé aussi M. Rousset, qui manquent à la France.

J'ai déjà évoqué l'intervention de Mme Le Dain. Je le redis, je ne veux pas faire de « machin parisien ». Cela n'a aucun sens. J'ai eu l'occasion de me rendre avec Jean-Pierre Jouyet et le président de la région Languedoc-Roussillon dans une PME qui a bénéficié du fonds JEREMIE. Voilà une expérience de terrain dont nous voulons nous inspirer.

M. Censi a parlé du besoin de faciliter l'accès des PME et des ETI aux marchés de capitaux. C'est le sens de notre projet de « Bourse de l'entreprise », repris d'ailleurs dans le pacte de compétitivité, et qui devra, lui aussi, avoir un fort ancrage régional. Par ailleurs, les garanties qu'il a demandées existent dans le projet de loi, puisqu'il est prévu que la BPI intervienne en « investisseur avisé ». Les mots ont un sens.

Monsieur Mandon, vous avez insisté sur l'innovation. Je sais que, plus qu'une passion, c'est pour vous un engagement. Il est vrai que des instruments spécifiques sont nécessaires. Financer l'innovation n'est pas une activité bancaire comme les autres. Les sommes consacrées chaque année à l'innovation s'élèveront exactement à 600 millions d'euros. Nous devons développer une nouvelle approche du financement de l'innovation. Ce sera l'une des premières missions de Nicolas Dufourcq, préfigurateur et peut-être demain directeur général. Il pourra compter sur des outils très performants, comme les fonds Ecotech pour les écotechnologies, ou InnoBio pour les technologies du vivant.

Les moyens investis augmenteront considérablement. Je le répète, nous voulons faire plus pour l'innovation. Dans ce domaine comme dans d'autres, nous devons réaliser un saut qualitatif. Créer une direction de la prospective à la BPI est une idée que je veux bien sûr creuser. Nous pouvons tout à fait aller dans ce sens pour ce qui est de l'organisation de la structure, et le préfigurateur est attentif à nos débats. Je le redis : nous examinons un projet de loi, mais ce n'est pas la fin de l'histoire. Après le vote de la loi, il faudra structurer, mettre en place, mettre en oeuvre.

M. Mancel a été le seul orateur vraiment négatif. J'en suis surpris sans l'être tout à fait, connaissant l'état d'esprit qui l'anime. Je m'étonne qu'il envoie des signaux contraires à ce que disent la plupart d'entre nous, à savoir que la BPI est une bonne idée, même si certains pensent qu'on peut aller plus loin. C'est dommage, parce que voilà un projet qui devrait faire consensus et nous rassembler. Quoi qu'il en soit, j'ai entendu ses doutes : nous les lèverons.

Sur le Crédit lyonnais, j'aurai deux choses à dire. La première, c'est qu'on peut avoir le droit à l'erreur. Il faut simplement ne pas refaire les mêmes, et ce gouvernement a tenu compte des expériences qui, par le passé, se sont révélées des échecs, douloureux et dangereux. Vous vous doutez bien que nous n'avons pas souhaité mettre en place un outil risqué, et c'est la raison pour laquelle nous avons pris du temps et agi avec précaution.

La seconde, c'est que j'accepte difficilement ces leçons de bonne gestion bancaire. Il m'arrive, dans ma fonction, d'avoir affaire à certains sinistres qui absorbent beaucoup de mon temps – je pense à Dexia ou au Crédit immobilier de France. Ce sont des legs de l'ancienne majorité, qui n'a pas de leçons de bonne gestion bancaire à nous donner.

Derrière Dexia, il y a les collectivités locales, et l'objectif du Gouvernement est de remettre très vite sur pied, ainsi que je l'ai négocié avec la Commission européenne, une banque destinée à ces collectivités locales et s'appuyant sur l'État, via la Caisse des dépôts et la Banque postale.

Quant au Crédit immobilier de France, il est très important que nous puissions prendre le relais en ce qui concerne les prêts. Cela étant, il s'agit aussi d'hommes et de femmes qui n'ont pas démérité, mais dont les gestionnaires ont été peu avisés. Donc, pas de leçons, s'il vous plaît !

Philip Cordery a insisté sur l'aspect international. Je ne peux qu'aller dans son sens : la BPI doit être un outil de développement international. Sur sa proposition de coopération transfrontalière, je rappelle qu'il existe des outils comme les fonds d'intervention, par exemple, entre la France et la Belgique. Nous devrons les développer, mais nous y reviendrons lors de la discussion sur les amendements. Pour ma part, je suis favorable à ce que cette dimension soit pleinement prise en compte dans la gouvernance locale de la BPI.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion