Intervention de Christian Béréhouc

Réunion du 17 février 2015 à 9h30
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Christian Béréhouc, directeur associé de l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux :

Ayant connu le plan Hôpital 2007 et le plan Hôpital 2012, je vous propose d'en retracer les grandes étapes et les enseignements que nous avons pu en tirer.

Pendant deux décennies, il y a eu peu d'investissements. Dans les années 2000 l'endettement des établissements s'élevait à 7 milliards d'euros, contre 30 milliards aujourd'hui. L'objectif du plan Hôpital 2007 était de moderniser et de sécuriser – je pense à la sécurité incendie – et surtout d'aller très vite. Tels étaient les termes employés à l'époque.

Au départ, le plan prévoyait le financement de 10 milliards d'euros de projets d'investissements, dont 60 % d'aides. Puis, il est passé progressivement à 13 milliards d'euros, pour atteindre quasiment 17 milliards, le niveau des aides n'ayant pas bougé. Des facteurs exogènes, comme les indices de révision qui avaient dépassé 6 % par an, le secteur du bâtiment ayant enregistré à cette époque une forte activité, ont eu un effet sensible.

Le fait que le montant des aides n'avait pas évolué et qu'une partie de l'aide en capital a été transformée en aide à l'emprunt, a constitué l'un des premiers moteurs de dérapage de la dette, qui a résulté d'un cumul de plusieurs facteurs.

Le plan Hôpital 2012 en conséquence a davantage mis l'accent sur la notion de retour sur investissement. La primauté n'était plus à la vitesse de réalisation de l'investissement, mais à la démonstration qu'il était justement calibré. Sur ce plan, les hypothèses initiales se sont retrouvées le plus souvent corroborées par les faits. Il n'y a pas eu le décalage entre la volonté initiale et le résultat obtenu, que l'on avait pu constater pour le plan Hôpital 2007. Néanmoins, l'opération s'est arrêtée à la première tranche, dont le montant s'élevait tout de même à 5 milliards d'euros. Elle comportait un volet sur les systèmes d'information, ce qui était nouveau par rapport aux plans précédents qui concernaient uniquement l'immobilier. C'était un volet quasi obligatoire, sachant que la transformation d'un établissement passe aussi par la transformation des organisations, qui ne peut se faire sans l'adaptation des systèmes d'information.

Suite au retour d'expérience du plan Hôpital 2012, un mécanisme nouveau, le COPERMO, a été mis en place, afin de structurer démarche et dialogue entre les établissements et leur ARS.

Le premier élément de cette démarche commune consiste à bien appréhender qu'un investissement se conçoit sur le long terme. Or aujourd'hui, les plans régionaux de santé (PRS) sont à court terme. Il est nécessaire de dépasser le court terme pour que l'investissement ait le plus de chances possibles de satisfaire aux besoins de la population. Il faut prendre en compte un ensemble d'éléments tels que le territoire de santé, l'établissement porteur du projet, l'évolution du projet à cinq ou dix ans, ainsi que celle de l'offre de soins globale du territoire et l'évolution des parts de marché, sachant que certaines idées reçues selon lesquelles, avec un hôpital neuf, on récupère tous les patients qui ont déserté l'hôpital lorsqu'il était vétuste, sont souvent erronées. Il est très difficile, en effet, même si l'on a construit un bel hôpital tout neuf, de faire revenir des gens qui ont pris des habitudes ailleurs.

Il faut essayer de rationaliser l'approche en termes d'activité, et surtout tenir compte de la réalité de l'offre de soins publique et privée sur un territoire pris globalement, et pas uniquement centrée sur un établissement donné. De même, ce n'est pas parce que l'on a fait 3 % de plus d'activité pendant une année que l'on aura nécessairement 3 % de plus par an sur les dix ans à venir. Nous avons beaucoup insisté sur la nécessité d'une appréhension raisonnable des données de volumes d'activité. À cet égard, nous avons mis à la disposition des établissements et des ARS l'un de nos outils phares, intitulé « Hospi Diag », qui permet d'analyser les parts de marché et, parfois, de tempérer certains enthousiasmes, s'agissant de zones où l'activité stagne manifestement, voire régresse.

C'est là l'un des points majeurs de la démarche initiée par le COPERMO.

Hôpital 2007 mettait l'accent sur la rapidité, ce qui a souvent signifié « constructions neuves », car la restructuration prend du temps. Mais les temps ont changé. Aujourd'hui, quand on projette un investissement, il y a toujours plusieurs scénarios, et nous insistons sur la nécessité de démontrer en quoi la solution proposée est optimale pour l'établissement et la collectivité.

Il est important de préciser que nous apportons appui, outils et méthodologie et que nous n'intervenons en rien dans les choix eux-mêmes. Ceux-ci relèvent des ARS, et la décision d'aider, ou non, l'investissement, et à quelle hauteur, appartient au COPERMO.

Toujours dans une logique d'optimisation, nous avons travaillé sur la première génération des schémas régionaux d'investissement en santé (SRIS). On peut imaginer qu'il y en aura plusieurs versions, comme pour les autres schémas régionaux. Il s'agit à ce stade d'une sorte de prototype, avec des objectifs assez simples, auxquels les gens peuvent adhérer.

D'abord, il faut fournir des éléments de projection aux établissements et aux ARS. On s'est aperçu que les établissements avaient tendance, peut-être parfois sous la pression des personnels, à toujours envisager des projets visant à simplement améliorer l'existant, en reprenant pour une bonne part les modes de prise en charge du jour, voire de la veille, ce qui, de temps en temps, peut poser problème. Aussi, nous avons, dans le cadre des SRIS, proposé des éléments de projection concernant les prises en charge, les évolutions techniques, voire technologiques, pour aider les établissements et les ARS à les anticiper pour le projet dès son ouverture plutôt que de constater a posteriori que celui-ci est conforme à ce que l'on faisait en 2005 ou en 2010.

Ensuite, il s'agit d'une approche territoriale, et non d'une approche centrée sur les établissements pris individuellement. La prise en charge sera de plus en plus un sujet territorial, qui ne se cantonnera pas à l'établissement en tant que tel, mais concernera un établissement – qu'il soit public ou privé – sur son territoire, ainsi que le domaine médico-social. S'agissant des éléments qui vont servir à bâtir les schémas, la connaissance du secteur médico-social reste un enjeu assez fort, notamment sur le plan immobilier.

Nous sommes en train de tester le dispositif du SRIS avec deux régions pilotes, sachant que le dispositif doit s'étendre à l'ensemble des régions dès la fin de cette année.

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