Les principaux défenseurs du dispositif présenté par le Gouvernement siègent à droite : n'y aurait-il pas comme un problème ?
Personne ne conteste la nécessité d'aider notre industrie ; ce qui nous gêne, c'est qu'on ne parle que du coût du travail, et jamais du coût du capital. Or, en 30 ans, dans les entreprises industrielles, manufacturières et de service, la part des salaires a été multipliée par 3,6, mais celle des dividendes distribués par 20 ! Contrairement à ce que l'on prétend, le coût du travail n'est pas plus élevé chez nous que dans les autres pays : par unité de production, il est même plus faible en France qu'en Allemagne.
Les exonérations de charges patronales sur les salaires représentaient, en 1992, 1,9 milliard d'euros en 1992, 30,7 milliards en 2008 et près de 60 milliards en 2013. Pourtant, le Conseil des prélèvements obligatoires a prouvé que cela n'avait aucun effet sur l'emploi ! Il eût été préférable de s'engager dans la voie de la modulation des cotisations et de l'impôt, de manière à favoriser les entreprises qui investissent dans l'outil productif, les salaires, la formation, et de pénaliser celles qui privilégient la spéculation.
Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit une augmentation d'un peu plus de 10 milliards d'euros de l'impôt sur les sociétés ; or, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2012, présenté concomitamment, on diminue de 20 milliards ce même impôt. Je ne comprends pas ce changement de pied – ni celui sur la TVA, d'ailleurs : porter de 7 à 10 % le taux de TVA sur le bâtiment est une erreur fondamentale, eu égard à l'objectif de construire 150 000 logements sociaux par an.
Je suis surpris en outre que le dispositif ne soit pas ciblé sur l'industrie. Il est inconcevable que les banques, les assurances et la grande distribution bénéficient d'un crédit d'impôt alors qu'il ne s'agit pas d'activités créatrices d'emploi !
Tout à l'heure, lors des questions au Gouvernement, Mme Valérie Boyer a posé une question à Mme Touraine sur les risques pesant sur l'offre de santé à Marseille ; la ministre aurait dû dire que, grâce au crédit d'impôt, le groupe Générale de santé va gagner 4 % sur les salaires dès 2013, et 6 % en 2014 !
Je vous le dis solennellement, messieurs les ministres : ce projet n'est pas bon – et si l'on peut gagner des batailles politiques, on peut aussi perdre des batailles idéologiques !