La création de la BPI constitue une innovation positive qui se situe dans la continuité d'OSEO, organisme qui avait déjà regroupé les pratiques de financement. On peut, néanmoins observer quelques erreurs de jeunesse. Bpifrance se montre trop sélective dans l'appréciation de l'innovation. Or, pour 80 % des entreprises, celle-ci n'est pas seulement technologique mais incrémentale ou endogène. Certes, la haute technologie doit être prise en compte, mais, dans le cadre du retournement d'entreprise notamment, l'innovation est très importante et ne doit pas être négligée.
Le monde de la petite entreprise est familier d'une logique de guichet, alors que la BPI s'inscrit dans une logique de projets, singulièrement de projets viables. Les chefs de PME sont quelque peu désorientés. La publication annoncée d'un guide de l'innovation, actualisé, sera l'occasion d'une clarification pour une meilleure compréhension.
J'appelle l'attention sur un risque de dérive bancaire constaté à l'usage chez OSEO, où se trouvaient des gens remarquables dans le domaine de l'innovation avec l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) comme dans celui de la garantie. Mais, peu à peu, à la tête d'OSEO, la banque avait pris le pas et on ne trouvait plus de directeurs régionaux issus de l'ANVAR ou de la Société française pour l'assurance du capital-risque des PME (SOFARIS). Cela a changé avec la BPI, mais il convient de rester vigilant.
À l'échelon régional, la BPI n'est pas assez visible, alors que c'était un axe majeur du projet. Les chambres de commerce manquent d'éléments pour assister l'institution.
Par ailleurs, on a l'impression que Bpifrance devient un peu attrape-tout. Dans le secteur de l'export, par exemple, elle indique dans ses publications être le « guichet unique pour accompagner les entreprises à l'export ». Le patron de PME désireux de se lancer dans l'export va donc s'en remettre à la seule BPI, qui ne fait que du financement. Il devrait plutôt se tourner vers Business France, les réseaux d'organisations professionnelles et les CCI. L'institution doit apprendre à fonctionner en relation avec les autres acteurs sous peine de se renfermer sur elle-même. Une meilleure circulation de l'information de la part de la BPI, particulièrement au sujet des dossiers difficiles, nous permettrait de mieux orienter les entreprises faisant appel à elle. Le réseau bancaire doit être capable de résoudre beaucoup de problèmes et il faut soumettre à Bpifrance des dossiers pertinents. Nous souhaiterions donc que ce retour d'expérience en direction des opérateurs de proximité augmente.
Le préfinancement du CICE constitue une très bonne initiative, mais ses coûts sont nettement plus élevés que ceux des réseaux bancaires habituels. L'absorption des formules de crédit relevant antérieurement du PCE et l'héritage d'OSEO ont conduit l'établissement à gérer des crédits de faibles montants – entre 2 000 et 3 000 euros – avec une certaine rigidité. Il s'en est suivi une baisse drastique du nombre des présentations de dossiers. Dès lors, ce type d'aide relèvera des banques, ce qui impliquera une garantie et, partant, plus de complexité qu'auparavant. À défaut de Bpifrance, nous disposons pour ces financements modestes de plates-formes d'initiative qui fonctionnent parfaitement. Il faut trouver des outils adaptés à ces petites entreprises qui sont l'avenir.