Intervention de Pierre Moscovici

Réunion du 28 novembre 2012 à 16h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

La finalité et la méthode de mon action relèvent d'une inspiration parfaitement social-démocrate. Notre objectif est de redresser la compétitivité de la France, qui a régressé, en redressant aussi les finances publiques et l'appareil productif de notre pays. C'est ce qui motive l'ensemble du pacte que je propose, et tout particulièrement le crédit d'impôt que vous examinez aujourd'hui.

Monsieur Mandon, au-delà de la rapidité et de la simplicité, le pacte se justifie par sa méthode : le Gouvernement fait confiance aux partenaires sociaux et attend d'eux qu'ils se montrent ambitieux.

Monsieur Lefebvre, une loi transposera au début de 2013 l'accord national interprofessionnel que nous espérons. À défaut d'accord, comme l'a indiqué le Président de la République, nous prendrons nos responsabilités et proposerons quand même une loi. Des dispositions législatives seront également consacrées aux autres contreparties – en matière de gouvernance, de rémunérations, de civisme fiscal et d'ordre public économique, c'est-à-dire notamment de délais de paiement et d'actions de groupe. Vous en serez saisis dès le début de l'an prochain.

Monsieur Cherki, toutes les analyses montrent qu'il n'existe pas d'incompatibilité entre la compétitivité et l'emploi, et qu'il est inutile d'opposer les secteurs de l'industrie et des services, car de nombreux dérapages de prix constatés dans l'industrie s'expliquent par le dérapage des prix des services. Les sous-amendements proposés par le groupe majoritaire me semblent aller dans le bon sens. Évitons ceux qui seraient contraires à la logique de ce texte et, plus généralement, à celle du Gouvernement.

Je précise que toutes les banques bénéficieront du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi.

Madame Berger, un dispositif de suivi et de contrôle sera mis en place pour toutes les entreprises. Il n'y a pas de désaccord sur les objectifs et nous pourrons l'écrire.

Monsieur Juanico, l'économie sociale et solidaire soulève une double difficulté. Tout d'abord, une grande part de ce secteur sera incluse dans le champ de la mesure, car certaines associations sont, malgré leur caractère non-lucratif, soumises aux impôts commerciaux, mais il est difficile de faire bénéficier d'un crédit d'impôt des associations qui ne sont pas imposées à l'IS ou à l'IR, et il faudra faire preuve d'imagination pour trouver une solution. Par ailleurs, l'application à toutes les associations du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi coûterait 1,5 milliard d'euros.

Monsieur Woerth, il est bon d'alléger l'impôt qui pèse sur les salaires et, plus encore, les bas salaires, et il est tout aussi justifié de renforcer l'imposition des grandes entreprises dont le bénéfice imposable gonfle sous l'effet de divers mécanismes – la Commission européenne a du reste encouragé la France à réduire ses subventions fiscales à l'endettement, qui étaient les plus élevées d'Europe.

Monsieur Goua, en matière d'efficacité, il est toujours possible de contester un diagnostic, mais le dispositif que nous proposons a le mérite de la simplicité et de la puissance – et donc, au bout du compte, d'une efficacité d'autant plus grande que nous avons choisi de ne pas ponctionner le pouvoir d'achat cette année.

Monsieur Vigier, je confirme que nous faisons deux fois moins de TVA que le précédent gouvernement avec deux fois plus de compétitivité, car nous avons fait un choix radicalement différent : celui de la modulation.

Monsieur Carré, il fallait que la montée en charge soit rapide. Quant au mode d'imputation, une différenciation sera en effet opérée entre les PME et ETI d'une part, et les grandes entreprises, d'autre part. Le mécanisme de préfinancement sera centré sur les PME, qui sont les plus vulnérables, mais les ETI pourront également être concernées.

Quant aux entreprises d'intérim, elles bénéficieront du crédit d'impôt en leur qualité d'employeurs, comme c'est le cas pour d'autres allègements, et devront apprécier le niveau de rémunération rapporté au temps de travail sur l'année.

Madame Mazetier, en réponse à votre question relative à l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale, je rappelle que l'assiette est celle des cotisations patronales de sécurité sociale, c'est-à-dire la masse salariale brute. En termes de territorialité, les règles qui s'appliquent sont celles de l'impôt sur les sociétés. Les heures supplémentaires sont prises en compte, mais au salaire horaire de base, sans tenir compte de la majoration dont elles font l'objet.

Madame Dalloz, je ne vois pas en quoi la mesure proposée serait plus compliquée qu'une baisse de cotisations. Le crédit d'impôt repose sur un mécanisme similaire au crédit d'impôt recherche apprécié des entreprises et il laisse aux partenaires sociaux toute latitude pour poursuivre une négociation sur le financement de la protection sociale.

Madame Rabault, l'agriculture est bien évidemment concernée et sera probablement bénéficiaire nette de ce dispositif à hauteur de 1 milliard d'euros. Quant au secteur associatif, il faudra, comme je l'ai déjà expliqué, trouver des solutions pour les associations qui ne sont pas assujetties à l'impôt.

Monsieur Grandguillaume, il sera possible de comptabiliser le crédit d'impôt comme un produit d'exploitation, à supposer qu'il n'y ait pas de conditionnalité et sous réserve de l'avis que pourrait émettre l'Autorité des normes comptables, seule compétente en la matière. L'effet sur la cotisation sur la valeur ajoutée – CVAE – sera évidemment neutralisé. Un texte de loi précisera, je le répète, les aspects législatifs des questions de gouvernance et de rémunération.

Monsieur Thévenoud, comme l'a sagement observé le rapporteur général, il nous faut nous donner du temps pour discuter avec précision du champ des différents taux de TVA – peut-être ce temps nous permettra-t-il d'avoir, selon le souhait de M. le président, un rapport Thévenoud global.

Il nous faudra veiller à l'équilibre budgétaire de la réforme : la TVA doit financer le tiers du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi et la réduction de certains taux à 5 % devra être compensée par d'autres évolutions. Il nous faudra également exercer notre créativité dans le respect des règles communautaires, qui interdisent de découper certains produits ou services selon des critères subjectifs ou susceptibles de fausser l'estimation de la concurrence entre entreprises comparables.

Voilà les quelques réflexions que je puis formuler en réponse à vos questions pour préciser le cadre d'un dispositif qui a le mérite d'être simple et rapide et qui, je le répète, n'oublie nullement de définir ses contreparties.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion