Je réitère la question de M. Delcourt : est-il arrivé que l'autorité civile vous donne des ordres qu'il vous semblait impossible d'exécuter ou qui, en tout cas, n'étaient pas conformes à l'idée que vous vous faites du maintien de l'ordre ?
Lieutenant-colonel Emmanuel Gerber. Quoique je n'aie jamais eu affaire à un ordre illégal, je me suis toujours préparé à refuser d'en exécuter. Tous les camarades qui m'entourent, et tous les gendarmes en général, sont imprégnés de cette culture et ont été préparés à respecter la réglementation et les lois : nous en sommes les défenseurs et les représentants légaux.
Lieutenant-colonel Stéphane Fauvelet. Ce n'est pas ici le lieu de faire des développements sur la « théorie de la baïonnette intelligente ». Il nous appartient de saisir la lettre des instructions du préfet, représentant de l'État et garant des libertés. Mais – et c'est là que réside la difficulté pour le commandant de groupement de gendarmerie mobile – il nous faut aussi très rapidement comprendre l'esprit de la mission, savoir dans quel cadre nous évoluons. Nous devons avoir connaissance de l'arbitrage ministériel, mais surtout percevoir la personnalité de l'autorité préfectorale : j'ai besoin d'être rassuré lorsque je suis dans l'action, mais j'ai aussi besoin de rassurer mon chef et l'autorité préfectorale.
L'opposant est accompagné de conseillers juridiques : il y a des legal teams sur toutes les ZAD. Pourquoi nos préfets ne sont-ils pas secondés par des conseillers juridiques ? La question de l'ordre contraire à la paix publique ne se poserait plus.