Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 11 mars 2015 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

Ce qu'ont à dire les personnes ayant enquêté est tout aussi intéressant. À n'écouter que la parole officielle nous allons tourner en rond et notre travail sera inutile ! Craignez-vous que les journalistes disent des choses dérangeantes ? Ils ont enquêté sur la cession d'un fleuron de notre industrie à un groupe américain, et ils méritent d'être entendus si nous voulons aller au fond des choses. C'est notre rôle de parlementaires dans une affaire aussi stratégique.

Monsieur Kron, pourquoi une vente aussi précipitée, secrète et sans enchères, à General Electric ? Pourquoi ne pas avoir cherché une solution française ? La situation financière d'Alstom – un carnet de commande de 51 milliards d'euros, soit deux ans et demi d'activité, un chiffre d'affaire de 20 milliards d'euros, une marge opérationnelle de 7% tirée par les activités de la branche énergie, un résultat net de 556 millions d'euros – ne justifiait nullement une telle hâte.

Je veux bien entendre qu'il y ait un problème de taille critique, mais on aurait pu imaginer un rapprochement avec Safran, Schneider Electric, Thales ou DCNS. Areva qui est aujourd'hui en difficulté cherche une solution française : pourquoi n'a-t-on pas fait de même pour Alstom ?

On nous a argué de la complémentarité entre Alstom et General Electric, mais la phase II engagée aujourd'hui par Bruxelles pourrait démentir ces affirmations, la Commission européenne estimant que ce rapprochement pose des problèmes de concurrence. Cette procédure est certes handicapante pour le groupe, mais elle aurait sans doute pu être évitée si on avait agi avec moins de précipitation.

Qu'en est-il ensuite des pressions exercées par la justice américaine sur Alstom ? D'après le Wall Street Journal, qui cite votre avocat, General Electric a participé à toutes les étapes de la négociation entre Alstom et la justice américaine, et l'on ne peut s'empêcher de rapprocher cette affaire du rachat, dans le passé, par GE d'autres entreprises sous le coup d'enquêtes judiciaires aux États-Unis : n'y aurait-il pas là un mode opératoire permettant au géant américain de s'emparer d'entreprises fragilisées par des procédures judiciaires ? Aux dires mêmes de la justice américaine, Alstom n'a commencé à coopérer qu'après l'inculpation de ses cadres, ce qui pourrait expliquer la hâte avec laquelle le groupe a voulu se débarrasser de sa branche énergie. Le fait que, dès le lendemain du vote de l'assemblée générale validant la vente à General Electric, le département de la justice américain ait annoncé la conclusion d'un accord à l'amiable mettant fin aux poursuites pénales me semble corroborer cette hypothèse. C'est une question d'autant plus importante qu'elle ne concerne pas seulement Alstom mais d'autres entreprises françaises ayant, elles aussi, maille à partir avec la justice américaine.

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