Les dispositions fiscales en matière d'impôt sur les sociétés sont assez favorables aux coopératives, monsieur Peiro. Quant à savoir si elles pourraient jouir du CICE, c'est un point qui n'est pas tranché à ce jour. J'ai moi-même été saisi par le monde coopératif, et j'en ai bien sûr informé MM. Moscovici et Cahuzac. Les arbitrages seront rendus dans les jours qui viennent. Au regard du régime fiscal des coopératives, il n'est pas certain qu'ils le soient en faveur du monde coopératif.
Le crédit à la consommation a été évoqué par plusieurs d'entre vous. La vraie question posée par le crédit renouvelable est celle du crédit de trésorerie. La part des crédits qui sont souscrits pour rembourser d'autres emprunts tend en effet à augmenter dans le crédit renouvelable. Or souscrire un crédit renouvelable pour payer son loyer ou rembourser un autre crédit, c'est entrer dans un cercle infernal. Nous voulons rompre celui-ci en évitant notamment qu'un prêteur puisse accorder le « crédit de trop » à une personne qui basculera du même coup dans le surendettement. Il n'y a pas de solution unique. Même en créant un fichier positif ou registre national des crédits, nous ne parviendrions pas à éradiquer le phénomène. L'objectif doit donc être de lutter contre ce « crédit de trop ».
Je ne crois pas qu'il faille interdire le crédit renouvelable, madame Maquet : pour un petit montant, il peut répondre parfaitement à un besoin de l'économie ou des familles. C'est un instrument pour faire vivre le crédit à la consommation et permettre aux ménages d'accéder à des biens ou à des services dont ils ont besoin. En revanche, il devient dangereux lorsqu'il est utilisé de manière systématique à d'autres fins. Il faut néanmoins reconnaître que depuis la loi Lagarde, les crédits renouvelables concernent davantage de petits montants. L'encadrement des délais de remboursement a également permis de réduire le coût global du crédit pour les familles. Sur ce point, la loi Lagarde a incontestablement eu des effets positifs. Le projet de loi sur la consommation s'attachera à l'améliorer encore.
Nous pensons en tout cas qu'il convient de maintenir le crédit à la consommation, de même que le crédit renouvelable, mais sous une forme beaucoup plus encadrée que jusqu'à présent.
Quels moyens donner au monde coopératif pour développer l'expertise des solutions qui s'offrent aux SCOP ? J'ai annoncé dernièrement au Congrès de la Confédération générale des SCOP (CGSCOP) l'ouverture de sept chantiers, parmi lesquels la possibilité de créer des groupes de SCOP, le droit de préférence, la possibilité de créer des start up en SCOP. Je tiens cependant à préciser que sans les unions régionales de SCOP (URSCOP), il n'y aurait pas de SCOP. Ces unions régionales jouent en effet un rôle déterminant dans l'accompagnement des salariés qui souhaitent reprendre leur entreprise. C'est pourquoi j'ai annoncé que jusqu'à un million d'euros – contre 50 000 euros aujourd'hui – pourraient être consacrés à la CG SCOP et aux URSCOP pour accompagner les initiatives sur le terrain. Nous allons créer un environnement juridique favorable à la création de SCOP. Encore faut-il que les instruments d'accompagnement s'étoffent.
Le projet de loi sur l'économie sociale et solidaire s'attachera aussi à promouvoir la reconnaissance légale des CRESS. Nous disposerons ainsi d'un interlocuteur institutionnel reconnu par la loi, vers lequel tout porteur de projet pourra se tourner pour être accompagné dans le montage de celui-ci.
M. Cinieri a évoqué les épiceries solidaires, qui sont d'autant plus nombreuses que les gens ont faim et qu'ils ont peu d'argent pour consommer. Telle est hélas la réalité que nous rencontrons dans le département de la Loire, comme dans nombre de nos territoires. Il n'est que de regarder le nombre de personnes qui sont réduites à fréquenter les Restos du coeur ou les épiceries solidaires pour se procurer non seulement de quoi se nourrir, mais aussi un certain nombre de produits de première nécessité, pour constater que la pauvreté a augmenté en France.
Les épiceries solidaires sont bien sûr éligibles au dispositif des emplois d'avenir. Bon nombre d'entre elles en créent. Un certain nombre d'emplois sur lesquels déboucheront les premières conventions en faveur des emplois d'avenir que j'ai signées depuis le début du mois sont tournés vers ces établissements qui jouent un rôle décisif pour garantir l'accès à la consommation des ménages les plus pauvres et emploient souvent à la fois – à l'instar des grandes associations caritatives – des salariés et des bénévoles. Nous avons donc commencé à préparer – voire à signer – des accords-cadres en matière de création d'empois d'avenir avec tous les grands réseaux de l'ESS. C'est une bonne nouvelle pour les jeunes comme pour le fonctionnement de ces structures.
Je vous confirme que j'ai arrêté le principe d'un accord-cadre sur l'enseignement de l'économie sociale et solidaire avec le ministre de l'éducation nationale, madame Le Loch. Il n'est pas question de nous substituer à la Commission nationale des programmes pour décider ce qui devra figurer dans les programmes scolaires ou dans les manuels : à elle de voir comment enseigner la « biodiversité économique » dans le cadre des cours d'économie. Pour avoir une stratégie de croissance inclusive et développer un secteur qui pèse 10 % du PIB, commençons par dire aux élèves qu'il existe ! Tel n'est pas le cas aujourd'hui : les seuls modèles d'entreprises enseignés sont les modèles d'entreprises classiques de sociétés par capitaux. Les sociétés de personnes concourent pourtant elles aussi à la création d'emplois, de richesses et de valeur. C'est le sens de cet accord-cadre.
Pour votre information, on recense aujourd'hui 72 masters d'économie sociale ou liés à l'entrepreneuriat social. De plus en plus d'écoles de commerce forment à ces disciplines ou au management spécifique des entreprises de l'économie sociale et solidaire. Ce développement des outils de formation est au diapason de la réalité d'un secteur qui aspire à se développer, mais aussi de celle des politiques publiques nouvelles portées par ce Gouvernement.
Frédéric Roig connaît bien l'économie sociale et solidaire. J'ai eu l'occasion de m'intéresser aux expérimentations conduites dans son département. Le Languedoc-Roussillon est à cet égard une région aussi dynamique que toutes les autres… Permettez-moi de prendre un exemple pour illustrer ce dont nous avons besoin avec la BPI. Elle devra répondre aux besoins en financement importants, de l'ordre de 15 à 20 millions d'euros par exemple, de tel grand établissement mutualiste qui veut créer un établissement intergénérationnel, allant de la crèche à la prise en charge de personnes âgées dépendantes ou en perte d'autonomie, tout en continuant – directement ou par le biais d'organismes délégataires tels que les agences départementales d'insertion (ADI) – à faire du micro-crédit pour favoriser puis consolider la création de quelques emplois dans des circuits courts ou dans l'économie résidentielle. Cet équilibre ne sera pas facile à trouver. C'est pourquoi nous travaillons à doter la BPI d'une ingénierie particulière.
L'assurance emprunteur ne figurera pas dans le projet de loi sur la consommation, madame Linkenheld, mais dans le projet de loi bancaire, qui imposera à l'établissement prêteur des délais pour l'instruction de la demande d'assurance déléguée, et interdira la perception de frais liés à l'étude d'une demande d'assurance déléguée lors de la conclusion du prêt. Nous améliorerons ainsi l'application de la loi Lagarde. Nous sommes ici dans le même cas de figure que pour l'offre alternative de crédit renouvelable ou amortissable : certaines dispositions de la loi relèvent trop de la bonne volonté des établissements de crédit. Il faut donc mieux encadrer la pratique, qui reste trop loin de la lettre de la loi.