Intervention de Marie-George Buffet

Réunion du 13 mars 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-George Buffet :

Vous avez souligné combien il était important que la représentation nationale se soit emparée de la question de nos institutions. J'ajouterai qu'elle a le devoir d'en faire une question citoyenne et populaire et, de ce point de vue, je ne comprends pas votre souci de modération. Dans le cadre d'une crise de confiance telle que celle que nous traversons, la question des institutions doit être placée au coeur du débat politique et citoyen. Nos compatriotes sont capables de s'en emparer et d'apporter des réponses éclairées.

Parler de Ve ou de VIe République n'est pas neutre, de même que la question d'une assemblée constituante n'est pas anodine. Il faut en effet marquer des ruptures, et passer d'une république à une autre témoignerait de notre volonté de modifier notre système politique en profondeur. S'en tenir au contraire au souhait d'amender la Ve République rendrait toute tentative de changement moins légitime.

Pour ce qui concerne le Président de la République, quel que soit le rôle que lui conférait à l'origine la Constitution de 1958 et la stature que lui ont donnée par la suite le général de Gaulle et ses successeurs, force est de constater que la fonction est aujourd'hui en train de se casser la figure. La logique du quinquennat veut qu'à peine l'élection présidentielle achevée les responsables politiques se concentrent sur la suivante, le phénomène étant aggravé par l'organisation de primaires. Par ailleurs, l'importance prise par cette élection au détriment de toutes les autres fait que le candidat ou la candidate doit fournir des propositions – soixante, cent, cent dix, cent vingt – sur tous les sujets et dans tous les domaines. Puisque le Président de la République est ainsi censé tout savoir, il est normal ensuite que les citoyens se tournent vers lui pour demander des comptes et non vers les ministres ou les parlementaires. Son autorité s'en trouve affaiblie ; les lendemains déchantent.

En guise de solutions, vous proposez d'en finir avec le quinquennat et d'attribuer des compétences précises au Président de la République. Il faut à mon sens songer à renforcer le rôle de l'Assemblée, en repensant son articulation avec le Sénat et le Conseil économique, social et environnemental. Reste que je m'interroge sur un Président de la République élu pour sept ans, inscrivant son action dans un horizon temporel long mais n'ayant aucun pouvoir réel : pourquoi, dans ce cas, l'élire au suffrage universel ?

1 commentaire :

Le 19/12/2016 à 13:45, Laïc1 a dit :

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" Par ailleurs, l'importance prise par cette élection au détriment de toutes les autres fait que le candidat ou la candidate doit fournir des propositions – soixante, cent, cent dix, cent vingt – sur tous les sujets et dans tous les domaines."

La fonction de président de la république est l'ultime verrou à faire sauter afin d'établir le régime des référendums. Mais on rassure Mme, ce régime n'aura pas comme fonction de placer le communisme au pouvoir, il aura comme fonction de faire en sorte que les citoyens puissent décider par eux-mêmes ce qui est bon ou mauvais pour eux, indépendamment des lobbies en tout genre et de la dictature d'un seul homme "démocratiquement élu".

A propos du "président élu", on peut se référer à l'histoire grecque, où le cas existait : le peuple élisait, dans certaines cités, un homme, avec les pleins pouvoirs, pendant une certaine durée, un peu ce que nous connaissons avec notre président de la République. Ce procédé n'était évidemment pas considéré comme démocratique, c'était un moyen d'exception pour remédier à un trop grand désordre ponctuel dans la cité, avant un éventuel retour à l'ordre démocratique. Ce tyran était appelé un "aisymnète", et d'ailleurs Aristote qualifiait cette sorte de dictature conférée à temps ou à vie de « tyrannie élective ».

Nos présidents de la République sont des formes d'aisymnète.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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