Intervention de Georges Fenech

Réunion du 18 mars 2015 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech :

Vous avez rappelé le contexte de la loi du 27 janvier 2014, qui contenait des dispositions permettant la création des nouvelles métropoles. Nous nous penchons aujourd'hui sur celle de Lyon, qui exerce sur son territoire les attributions du département et celles anciennement attribuées à la communauté urbaine, désormais alignées sur les compétences communales transférées aux métropoles de droit commun. Ainsi, sur l'aire métropolitaine, il ne subsiste plus, depuis le 1er janvier, que deux échelons de collectivités, la métropole et les communes, tandis que le département résiduel du Rhône subsiste hors ce territoire.

Le Parlement a accordé au Gouvernement une habilitation législative destinée à adopter le droit en vigueur à la métropole. Trois ordonnances doivent être prises sur ce fondement. Le groupe UMP du Sénat ayant approuvé les deux projets de loi de ratification, celui de l'Assemblée nationale adoptera la même position, même s'il entend émettre des réserves.

L'ordonnance du 6 novembre 2014 relative aux dispositions budgétaires, qui ne pose pas de problème sur le fond, invite à ouvrir une réflexion plus vaste sur le modèle créé par la métropole de Lyon. La création d'une métropole urbaine qui absorbe le département sur son territoire, et la persistance du département du Rhône rural privé de son territoire métropolitain, fiscalement riche, posent problème. Si elle était généralisée, la démarche pourrait bouleverser les mécanismes de péréquation.

L'ordonnance du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole de Lyon comporte des dispositions de nature et de conséquences très diverses et très techniques, dont la plupart n'appellent aucun commentaire. On peut toutefois s'interroger sur le mode d'organisation que l'État a retenu pour ses propres services, en particulier sur le plan juridictionnel. Il n'a pas choisi de conserver pour la totalité de ses institutions le cadre de l'ancien département du Rhône en tant que circonscription déconcentrée. Dans l'ordonnance, la carte judiciaire ne fait l'objet d'aucune adaptation résultant de la création de la métropole. Le fait qu'une question aussi fondamentale n'ait été tranchée ni lors de l'examen de la loi MAPTAM ni lors de la ratification de l'ordonnance prouve que la majorité n'a pas préparé son projet ou qu'elle n'assume pas celui-ci.

La mise en place de la métropole lyonnaise appelle trois critiques, qui auraient justifié que notre groupe dépose des amendements, ce que la procédure législative d'examen d'un projet de loi portant ratification d'ordonnance ne permet malheureusement pas.

L'article 6 de l'ordonnance, qui prévoit le recours au scrutin uninominal majoritaire, n'impose pas que la commission permanente de la métropole de Lyon soit paritairement composée d'un homme et d'une femme, alors que, sur son territoire, la métropole de Lyon se substitue au département du Rhône, et exerce l'intégralité des compétences anciennement dévolues au conseil départemental. Afin d'assurer une égale représentation des deux sexes au sein des instances publiques élues, l'article L. 3122-5 du code général des collectivités territoriales issu de la loi du 17 mai 2013 prévoit que la commission permanente des conseils départementaux sont paritairement composés de femmes et d'hommes – avec obligation stricte d'alternance – élus au scrutin de liste.

Bien que les membres de la commission permanente de la métropole de Lyon exercent sur le territoire de la métropole les mêmes compétences que ceux de la commission permanente du département du Rhône, le Gouvernement n'a prévu aucune règle favorisant l'égal accès des postes aux femmes et aux hommes. Faut-il rappeler que l'article 1er de la Constitution dispose que la loi favorise leur égal accès aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ? Par ailleurs, en prévoyant sur cette question fondamentale des règles différentes dans la métropole de Lyon et les conseils départementaux, le Gouvernement viole le principe constitutionnel d'égalité devant la loi.

L'impossibilité matérielle d'atteindre l'objectif constitutionnel de parité ne saurait être invoquée, dès lors que le découpage du territoire de la métropole de Lyon en quatorze circonscriptions permettra l'élection de huit à dix-huit conseillers métropolitains, la liste de candidats devant présenter une stricte alternance d'hommes et de femmes. Le conseil de la métropole de Lyon comportera suffisamment de représentants de chaque sexe pour qu'on exige que la composition de la commission permanente respecte la parité sous une forme ou une autre.

Ma deuxième critique concerne le montant des indemnités des membres de la commission permanente fixé par l'exécutif de la métropole, et attaqué juridiquement en contrôle de légalité par le groupe UMP de la métropole. Nous attendons toujours la réponse du préfet. L'imprécision juridique du texte gouvernemental a permis à la métropole de Lyon de créer une indemnité spécifique, à l'évidence contraire aux règles juridiques, et qui détériore l'image que nos concitoyens se font de leurs élus.

Le 26 janvier, sous l'autorité de Gérard Collomb, le conseil de la métropole de Lyon a adopté une délibération concernant la fixation de l'indemnité de fonction des élus, conformément à l'article L. 3632-2 du code général des collectivités territoriales. Sachant que les indemnités des conseillers métropolitains membres de la commission permanente sont calculées par rapport à celles des conseillers métropolitains, il a été considéré que les membres de la commission permanente pouvaient percevoir jusqu'à 77 % du traitement mensuel de l'indice brut terminal de l'échelle indiciaire de la fonction publique, soit un montant de 2 927,13 euros. En retenant finalement le taux de 64,3 %, le conseil a fixé leur indemnité à 2 444,34 euros, ce qui représente une majoration de 86,38 % par rapport à l'indemnité de conseiller métropolitain. À nos yeux, il s'agit d'une interprétation erronée de la loi, la majoration ne pouvant excéder 10 % et devant s'appliquer, non sur la base théorique du taux maximal de conseiller métropolitain, mais sur celle du taux voté par l'Assemblée, qui constitue l'indemnité maximale.

Ma troisième réserve concerne les modalités de l'élection, en 2020, des conseillers métropolitains à la suite du découpage préfectoral en quatorze circonscriptions. Ces modalités ont été déterminées sans réelle concertation avec les élus de la métropole, dans une précipitation que rien ne justifiait. Début octobre 2014, le préfet du Rhône a été chargé par le Gouvernement d'une mission de concertation pour délimiter les circonscriptions électorales, en vue de la rédaction d'un prochain projet d'ordonnance à présenter au Conseil d'État.

Certes, la loi du 27 janvier 2014, qui crée la métropole de Lyon, n'a pas déterminé le mode de scrutin applicable en 2020, mais elle donne au Gouvernement la possibilité de le fixer par ordonnance – à condition de respecter le délai d'un an à compter de la promulgation de la loi –, puis, en respectant le cadre fixé, de passer par la loi.

Les propositions formulées par le préfet dans le cadre de la loi actuelle appellent quelques observations. L'existence de quatorze circonscriptions électorales rend moins lisible l'identité métropolitaine, qui doit être une et indivisible. D'autre part, le nombre d'habitants des circonscriptions est inégal, alors que le critère démographique est primordial dans la loi. La circonscription du troisième arrondissement regroupe 61 000 habitants, quand la plus grande, qui comprend l'intégralité de Villeurbanne, en réunit 145 000. Enfin, si Villeurbanne ne constitue qu'une circonscription, il en existe six à Lyon. Mieux vaudrait que la ville, divisée en arrondissement sur le plan électoral, ne forme qu'une circonscription. Créer une nouvelle structure sera source de confusion.

Sous réserve de ces trois observations, qui nourriront des objections lors de l'adoption des prochaines ordonnances, le groupe UMP votera le projet de loi, comme il avait voté la loi MAPTAM.

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