Une majorité de Français pense en effet que si on rendait notre service civique obligatoire, on réglerait notre problème de cohésion nationale et de mixité sociale. Mais ce n'est pas possible, non tant pour des raisons budgétaires, que parce que le parallèle fait entre le service national et le service civique est intenable. Dans un cas, on dispose de l'armée avec toutes ses infrastructures – je rappelle à cet égard que l'appel sous les drapeaux n'a pas été supprimé, mais suspendu – alors que dans l'autre, il faut une structure d'accueil. Si on veut faire en sorte que 800 000 jeunes chaque année fassent un service civique, il faut d'abord convaincre la Nation tout entière – les élus locaux, l'État, les administrations, les établissements publics et le pan non marchand de l'économie sociale et solidaire – de proposer 800 000 missions et que chacun de ces acteurs ait une obligation à cet égard.
Dès lors, faudrait-il prévoir que les communes de plus de tant d'habitants doivent chaque année proposer tant de missions de service civique, avec des sanctions à la clé ? Je ne le pense pas.
Je crois plutôt qu'il faut que la Nation se sente mobilisée et qu'avoir accompli un engagement citoyen devienne une voie normale. On pourrait aussi prévoir que l'accès à un certain nombre de professions ou de concours soit conditionné par l'accomplissement d'un tel service, même s'il n'est pas obligatoire. Cela donnerait envie à beaucoup de jeunes de le faire, et ce, d'autant plus s'ils deviennent chez eux une référence.
Le service civique est une machine à fabriquer de l'employabilité. Reste que si les jeunes qui peuvent signaler cette expérience dans leur curriculum vitae ont beaucoup plus de chances de s'intégrer professionnellement, ce n'est pas l'objet premier de ce service, qui tend à accroître leur insertion dans la République. Il ne faut en tout cas pas confondre le service civique avec les emplois jeunes, même si j'aurais tendance à penser que des emplois aidés occupent peut-être des missions qui pourraient être exercées par des jeunes en service civique. Nous devons tous nous mobiliser pour faire passer le message selon lequel on ne peut pas laisser tomber nos jeunes devant le mur du chômage et il faut leur donner l'opportunité de s'engager – ce qu'il faudra peut-être formaliser dans une loi.