Intervention de Thierry Mariani

Réunion du 18 mars 2015 à 16h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Mariani, rapporteur :

La Moldavie est un pays où la cote d'amour de la France est énorme. Lors de mon déplacement, j'ai notamment pu rencontrer en une journée le Président de la République, le Premier ministre, deux anciens Premiers ministres, plusieurs ministres dont celui de l'économie, qui est franco-moldave, etc. Nous avons eu le plaisir de mener plusieurs entretiens en français.

M. Myard, s'agissant de l'Est de l'Europe, nous n'avons d'accords d'association qu'avec la Moldavie, l'Ukraine et la Géorgie. Je profite de cette occasion pour souligner qu'aborder la problématique de manière globale est une faute, car ces pays sont très différents. Lorsque vous échangez avec certains responsables russes, ils déclarent que l'Ukraine est slave et la Moldavie roumaine. Les hasards de l'histoire ont placé la Moldavie dans l'espace soviétique, parce que la Roumanie avait fait le mauvais choix pendant la guerre, mais, dans l'esprit des Russes, la Moldavie n'appartient pas à leur sphère d'influence.

La question essentielle qui agite le débat public moldave aujourd'hui est celle des perspectives européennes du pays. On ne peut pas demander aux Moldaves de se rapprocher du modèle européen et d'engager des réformes, de couper leurs relations avec le voisin russe, où une grande majorité des immigrés travaillent et où ils réalisaient une majorité de leurs exportations, sans promesse d'une intégration européenne. Je suis sceptique sur l'élargissement indéfini de l'Union européenne, mais il me semble que la Moldavie a – à long terme, car le pays est encore très pauvre – vocation à la rejoindre. Sur la Géorgie et l'Ukraine, je suis plus partagé. Mais le cas de la Moldavie est à part. D'autres pays européens ont un discours franc sur ce sujet, la France gagnerait en influence politique si notre diplomatie était plus claire sur ce point.

Concernant l'économie, quatre entreprises françaises dominent leurs marchés respectifs en Moldavie : Orange dans la téléphonie, Lafarge dans le ciment, la Société Générale et Lactalis.

Sur la francophonie, je suis comme vous consterné. Je m'appuierai sur un exemple concret : l'Organisation internationale de la francophonie prenait en charge la formation des hauts responsables et fonctionnaires au français, ce qui permettait d'exercer une influence réelle. Ces crédits ont été coupés. En revanche, l'organisation a financé le déplacement d'experts durant les élections législatives en Moldavie, experts qui venaient parfois de pays aussi lointains que Madagascar. Les sommes dépensées sont sans commune mesure, et on peut douter de leur utilité.

Pour conclure, la Moldavie est un pays attachant, qui se trouve dans une situation de pauvreté extrême, et qui devrait répondre dans les années à venir à un défi majeur : il comptera bientôt un million de retraités pour beaucoup moins d'actifs. La situation est critique. Il faut donc, je le répète, lui laisser l'espoir d'une perspective européenne. Si nous ne le faisons pas, les partis anti-européens triompheront, notamment en raison des difficultés économiques. Les travailleurs moldaves ne peuvent plus gagner de l'argent en Russie comme dans le passé, les pommes et le vin moldaves ne sont plus acceptés sur le marché russe et, ne répondant pas encore aux normes européennes, pénètrent difficilement celui de l'Union... Il ne faudrait pas qu'en voulant tirer la Moldavie vers le haut, l'Europe ne l'enfonce un peu plus dans les difficultés. J'ajoute que le pays ne représente aucun risque migratoire, car de nombreux moldaves ont un deuxième passeport roumain. Par conséquent, tous ceux qui voulaient émigrer vers l'Europe l'ont déjà fait depuis longtemps.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (n° 2612).

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