Intervention de Philippe Wahl

Réunion du 18 mars 2015 à 9h00
Commission des affaires économiques

Philippe Wahl, président-directeur général du groupe la Poste :

Je vous remercie, mesdames et messieurs les députés, pour l'ensemble de vos questions, auxquelles je vais tâcher de répondre en détail.

Quel est le lien entre concurrence et hausse des prix ? Le régulateur, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), nous a accordé une hausse des prix pour la prochaine période de quatre ans. Nous passons d'un encadrement de l'évolution des prix « inflation + 1 % » à « inflation + 3 % ». Cette hausse nous permet de limiter les effets de la baisse des volumes sur nos revenus. Mais, évidemment, ce n'est pas une solution stratégique structurelle. La vraie réponse passe par le nouveau modèle économique que nous souhaitons imposer : de nouveaux services reposant sur le facteur humain. La hausse des prix sur les prochaines années doit seulement nous permettre de gérer la période de transition. Quant à l'activité « colis », je vous confirme qu'elle constitue bien un axe fort. La baisse à laquelle nous avons fait face l'année précédente est liée à des facteurs conjoncturels, essentiellement les difficultés rencontrées par nos trois grands clients que sont les sociétés de vente à distance du Nord de la France.

En très peu de temps, La Banque postale est devenue un acteur majeur du financement des collectivités territoriales. Le 12 février 2012, M. François Fillon nous demandait de jouer ce rôle. Nous y sommes parvenus en mois de neuf mois. En 2014, seulement notre deuxième exercice plein sur cette activité, nous prêtions 3,5 milliards d'euros. Nous sommes aujourd'hui le premier acteur du financement des petites communes.

Nous sommes fiers de continuer à remplir les quatre missions de service public qui nous sont assignées par la loi : la distribution de la presse, le service universel postal, l'accessibilité bancaire – le système bancaire classique continue à exclure certains Français – et l'aménagement du territoire. Notre rôle a été confirmé par une décision explicite de la Commission européenne. Nous souhaitons aller plus loin, en revendiquant trois missions supplémentaires d'intérêt général. La première, c'est la transition énergétique : nous disposons d'ores et déjà de la première flotte de véhicules électriques dans le monde ; nous nous positionnons dans le conseil à la rénovation thermique et notre filiale Recy'go est active dans le domaine du recyclage. La deuxième, c'est la modernisation de l'action publique. Les 1 000 maisons de services au public, tout comme le passage des examens du code et du permis de conduire en sont deux exemples. S'agissant de cette dernière mission, nous sommes parfaitement en capacité de la remplir. Notre filiale Mobigreen a déjà formé tous nos facteurs à l'éco-conduite. La troisième mission de service public que nous souhaitons porter, c'est le tiers de confiance numérique : le porte-monnaie, le portefeuille ou le coffre-fort électroniques sont autant de services que nous nous préparons à offrir. Mme Nathalie Collin, ici présente, directrice générale adjointe en charge du numérique et de la communication, s'attelle à cette tâche.

Les besoins en services à la personne sont considérables, en raison notamment de la montée de la problématique du vieillissement. Nous pensons que les facteurs et les postiers sont une réponse à ce besoin de proximité, ce qui nous a conduits à signer des accords, avec la caisse nationale d'assurance vieillesse ou, très récemment, avec la MSA au Salon de l'agriculture. Les agriculteurs retraités sont particulièrement exposés, du fait de leur âge et leur localisation géographique, à l'affaiblissement de la desserte des services publics. Néanmoins, pour jouer un rôle dans les services à la personne, nous devons résoudre l'obstacle de la solvabilité du besoin : nous devons être payés pour les services que nous rendons. En tant qu'entreprise, de service public, nous devons assurer un service tout en gagnant de l'argent.

Madame la députée Fabre, M. Jacques Savatier se tient à votre disposition pour apporter des réponses au problème de distribution de courrier que vous rencontrez dans votre circonscription. Je crois d'ailleurs savoir qu'il se rend dans votre territoire aujourd'hui, ce qui est une heureuse coïncidence !

Nous investissons chaque année plus de cent millions d'euros dans nos locaux. Notre plan de transformation concerne aussi bien les bureaux de poste des territoires ruraux que ceux des territoires urbains et des zones urbaines sensibles. Ces investissements sont nécessaires pour mettre en oeuvre nos cinq nouveaux formats : les deux classiques – l'agence postale communale et le relai poste commerçant – les deux nouveaux – maison de services au public et facteur guichetier – et le réseau poste urbain. Quel est l'objectif d'un tel plan de modernisation ? Les investissements que nous réalisons aujourd'hui se traduiront par davantage de fréquentation et de commerce, par une meilleure activité économique sur l'ensemble du territoire.

La Banque postale conforte l'utilité de La Poste sur le territoire et participe à la revitalisation de notre activité. À cet égard, j'ai déjà signalé notre rôle de financeur des plus petites communes.

Nous sommes en train de définir les critères applicables aux maisons de service public avec les élus. Leur nombre est bloqué à 330 depuis quatre ans. Pour parvenir à dépasser ce blocage, nous souhaiterions des critères plus souples. Quant aux lieux d'implantation, notre expérience nous pousse à conclure que les anciens chefs-lieux de canton sont sans doute les plus pertinents. En tout état de cause, les maisons de service public sont une construction commune à quatre types d'acteur : La Poste, l'État, les collectivités territoriales, et les opérateurs comme la caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), EDF, GDF Suez ou Pôle emploi. Ces derniers doivent aussi en tirer parti, de façon à ce que le réseau de La Poste devienne, en quelque sorte, le réseau « ultime ».

Nous sommes engagés dans le secteur de l'économie sociale et solidaire. Depuis l'année dernière, nous sommes partie prenante d'un accord, « Alliance dynamique », regroupant cinquante signataires : Sociétés coopératives et participatives (SCOP), associations, et fédérations de SCOP et d'associations. Le bureau de poste doit être un lieu d'accueil pour ces acteurs.

Je déplore comme vous les fermetures intempestives et aléatoires. Elles s'expliquent néanmoins aisément : plus de 4 000 bureaux sont dits « agent seul ». Ces agents, sur qui repose entièrement le fonctionnement d'un bureau, sont hélas soumis aux mêmes épidémies que le reste de la population. Si cette réalité est difficilement contournable, nous avons des marges d'amélioration en termes d'information du public et des élus.

La fermeture de la plateforme industrielle courrier (PIC) d'Onet-le-Château est malheureusement absolument nécessaire, compte tenu des coûts considérables qu'elle génère. L'enjeu est avant tout social. Sur les soixante-dix emplois concernés au départ, il reste vingt situations difficiles auxquelles il faut apporter une solution.

Nous n'avons pas les mêmes ratios de présence dans les zones urbaines sensibles qu'ailleurs, nous mettons en place des dispositifs spécifiques et nous allouons des moyens adaptés. À Lille Sud, où je me suis rendu très récemment, nos personnels sont spécifiquement formés pour s'adresser au public de ces quartiers, avec l'appui d'associations d'insertion pour traiter les publics les plus difficiles. Ca n'est pas un euphémisme : on parle de personnes qui ne parlent pas le français. Notre mission est de les aider à accéder aux services essentiels.

Trois initiatives sont en cours en Île-de-France et au sein du futur Grand Paris. Nous déployons le premier réseau français de consignes connectées. Suite à un accord entre GeoPost, La Poste et Neopost, société française qui développe des outils de traitement du courrier, nous comptons désormais plusieurs centaines de bases ; ce projet s'appuie sur un accord avec la SNCF. Nous avons également mis en place le premier « pickup service » à la gare Saint-Lazare, à droite des quais grande ligne : vous pouvez y retirer vos colis et accéder aux services postaux. La gare d'Ermont Eaubonne a aussi le sien depuis peu. Surtout, à travers notre grand projet de « logistique urbaine », pour lequel nous sommes déjà en contact avec dix des quinze villes de la métropole que vous avez citée, nous voulons apporter notre contribution à la dépollution et au désengorgement des centres-villes. Cela passe par la concentration des flux sur quelques transporteurs, l'usage du véhicule électrique – nous voulons que, dans certaines zones, il n'y ait que des véhicules électriques –, et l'adaptation du service postal, notamment en entrant dans la gestion de la chaîne du froid. À travers ces évolutions, nous répondrons à tous les besoins des centres-villes.

Je vous confirme que les aides versées par l'État n'en sont pas vraiment : ce sont des compensations destinées à couvrir les charges liées à l'exécution de nos missions de service public. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elles ne sont pas surcompensées. Bruxelles l'a reconnu très récemment.

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