Daech peut compter sur plusieurs sources de financement : le trafic des armements laissés par l'armée irakienne en déroute lors de la prise de Mossoul ; le trafic de pétrole, dont le produit est toutefois en diminution du fait des bombardements ; la taxation obligatoire qu'il impose aux ménages et aux commerçants en tant qu'État ; la monnaie d'échange que constituent les enlèvements, comme on le voit notamment pour les chrétiens.
Monsieur Nauche, l'apport des réserves à l'opération Sentinelle est aujourd'hui marginal, ce type d'opération réclamant une mobilisation extrêmement rapide. Toutefois, compte tenu du fait que la durée des opérations de protection du territoire sera longue, j'en suis convaincu, la question se pose de savoir comment mettre à contribution les réserves de manière flexible, c'est-à-dire dans des délais rapides et pour des périodes courtes. Cette interrogation ne fait que s'ébaucher. Nous sommes entrés dans une situation inédite dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences. Jusqu'à présent, les réserves n'étaient pas considérées par les armées comme un enjeu stratégique, elles sont en train de le devenir. Je ferai des propositions à ce sujet.
Quant au projet de loi sur le renseignement, je préfère l'évoquer dans le cadre d'une audition spécifique.
Monsieur Laffineur, vous m'interrogez sur la signature d'un contrat de vente de Rafale en Inde. Un proverbe indien résume bien la situation : « La patience vient aux impatients et l'impatience vient aux patients ». À la différence de l'Égypte, le processus est extrêmement lent. J'ai rendu visite au nouveau ministre de la Défense dès après sa nomination en novembre et l'ai revu récemment, ainsi que l'entourage du Premier ministre. Les Indiens soufflent le chaud et le froid. À ce jour, Rafale est le seul à avoir été retenu suite à l'appel d'offres mais toute une série de paramètres entrent en ligne de compte, y compris une forte pression exercée par la Russie. Les autorités indiennes insistent pour que Dassault noue un partenariat industriel fort avec le groupe indien HAL et accorde une totale garantie de qualité aux avions fabriqués en Inde, ce que le groupe français se montre réticent à faire, point sur lequel on ne peut lui donner tort. Le Premier ministre Narendra Modi se rendra en France à la fin du mois d'avril. Sa visite marquera-t-elle la fin de l'histoire ou bien l'issue vers l'avenir ? Nous ne saurions le dire. Nous ne pouvons prendre des risques trop grands s'agissant d'un contrat de longue durée.
Pour ce qui est des Émirats, je dirai en toute prudence que nous sentons des frémissements. Les négociations ont été poussées jusqu'à la fin de l'année 2011 puis elles se sont brisées de mauvaise manière, les parties prenantes s'étant fâchées. Aujourd'hui, nos relations sont plus positives et nous avons, depuis, vendu un ensemble satellitaire.
S'agissant des délais de livraison des Rafale en Égypte, madame Récalde, le Président de la République apportera certainement des précisions lors de sa visite de demain. Les conditions du contrat prévoient la mise à disposition d'appareils avant même que ne soit entamé le processus de production. Nous les prélèverons sur les stocks de l'armée de l'air selon le schéma suivant : trois appareils biplaces dès maintenant, trois autres dans six mois, trois autres dans douze mois, puis trois monoplaces l'année prochaine. La livraison spécifique commencera plus tard, à t+40, si mes souvenirs sont bons. Entendons-nous bien, ces prélèvements ne viendront en rien diminuer les capacités de nos forces car de nouveaux appareils seront livrés en substitution. Le contrat prévoit également une garantie de la COFACE à hauteur de 60 %, ce qui constitue un geste exceptionnel de la France.
Pour la frégate multi-missions, la négociation d'ensemble prévoyait une mise à disposition très rapide, dans la perspective de protéger le canal de Suez élargi, les combats dans le Sinaï faisant peser une menace directe. Les travaux de doublement devraient être achevés à l'été et la frégate Normandie sera livrée le 4 août prochain.
À cela s'ajoutent des modules de formation pour les Rafale et la FREMM.
Monsieur Laffineur, vous me demandez quelle est la situation économique du Mali. Je ne suis pas directement compétent. Une grande partie de son renouveau relève de la mobilisation financière de la conférence de Bruxelles. L'aide au développement commence d'arriver et me semble plutôt bien gérée. Le changement de Gouvernement a permis la formation d'une équipe caractérisée par le sérieux et le professionnalisme, y compris dans le domaine de la défense. Cela s'est traduit par l'engagement du président Ibrahim Boubacar Keïta à respecter les accords d'Alger, volonté qui ne s'était jamais manifestée auparavant. Pourvu que ça dure !
Le contrat DONAS repose sur un accord entre la France, le Liban et l'Arabie saoudite pour la fourniture d'équipements d'un montant de 2, 5 milliards d'euros. La ligne de crédit permettant le premier paiement a été ouverte le 22 février dernier, ce qui a dissipé les incertitudes liées au changement de roi saoudien. Le plan d'équipement prévoit, dans le domaine terrestre, des véhicules de combat VAB, des éléments d'artillerie, dans le domaine aérien, six Cougar, et, dans le domaine naval, des patrouilleurs rapides de cinquante-six mètres, mais pas de corvettes, auxquelles nos interlocuteurs ont renoncé après de longues discussions. À cela s'ajoutent des moyens de surveillance maritimes et aériens, un ensemble de dispositifs anti-terroristes et des livraisons de missiles anti-char HOT et MILAN, sans oublier un programme de formation. Bref, c'est un bon accord : gagnant-gagnant. Le mieux serait évidemment qu'il y ait un président de la République au Liban.