Intervention de Jean-Baptiste Eyraud

Réunion du 19 mars 2015 à 8h00
Commission d'enquête sur les missions et modalités du maintien de l'ordre républicain dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, ainsi que de protection des personnes et des biens

Jean-Baptiste Eyraud :

En 2007, nous nous sommes aperçus que les commissaires, sur le terrain, n'étaient plus fiables. Nous avions pris l'habitude de discuter avec le commissaire qui se trouvait sur place et la plupart du temps, on parvenait à un accord. Mais les relations ont changé, sans doute parce que l'organisation préfectorale a été modifiée, que le poste de commandement central et l'observation vidéo ont pris plus d'importance. Les instructions sont maintenant directement données par le représentant du cabinet ou du préfet, qui n'est pas forcément sur place, mais qui, de la préfecture, regarde ce qui se passe.

De fait, nous avions remarqué à plusieurs reprises que lorsque nous concluions un accord avec le commissaire, dix minutes après, celui-ci revenait dessus. Nous avons compris que cela se passait au-dessus et qu'il fallait trouver le moyen de s'entendre avec l'autorité supérieure. Nous le déplorons car pour nous, le commissaire est celui qui a l'autorité sur le terrain. Cela va à l'encontre de notre conception de l'organisation du maintien de l'ordre républicain.

Ensuite, il arrive en effet que l'on procède à une évacuation à la suite d'une occupation d'immeuble. Nous ne contestons pas et, en règle générale, nous partons, même si la décision d'évacuation ne nous paraît pas légale : dans un immeuble, il y a de nombreux dangers – par exemple, de chute dans les escaliers – et nous voulons éviter qu'il y ait des blessés. La plupart du temps, d'ailleurs, l'évacuation s'organise avec les autorités sur place.

Il n'en va pas de même des campements. Je vous l'ai dit, avant 2007, il n'était pas nécessaire de faire de déclaration préalable quand on organisait un campement sur le trottoir ou sur une place. À partir de cette date, nous y avons été fortement incités, et nous avons fini par le faire. Le campement est ainsi devenu une forme de manifestation sans parcours, une manifestation statique.

Il suffit de se reporter à une déclaration de campement pour s'en convaincre. En voici un extrait :

« Objet : déclaration de manifestation, place de la République, du 21 octobre 14 heures, au lundi 28 octobre 19 heures.

« Nous organisons, le 21 octobre, à partir de 14 heures, une manifestation statique. Cette initiative a pour objet d'exprimer les conditions d'existence des familles, etc. À cette fin, nous prévoyons des prises de parole, etc. »

Cela me rappelle un épisode sur lequel je souhaite revenir. L'autorité préfectorale s'est rendu compte que nous avions fait une déclaration de manifestation pour le 19 octobre, et qu'elle ne nous avait pas opposé de refus. Nous prenons soin, en effet, de déposer une déclaration au minimum quatre jours avant la manifestation, de sorte que l'autorité puisse nous répondre dans des délais raisonnables, qui nous permettent ensuite, en cas de refus, de contester devant le tribunal administratif.

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