S'agissant des fonds directs de Bpifrance, je précise qu'il s'agit de fonds de co-investissement dans une logique de pari passu avec les fonds de capital-risque de la place. Quand les entreprises ont un degré de maturité suffisant, il est nécessaire de basculer leur financement dans le domaine privé pour assurer un meilleur effet de levier. Nous nous voulons une banque différente, qui finance le risque lié à l'innovation, mais la logique veut que le secteur privé prenne le relais afin de trouver les dizaines de millions d'euros nécessaires pour créer les champions dont nous avons besoin. Notre action en direct est, en réalité, relativement mineure. Nous avons essentiellement vocation à comprendre les dynamiques du marché et à intervenir conjointement avec des acteurs privés. Il ne s'agit pas pour nous de combler une faille du marché. C'est ainsi que nous ne soutenons pas directement l'amorçage, dont le financement renvoie à une expertise très fine. Nous considérons que nous ne disposons ni des moyens ni des compétences pour exercer ce métier compliqué. Nous préférons nous adosser à la compétence qui émerge des quinze ans d'expérience du capital-risque français.
Pour ce qui est des relations de Bpifrance et de l'ADEME, nous travaillons à coordonner nos actions à travers le programme d'investissements d'avenir. Nous nous distinguons de l'ADEME par l'accent privilégié que nous mettons sur le financement des PME et des ETI : elles représentent 80 % de la valeur de nos financements et 70 % de la valeur des programmes collaboratifs – 10 % allant aux grands groupes et 20 % aux laboratoires. 90 % des aides individuelles sont versées à des entreprises de moins de cinquante salariés. On saisit bien là la complémentarité entre nos deux structures. Il n'en demeure pas moins que s'agissant de certaines thématiques, l'existence d'un double guichet peut être source d'une relative complexité. C'est la raison pour laquelle nous nous efforçons chacun de notre côté de réorienter au mieux les dossiers des entreprises.
La question de la redondance et du saupoudrage est tout à fait légitime. J'y répondrai de deux façons. Premièrement, nous voyons arriver un nombre impressionnant de projets. En 2014, les financements des entreprises de moins de cinq ans au titre de l'innovation ont crû de 30 %. Nous souhaitons accompagner ce mouvement chez les étudiants et les jeunes entrepreneurs mais nous manquons de moyens. Ainsi avons-nous dû arrêter l'attribution de bourses French Tech en octobre 2014 et demander à leurs potentiels bénéficiaires d'attendre le mois de janvier pour postuler. Deuxièmement, dans le cadre du plan Nova, nous avons effectué un énorme travail de toilettage de la base des clients : en 2014, 80 % de nos clients ont été de nouveaux clients. Nous avons mis l'accent sur le renouvellement afin d'éviter que certaines entreprises ne se retrouvent en position d'être aidées trop souvent ou trop massivement par l'argent public.
S'agissant de la cohérence, nous avons beaucoup oeuvré à simplifier nos procédures et à combler la lacune du marché en matière de financement de la démarche commerciale qui garantit le succès d'une entreprise. Toutefois, nous ne nous considérons pas comme étant en charge de la stratégie des filières. Nous avons des contacts étroits avec la direction générale des entreprises et comptons mettre la compétence de Bpifrance au coeur de la réflexion sur les filières. Et s'agissant du numérique en particulier, nous avons l'intention de travailler à une meilleure compréhension de ses nouveaux modèles.
Innovations incrémentales ou innovations de rupture, c'est une question essentielle. Nous souhaitons décloisonner les différentes dimensions de l'innovation et la panoplie des outils nous y aidera. Nous voulons faire en sorte que des financements bancaires traditionnels puissent financer des innovations plus incrémentales, pour lesquelles les risques sont plus modérés.
Vous avez souligné, madame Valter, la complexité des différentes aides. Ce maquis est encore une réalité malgré tous nos efforts. Nos donneurs d'ordre sont divers et veulent chacun imprimer leurs marques sur les dispositifs de financement, qu'il s'agisse de l'Union européenne, de l'État ou des régions. Nous essayons en quelque sorte d'être le témoin de l'entreprise pour utiliser de manière optimale les dispositifs existants. Et pour cela, nous pouvons compter sur la compétence de nos chargés d'affaires.