Intervention de Barbara Pompili

Réunion du 24 mars 2015 à 17h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

Le groupe écologiste partage votre constat, Madame la ministre : tel qu'il fonctionne, le collège aggrave les difficultés, l'échec scolaire et les inégalités, et il est urgent qu'il cesse d'être le maillon faible de notre système éducatif. Nous soutenons donc une réforme qui, s'appuyant sur la souplesse, l'autonomie et l'interdisciplinarité, entend faire en sorte que le collège unique ne soit plus un collège uniforme.

La réforme des collèges vise à donner plus d'autonomie aux établissements, à accorder une plus grande liberté pédagogique aux équipes, à développer le travail collectif et les projets interdisciplinaires, à favoriser l'oral, les langues vivantes, le travail en petits groupes, à prévoir un accompagnement personnalisé, en fonction des besoins de chaque élève, ce qui doit nous interroger sur l'externalisation croissante et inquiétante de cet accompagnement par des acteurs parfois trop éloignés du système scolaire. Tous ces objectifs répondent aux grands principes que les écologistes ne cessent de mettre en avant en matière d'éducation, comme ils l'ont fait dans le cadre des débats sur la refondation de l'école au travers de nombreux amendements.

Plusieurs exemples montrent qu'une autre organisation de la vie scolaire et qu'une autre approche de la pédagogie et du travail en classe sont possibles – je pense tout particulièrement au collège Clisthène de Bordeaux. Pour lutter contre le décrochage scolaire et redonner le goût d'apprendre, une pédagogie prévoyant travail en équipe, projets collectifs, semaines interdisciplinaires, groupes de tutorat composés de jeunes de niveaux différents, concourt à résoudre les problèmes de violences, à sortir des dynamiques d'échec scolaire. Elle permet aussi aux élèves d'être plus à l'aise à l'oral. Ce collège incarne la mise en pratique réussie d'un changement de paradigme, et de nombreuses autres expérimentations ont fait leurs preuves.

Les enseignements pratiques interdisciplinaires, le travail en petits groupes et l'accompagnement personnalisé illustrent ce changement d'approche. Mais nous pourrions aller plus loin, avec la mise en place de classes dites « verticales », car l'hétérogénéité des niveaux peut être une force. Pourquoi ne pas former des petits groupes d'élèves d'âges et de niveaux différents, qui travaillent ensemble et s'entraident, encadrés par plusieurs enseignants ? Les relations entre élèves ne doivent plus se limiter à une simple juxtaposition, elles doivent devenir de véritables relations de travail. La réforme des collèges doit permettre ce genre d'innovation, et il est essentiel que ces évolutions s'inscrivent dans le dialogue avec les syndicats.

Ces innovations ne sont pas forcément coûteuses, puisque l'enjeu est la liberté laissée aux établissements et aux équipes pédagogiques. Cela m'amène à relayer les craintes sur la question des moyens qui accompagnent votre réforme : les 4 000 équivalents temps plein semblent, en effet, relativement faibles au regard des quelque 7 000 collèges.

La réforme ne réussira que si les enseignants la font vivre. Il est donc indispensable que la formation initiale et continue privilégie les pratiques collaboratives et prépare à ce changement de paradigme dans l'accompagnement personnalisé ou dans la manière de faire classe. Où en sont d'ailleurs les réflexions sur la bivalence des enseignements ?

Articuler la réforme des programmes, et donc du socle, avec celle de l'évaluation est une excellente chose. Mais, pour mener à bien les discussions sur les horaires de chaque discipline, ne faudrait-il pas attendre que la réflexion sur les programmes aboutisse, y compris pour les langues anciennes, à propos desquelles les enseignants expriment des inquiétudes qu'il faut entendre ?

Concernant le brevet, nous attendons les retours du Conseil supérieur des programmes, en espérant que les projets interdisciplinaires seront pris en compte dans l'évaluation. J'ai entendu ce que vous avez dit à ce sujet, Madame la ministre.

Où en sont les réflexions concernant l'évolution de la carte scolaire ? Vos annonces concernant la LV2 dès la cinquième vont permettre de mettre fin à certaines stratégies de contournement, ce dont nous nous réjouissons. Mais il faudrait s'assurer que la LV1 est bien enseignée dès le CP : pour l'heure, il semble que ce ne soit pas simple à mettre en oeuvre. Par ailleurs, il semble primordial que les réflexions en cours prennent en compte le privé.

En ce qui concerne notre volonté commune de moduler les moyens alloués aux établissements, où en est la réflexion, notamment sur les critères qui seront retenus ? Tient-on compte à cet égard des expériences étrangères, à l'image du système mis en place en Belgique, qui a permis à ces établissements de s'émanciper de la stigmatisation des labels ?

Je tiens à réaffirmer l'intérêt du groupe écologiste pour toutes les initiatives permettant de renforcer la démocratie au collège et de rapprocher école et parents. La généralisation de la mallette des parents est une excellente chose, mais il faut aller plus loin, en associant les familles et les autres acteurs du système éducatif, afin d'avancer réellement vers l'éducation partagée.

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