La nouvelle organisation du temps scolaire prend en considération les besoins des élèves. Or, ainsi qu'en dispose la loi de refondation de l'école, ce dont ils ont besoin actuellement, c'est d'être des citoyens du XXIe siècle. Vous avez aussi pris en considération les lacunes et les risques de décrochage mis en lumière par les classements PISA. Vous proposez ainsi une nouvelle définition du temps d'étude qui pourrait rappeler les pratiques instaurées dans de piètres conditions au lycée, en 2010. Cette réforme avait servi de prétexte pour supprimer des postes et faire des compétences un simple alibi en vue de rationaliser et d'optimiser l'organisation des classes, le tout ayant entraîné une forte inflation des groupes d'élèves. Mais partant des besoins des élèves et étant assortie de la création de 4000 ETP, la présente réforme permettra de travailler autrement.
Il reste qu'une telle méthode peut éveiller d'autres réticences. En effet, le fait de consacrer 20 % de temps scolaire à des enseignements « choisis » par les équipes peut faire craindre l'instauration d'une hiérarchie insidieuse entre ces enseignements au sein des établissements. Quelle place les enseignants occuperont-ils dans l'organisation de ce temps dans les collèges ? Quelle sera celle des principaux ? Cela limitera-t-il l'autonomie et l'initiative des enseignants dans la gestion de leurs groupes ? Si cette réforme repose sur l'intention louable de prendre en considération le temps des élèves, elle n'en doit pas moins demeurer lisible. Je sais toutefois, pour l'avoir constaté avec plaisir dans ma circonscription, qu'elle peut réussir.
En 1983, Paul Veyne publiait un livre intitulé Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes ? – question qu'il a posée de nouveau à l'occasion des événements du mois de janvier dernier. L'historien souligne que la France manque de bons traducteurs de latin et de grec, qui puissent percevoir l'essence des démocraties et de la citoyenneté antiques et nous rappeler notre passé pour mieux comprendre le présent. En instituant, dans le cadre de la réforme des collèges, cette étude des civilisations antiques, n'est-ce pas aussi l'occasion de faire le lien entre l'état des sciences humaines de l'Antiquité et leurs conséquences dans l'enseignement pratique pour les élèves ? Les victimes des attentats du Bardo, comme tous les touristes du monde qui admirent les vestiges antiques, ne parlent sans doute pas tous latin. En revanche, ils sont tous initiés et curieux de la culture antique. Or, pour offrir de telles initiations, nous avons besoin de spécialistes qui fassent le lien entre le collège et leur expertise en sciences humaines.