Intervention de Dominique Raimbourg

Séance en hémicycle du 30 mars 2015 à 16h00
Sociétés mères et entreprises donneuses d'ordre — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame et messieurs les rapporteurs, vous aviez raison, monsieur le rapporteur, de considérer que ce texte était une voie étroite entre deux façons de réagir : la mondialisation sans foi ni loi, ou le renfermement nationaliste, qui porte la guerre au bout de sa logique.

Nous devons suivre cette voie étroite, d’autant plus qu’il s’agit là d’un bon texte, pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, contrairement à ce qui est indiqué, il ne fait pas peser sur les entreprises des obligations qui seraient démesurées. Il les contraint simplement à prendre un plan de précaution pour expliquer les mesures prises, les décisions mises en oeuvre, pour prévenir toute violation manifeste des droits de l’Homme, des conditions de travail indignes ou des atteintes insupportables à l’environnement.

Cette obligation est du reste légère puisqu’elle est de moyen et non de résultat.

Ce texte est de surcroît efficace car il ne définit aucune norme. Par là même il pourra s’adapter à toutes les situations. Sous le contrôle du juge, nous saurons si le plan était adapté à son environnement et au pays dans lequel il a été mis en oeuvre.

Ce n’est pas une nouveauté. Songez à la façon dont le code civil et les magistrats qui l’appliquent apprécient la gestion : lorsque l’on gère le bien d’autrui, il faut le faire « en bon père de famille ». Le code ne donne pas davantage de précisions quant à la l’attitude du « bon père de famille » – laquelle a de surcroît dû varier au cours des temps et des ans – que le présent texte. Nous sommes donc saisis d’un texte susceptible de s’appliquer à toute les situations, et c’est l’une de ses principales qualités.

D’autre part, c’est un texte de progrès. Tout d’abord, si les situations visées à l’étranger sont insupportables, la contrainte sociale obligera à l’évidence au progrès technique.

En outre, c’est un texte de plein emploi, car si les conditions de travail dans les pays tiers sont telles qu’elles sont insupportables, alors nous assisterons au rapatriement de divers travaux en France.

Enfin, c’est un texte d’avant-garde. L’avant-garde est cette petite escouade qui s’avance devant la troupe principale pour tenter de lui ouvrir la voie ; c’est le cas de ce texte. En effet, ce projet de loi peut ouvrir la voie à une extension. J’ai entendu avec intérêt ceux qui regrettent qu’il ne fixe pas des seuils assez bas pour qu’ils s’appliquent à l’ensemble des sociétés : c’est sans doute vrai, mais les choses pourraient très bien changer, car trop de sociétés ne sont pas couvertes et le fait même de fixer des seuils assez élevés incitera à la création de petites sociétés entre lesquelles seront répartis plusieurs travaux. Un système de fraude se mettra ainsi en place. L’avancée est néanmoins possible et importante.

Enfin, ce texte, qui ne s’oppose en rien au caractère volontaire de la responsabilité sociale des entreprises, peut être l’occasion de faire bouger l’Europe. Rappelons-nous les débats que nous avons eus sur ce sujet lorsqu’il a été question d’instaurer une taxe sur les billets d’avions pour venir en aide à des fonds internationaux de lutte contre le sous-développement : ils étaient les mêmes. Pourtant, cette taxe est en vigueur depuis des années et a été reprise dans plusieurs autres pays.

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