Je remercie les trois intervenants pour le caractère complet de leurs interventions sur un sujet par nature très divers et très prégnant. Qu'il s'agisse de transition énergétique, de biodiversité, de changement climatique, d'actions à mener ou de conséquences supposées, les outremer français sont aux premières loges. Nous l'avons du reste constaté lors de l'examen du texte relatif à la biodiversité : les élus de ces territoires sont très mobilisés et ils ressentent parfaitement les urgences et les enjeux.
Ma première question portera sur le caractère plus ou moins intégré des acteurs, qu'il s'agisse des acteurs en réparation, en recherche ou en innovation. Dans ces territoires à la fois à très forts enjeux, de petite taille – à l'exception de la Guyane – et extrêmement spécifiques, il me semble que l'intégration des acteurs n'est pas suffisante pour avoir une action coordonnée marquée. L'exemple, qui me va droit au coeur, des parcs et de l'ONF en est une parfaite illustration : à cause d'une organisation pratiquement calquée sur celle de la France métropolitaine, on perd énormément d'énergie au niveau local à coordonner des services qui devraient, à mon avis, être bien plus intégrés. J'aimerais avoir votre sentiment sur ce sujet.
La deuxième a trait à la coopération régionale. Ces territoires français ne sont pas isolés. Ils sont dans un environnement régional, lui aussi soumis à des enjeux analogues, mais pas toujours identiques – les niveaux de développement ne sont pas les mêmes. Comment faire en sorte que notre pays, par sa présence sur ces territoires et dans ces zones géographiques, soit un acteur important, majeur, reconnu, en termes d'observation, de recherche, d'innovation, d'investissement et de réparation ?
La troisième portera sur les financements, ce qui renvoie à celle de l'organisation et de l'intégration. Dès lors que les collectivités, les organismes publics, les organismes de recherche, les acteurs économiques ne sont pas intégrés, chacun dispose de moyens de financement qui lui sont propres et est confronté à des arbitrages qui lui sont également propres. Tout cela ne garantit pas une optimisation des moyens mis en oeuvre.
Je citerai l'exemple de l'ONF, dont la présence outremer est considérée de la même façon qu'en Franche-Comté. Il y a des directions, des missions d'intérêt général (MIG) qui sont financées, un produit bois qu'on est censé vendre, la différence entre les deux faisant apparaître un déficit annuel. Ce modèle, qui peut se comprendre, en termes de péréquation, sur un territoire forestier tempéré et de grandes dimensions, n'a plus aucune signification à l'échelle de La Réunion, de la Guadeloupe ou de la Martinique. Pourtant, ce sont sous ces auspices que l'on gère les moyens éventuellement disponibles. On pourrait même en conclure qu'il faut réduire ces fameux déficits, et donc supprimer des moyens, alors qu'il faut au contraire intensifier la politique de restauration des terrains en montagne (RTM), la forêt, la biodiversité, le génie écologique ou la protection contre l'érosion. Organisation et financement me semblent liés. Quelles solutions pouvez-vous proposer ?
N'oublions pas enfin la nécessité de ne pas nuire, comme disaient les vieux médecins. Autrement dit, dans toutes les actions entreprises aujourd'hui, il faut garder à l'esprit le souci de ne pas aggraver la situation. Pour ce qui est de l'eau, cela me rappelle un souvenir : j'ai commencé mes études sur la gestion de l'eau à Saint-Louis-Baillif, sur la Côte-sous-le-Vent. Je constate que je n'ai pas réussi puisque la situation en Guadeloupe est toujours aussi difficile… Ne faut-il pas s'interroger sur la pertinence de l'organisation des réseaux d'eau avec des myriades de sociétés distinctes qui gèrent en affermage ou en concession sur un territoire extrêmement restreint ? Ne faudrait-il pas réfléchir à une organisation administrativo-technique plus adaptée et plus efficace ?